Read Ebook: La chasse à l'oppossum by Wilde Oscar Dubious Author
Font size:
Background color:
Text color:
Add to tbrJar First Page Next Page Prev Page
Ebook has 162 lines and 8057 words, and 4 pages
-- Comment, en chasse? C'est donc la nuit? ...
-- Certainement, l'opossum est un noctambule, il ne sort de sa retraite que le soir; toute la journ?e, il dort et se repose de ses p?r?grinations de la nuit.
Robert siffla les chiens, donna ordre ? un des bushmen de rester avec le n?gre ? la garde du bivouac, et, accompagn?s de l'autre homme, nous part?mes sous bois. Devant nous, N?ro et Trim qu?taient au pied des grands arbres, flairant le sol et promenant leur museau noir sur l'?corce lisse des eucalyptus.
-- Tu sais, me dit Robert, qu'on ne tire l'opossum qu'? balle, pour endommager la peau le moins possible. Maintenant, silence, suivons les chiens.
Depuis un instant, Trim et N?ro qu?taient avec plus d'ardeur. N?ro, surtout, montrait des signes ?vidents de satisfaction, ? en juger du moins par la fa?on violente dont il agitait la queue; apr?s avoir plusieurs fois contourn? un gros tronc, lisse et uni jusqu'? plus de quinze m?tres du sol, o? une grosse branche formait la fourche, il s'arr?ta r?solument, le nez en l'air, les oreilles ramen?es en avant, immobile; ses yeux, qui brillaient dans l'ombre comme des escarboucles, ?taient fix?s sur la ma?tresse branche. D'un doigt, Robert m'indiquait un point fort confus, et me faisait signe de tirer.
-- Je ne vois rien, murmurai-je.
-- L?, me dit-il.
Et il me montrait toujours la fourche de l'arbre.
Impatient? sans doute par mon peu de perspicacit?, il haussa d?daigneusement les ?paules, et, ajustant l'endroit qu'il m'avait d?sign?, fit feu.
Un animal de la taille d'un gros li?vre tomba au pied de l'arbre; il n'?tait pas tout ? fait mort et s'agitait violemment sur le sol; N?ro s'approcha, mais il se tint ? distance respectueuse; moi; je me pr?cipitai pour ramasser la victime.
Robert me retint.
-- N'y touche pas, cria-t-il; tu te ferais couper la main; l'opossum a des dents terribles. Vois, N?ro n'ose le prendre.
Enfin, la pauvre b?te rendit le dernier soupir, et Robert la remit aux mains du bushman, puis nous continu?mes notre chasse.
J'avoue que j'?tais un peu confus de ma maladresse. Tout en avan?ant sous bois, je me promettais d'y voir plus clair une autre fois. D?s que je voyais Trim ou N?ro s'arr?ter au pied d'un arbre, j'?carquillais les yeux et j'avais si grande envie d'apercevoir un opossum blotti sur une branche, que, la fatigue et le d?sir aidant, j'en voyais maintenant o? il n'y en avait point.
Tout absorb? dans mes recherches, je marchais lentement, et mes deux compagnons m'eurent bien vite d?pass?; les chiens, qui sans doute me jugeaient un trop pi?tre chasseur pour rester ? mon service, avaient suivi Robert et le bushman, et je continuais d'avancer le nez en l'air.
Enfin, il me sembla bien distinguer quelque chose se mouvant ? l'extr?mit? d'une branche qui s'?tendait perpendiculairement et allait rejoindre un vieil arbre mort, dont la cime ?tait bris?e; je regardai encore quelques instants, et, ma foi, ? tout hasard, j'ajustai l'objet et je fis feu.
Rien ne tomba; mais je ne vis pas fuir l'animal.
-- Allons, me dis-je: je vois des opossums ou il n'y en a pas.
Et j'allais m'?loigner quand il me sembla apercevoir un corps suspendu ? cette m?me branche.
J'appelai Robert, et lui contai ma surprise. Il me regarda en riant.
-- Mais tu l'as tu?, me dit-il; seulement, il n'est pas tomb?; il a pu s'accrocher au rameau par la queue prenante dont la nature l'a dou?, comme certains singes, et il est l? pour longtemps.
Un instant, je pensai que Robert se moquait de moi; mais il fallut bien me rendre ? l'?vidence: un rayon de lune ?clairait maintenant en plein la place o? nous ?tions, et je distinguais parfaitement ma victime suspendue par la queue, la t?te en bas.
Robert riait de mon air d?confit.
-- Allons, mon bon, ne te d?sole pas, nous l'aurons, ton opossum.
Il appela le bushman.
-- Dick, venez tirer mon ami d'embarras.
-- Il y a deux moyens, r?pondit le bushman apr?s avoir mesur? de l'oeil la hauteur et la grosseur de l'arbre: grimper...
-- Vous n'y songez pas; mon brave! dis-je ? cet homme; grimper apr?s ce tronc lisse que cinq personnes pourraient ? peine embrasser!
Dick me regarda.
-- Oui bien! Monsieur, grimper ? cet arbre; mais ce serait long, et nous avons un moyen plus simple.
-- Et lequel?
-- Couper la queue de la b?te avec une balle.
-- Eh bien! essayez, Dick, reprit Robert... C'est un fin tireur, ajouta mon ami en se tournant vers moi.
Le vieux bushman parut flatt? de ce compliment; il se recula de quelque pas et ajusta lentement la b?te; le coup partit, et N?ro se pr?cipita sur l'opossum qui venait de tomber.
-- Pas plus difficile que cela, dit le bushman en rechargeant son fusil; la queue est coup?e au ras de la branche.
Je le f?licitai chaudement, et, tout joyeux, j'examinai la proie qui avait failli m'?chapper.
Quand nous rentr?mes au camp, il ?tait une heure du matin; nous rapportions sept opossums, dont deux tu?s par moi.
Mon premier soin, le lendemain en me r?veillant, fut d'examiner notre chasse. Les opossums que j'avais l? devant moi, ?taient de la grosseur d'un fort li?vre; le plus lourd pesait environ huit ? dix livres. Le pelage ?tait, brun fauve et bien fourni; le dessous du corps et l'int?rieur des pattes, gris clair; la queue, aussi longue que le reste du corps, ?tait garnie, en dessus, de longs poils, en dessous, absolument nue; c'est sans doute ce qui permet ? l'opossum de s'en servir pour s'accrocher ou se soutenir; les pattes, d'in?gale grandeur, celles de devant un peu plus courtes que celles de derri?re, ?taient arm?es de griffes longues et ac?r?es. La t?te fine, le nez pointu, les yeux tr?s grands et surmont?s d'une tache brun clair qui chez les chiens s'appellent: feu. Cette particularit? l'a fait nommer: quatre-oeils, dans certaines contr?es de l'Am?rique du Sud, o? il est tr?s abondant. En r?sum?, ce charmant petit animal m'a bien paru faire partie de la famille des sarigues et kanguroos et, par cons?quent, ?tre un marsupiau.
J'en ?tais l? de mes observations, quand Robert vient me rejoindre.
-- Regarde un peu la m?choire de cette b?te, me dit-il et tu verras, si j'avais raison de te mettre en garde contre ses morsures.
Je remarquai, en effet, que, pour sa taille, l'opossum est dou? d'une m?choire puissante et solidement constitu?e: les dents sont nombreuses, celles de devant longues et ac?r?es et tr?s capables de faire au chasseur imprudent de cruelles blessures.
-- Vois-tu, mon cher, cet animal est d'un naturel tr?s doux; mais il est comme beaucoup d'autres: quand on l'attaque il se d?fend; bless? et accul?, il se sert des armes que la nature lui a donn?es et joue consciencieusement, des dents et des griffes; quand ils le prennent vivant, les indig?nes savent ce qui leur en cuit.
-- Le prennent-ils vraiment vivant?
-- Quelquefois; quand ils trouvent les traces d'une famille cach?e dans un creux d'arbre, ils tachent de s'en emparer, car, malgr? son peu de saveur, la chair de l'opossum est consid?r?e par les Australiens comme un mets d?licat.
-- Je serais v?ritablement curieux de voir cela.
-- La chose n'est pas impossible; je vais consulter mon vieux Dick, qui conna?t admirablement le pays il pourra me dire si, ? quelques heures de marche ? l'ouest, nous avons la chance de rencontrer de vrais Australiens; je sais qu'il y en a quelquefois dans cette contr?e.
Dick venait de rentrer au camp; apr?s nous avoir accompagn?s, il ?tait retourn? continuer seul la chasse, qu'il avait trouv?e trop courte et trop peu fructueuse.
A ce moment, assis sur un tronc d'eucalyptus renvers? au centre de la clairi?re, son fusil entre ses jambes, quatre magnifiques opossums morts ? ses pieds -- sa chasse de la nuit -- il mangeait sous le pouce un ?norme morceau de pain et de lard. Son chapeau rejet? en arri?re laissait voir sa t?te rude et ?nergique; il ?tait superbe ainsi, et montrait bien le type parfait du bushman et du coureur des bois. Je retins Robert, qui se dirigeait vers lui, et sortant mon carnet de ma poche, je pris le croquis du vieux Dick.
Quand j'eus termin?, Robert et moi, nous nous approch?mes de lui.
-- Savez-vous, lui dit le ma?tre, si, en marchant vers l'ouest, nous aurions la chance de trouver une tribu?
-- Oui bien, Monsieur; j'ai vu leurs feux ce matin en rentrant; ils doivent ?tre sur les bords de la crique qui porte mon nom.
Add to tbrJar First Page Next Page Prev Page