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Read Ebook: Des homicides commis par les aliénés by Blanche Mile

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Ebook has 526 lines and 54501 words, and 11 pages

t cela? <>.

Eh bien, je lui r?ponds, cela ne vous regarde pas. Tout cela, ce n'?tait pas naturel. Il y a longtemps qu'on manigance ?a.

Tel est le r?sum? de nos longues conversations avec L... Les indications les plus importantes que nous y ayons trouv?es au point de vue de nos recherches sont confirm?es par des indications semblables que nous relevons dans l'examen attentif, et fait au point de vue m?dical, des documents du dossier.

Voici, en effet, ce qui ressort pour nous de cet examen: c'est que L... nourrissait depuis longtemps une haine profonde contre M... Mais les motifs de cette haine sont insens?s, ils sont ?clos de toutes pi?ces, pour ainsi dire, dans une t?te faible, chez un homme d'une intelligence au-dessous de la moyenne, et qui, dans une petite ville, o? l'on est volontiers indulgent pour un individu ais?, passe pour un faible d'esprit, dont la conversation est nulle, les id?es souvent d?cousues.

Calme, sans excitation d'aucune sorte, L... reste inoffensif; mais qu'? certains moments l'id?e lui soit venue de se venger de M... qu'il accuse de le tromper, cela ne saurait faire doute pour nous. Cependant de la conception ? l'ex?cution il y avait loin, et nous ne pensons pas que cette r?solution ait ?t? le motif r?el du d?part de L... pour Paris. Une fois en pr?sence de M..., il s'est pass? dans son esprit ce qui se passe dans l'esprit de tous les d?lirants pers?cut?s: L..., apr?s une longue p?riode de calme apparent, de vague, d'incertitude, a ?t? pouss? au meurtre par un mot, un regard, un geste, qui, en le confirmant dans les soup?ons dont il ?tait poursuivi depuis longtemps, ont tout ? coup fait ?clater la d?termination homicide.

Cet acte ?tait donc pr?par?, et il a ?t? accompli sous l'influence d'une surexcitation c?r?brale momentan?ment plus intense; il peut ?tre directement rattach? ? une disposition morbide ant?rieure, qui est rest?e, peut-?tre ? l'?tat latent, ne donnant lieu qu'? des manifestations dans le langage, dans le tenue, dont la cause ?tait inconnue; et cependant ces manifestations ?taient assez caract?ristiques pour que, dans le pays qu'habitait L... elles aient ?t? remarqu?es et lui aient valu la r?putation d'un homme dont la t?te ?tait faible, d'un homme sujet ? des emportements et dont les id?es ?taient souvent d?cousues.

Voici les pi?ces que nous croyons devoir reproduire; elles nous ont sembl? n'avoir pas moins d'int?r?t que les r?ponses m?me de L...

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Le 1er novembre 1871, le maire d'E..., dans une lettre, dont nous reproduisons textuellement la plus grande partie, signale l'?tat d'exultation de L... au moment de son d?part; il n'a pu toutefois obtenir l'assurance, qu'avant son d?part, L... ait tenu des propos mena?ants contre M...; il ?crit:

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L... ?tait donc pour les gens au milieu desquels il vivait, qui ne savaient ? quoi rapporter les bizarreries de son caract?re, les emportements subits auxquels il se livrait, et qui ne les pouvaient juger qu'avec leur simple bon sens, L..., disons-nous, ?tait un faible d'esprit: mais pour nous, il ?tait, de plus, tourment? par des id?es de pers?cution.

Ces conceptions d?lirantes se sont d?velopp?es peu ? peu, elles se sont impos?es et ont fini par dominer L... compl?tement. Qu'on ne s'?tonne pas de n'y retrouver ni la coh?sion, ni la syst?matisation rigoureuse de la plupart des ali?n?s pers?cut?s; la condition intellectuelle de L... est trop restreinte pour qu'il lui soit possible de s'?lever ? une combinaison compliqu?e; il n'a pas longtemps guett? sa victime, et s'il est impossible d'?carter toute pr?m?ditation, il est au moins permis de faire ressortir toute l'insanit? des motifs d'un meurtre, accompli en plein jour, devant des t?moins, lesquels, tout ?mus encore de ce qui s'est pass? sous leurs yeux, ne peuvent s'emp?cher de remarquer et de trouver ?trange le calme du meurtrier.

Cette attitude, d'ailleurs, sans forfanterie, sans cynisme, ne s'est pas d?mentie un seul jour dans la prison, et les surveillants de Mazas qui n'ont pu nous donner aucun renseignement au sujet des conceptions d?lirantes de L..., n'h?sitent pas pourtant ? le consid?rer <>.

Il vit insouciant, souvent gai, accomplissant avec une satisfaction pu?rile une besogne d'une extr?me simplicit? et qui n'exige que de l'agilit? dans les doigts; il n'est pas malheureux, <> quant ? sa libert?, il n'en est pas trop priv?, nous dit-il: <>

Aux nombreuses visites que nous lui avons faites, que notre observation ait ?t? directe, ou qu'elle ait port? sur lui, sans qu'il s'en dout?t, nous l'avons toujours trouv? le m?me, inconscient et de la valeur morale de l'acte qu'il a commis, et de sa situation pr?sente.

De tout ce qui pr?c?de, nous concluons que:

Ses m?fiances, ses soup?ons, d'abord mal d?termin?s, se sont traduits ensuite par des bizarreries, des tristesses, des emportements, puis encore, par la croyance absolue ? des complots contre sa fortune, contre sa s?curit? personnelle.

Ces conceptions d?lirantes ont pr?sent? tous les caract?res scientifiquement reconnus du d?lire de pers?cution; elles ont abouti enfin ? une exaltation violente, elles ont amen? L... ? un ?tat de trouble mental tel, que toute r?sistance aux impulsions morbides est devenue impossible.

Nous pensons que, dans l'int?r?t de l'ordre public et de la s?curit? des personnes, il est n?cessaire de le placer et de le maintenir dans un ?tablissement sp?cialement consacr? aux ali?n?s.

En foi de quoi nous avons r?dig? le pr?sent rapport pour valoir ce que de droit.

Paris, le 25 d?cembre 1871.

Sign?: A. MOTET, ?. BLANCHE.

Il m'a sembl? utile de reproduire en entier ce rapport, afin que l'on p?t bien suivre toutes les phases par lesquelles L... a pass? avant la crise qui a abouti au meurtre.

D'une intelligence faible, d'un temp?rament nerveux, L... avait conserv? de son s?jour en Californie et des aventures ?mouvantes dans lesquelles il avait ?t?, soit acteur, soit t?moin, une tendance tr?s-prononc?e au soup?on, ? la d?fiance, en m?me temps qu'une grande disposition ? la violence et aux id?es de vengeance.

Pendant qu'il fut absorb? par les affaires, L... ne manifesta ces penchants que par de l'irritabilit? et un ?tat habituel de surveillance sournoise ? l'?gard de son associ?. Apr?s avoir quitt? la maison de commerce, livr? ? une oisivet? compl?te, L... n'ayant plus le contre-poids des soucis du commerce, fut progressivement domin? et enfin envahi par ses pens?es de m?fiance; il en arriva ? la conviction que M... l'avait tromp? et l'avait l?s? dans ses int?r?ts. Il en con?ut d'abord du chagrin, puis un ressentiment de plus en plus vif, et les conceptions d?lirantes, qui n'avaient ?t? jadis que fugitives et l?g?res, s'empar?rent compl?tement de son esprit; il lutta encore cependant, et s'en remit ? sa femme du soin de faire valoir ses r?clamations. N'obtenant pas la satisfaction ? laquelle il croyait avoir des droits, il se d?cide ? venir lui-m?me l'exiger. Arriv? ? Paris, il h?site encore; il ne se rend pas tout de suite chez M...; il fait des visites; il rencontre des gens de connaissance avec lesquels il cause; il s'informe indirectement, et il interpr?te dans le sens de sa pr?occupation les paroles et les faits les plus simples et les plus naturels.

Enfin, la crise ?clate, et, sous l'influence imm?diate d'illusions des sens et de conceptions d?lirantes, L... entre chez M..., et presqu'aussit?t le frappe, sans qu'il n'y ait eu entre eux que l'?change de quelques mois de politesse banale.

Le meurtre accompli, L... redevient calme. ? Mazas, o? nous l'avons visit? souvent, L... est insouciant, presque gai; il ne se trouve pas malheureux; il ne semble avoir aucune conscience ni de la gravit? de l'acte qu'il a commis, ni de sa situation.

Il a toutefois des acc?s d'excitation, et une fois, devant nous, il a eu une v?ritable crise d'agitation furieuse au souvenir des mauvais traitements dont il pr?tend avoir ?t? l'objet, et nous avons d? recommander des mesures exceptionnelles de surveillance.

L... a ?t? d?clar? par le jury irresponsable, et plac? dans une Maison d'ali?n?s.

D?LIRE DE PERS?CUTION AVEC ACC?S IMPULSIFS.

M. A... est un type d'ali?n? pers?cut? ? acc?s impulsifs. Chez lui, pas d'interruption dans les conceptions d?lirantes et dans les hallucinations, et malgr? cette continuit? de trouble mental, il est le plus habituellement calme, doux, aimable, affable m?me, et on pourrait le consid?rer comme ?tant absolument inoffensif. Sans aucun motif ext?rieur appr?ciable, sans qu'on ait eu ? lui imposer un refus, une contrari?t?, sans discussion pr?alable, il change de physionomie, devient mena?ant, et serait capable des plus extr?mes violences. Apr?s une crise de quelques jours, M. A... retombe dans l'inertie, jusqu'? ce qu'il ?prouve une autre commotion c?r?brale qui d?termine les m?mes sympt?mes de surexcitation transitoire.

LYP?MANIE.--D?LIRE DE PERS?CUTION.--ILLUSIONS DES SENS.--ACC?S DE VIOLENCE.--ABUS ALCOOLIQUES.--ALCOOLISME.--HALLUCINATIONS.--MEURTRE.--IRRESPONSABILIT?.

Commis par ordonnance de M. Blanquart des Salines, juge d'instruction pr?s le tribunal de la Seine, en date du 3 d?cembre 1877, ? l'effet d'examiner, au point de vue de l'?tat mental, le nomm? D..., inculp? d'assassinat sur la personne de sa femme, et de dire s'il para?t jouir de ses facult?s, et s'il doit ?tre r?put? responsable de l'acte qui lui est reproch?, nous, soussign?s, docteurs en m?decine de la Facult? de Paris, apr?s avoir pr?t? serment, avoir pris connaissance des pi?ces du dossier, et avoir fait plusieurs longues visites ? l'inculp? dans la prison de Mazas, avons consign? le r?sultat de nos investigations et de notre examen dans le pr?sent rapport:

D..., n? ? R..., mari? ? Euphrasie L..., p?re d'un enfant, p?tissier, demeurant ? Boulogne-sur-Seine, est un homme de taille ?lev?e, d'une constitution vigoureuse, qui n'offre aucun signe de malformation cong?nitale, et qui para?t avoir toujours ?t? d'une bonne sant?, sauf qu'il ?tait sujet ? de violents maux de t?te. Nous n'avons rien trouv? qui f?t ? noter dans ses ant?c?dents h?r?ditaires, si ce n'est qu'il est le fils d'un p?re qui ?tait d?j? assez avanc? en ?ge ? l'?poque o? il est n?, mais aucun de ses parents ne semble avoir ?t? atteint d'affections c?r?brales. L'expression de sa physionomie est s?rieuse, r?fl?chie, et annonce un caract?re triste et concentr?. Il parle avec lenteur et pr?cision; on voit qu'il tient ? dire exactement ce qu'il pense, et qu'il ne veut rien avancer dont il ne soit certain. S'il s'aper?oit qu'on ne l'a pas bien compris, ou qu'il l'a ?t? au del? de sa pens?e, il rectifie avec un soin qui t?moigne de son d?sir de ne dire que ce qu'il consid?re comme ?tant la v?rit?.

Les renseignements recueillis sur son compte jusqu'en 1876 sont favorables, et il avait la r?putation d'un bon travailleur, ?conome, et d'habitudes sobres. Quoi qu'il en soit, il n'a jamais prosp?r? dans ses affaires, et en a ressenti un grand chagrin. Bien que sa femme e?t une conduite irr?prochable et lui donn?t toute l'aide dont elle ?tait capable, il eut toujours une tendance ? lui attribuer son peu de succ?s dans ses entreprises. Irrit? de perdre de l'argent, alors que par son travail il pouvait esp?rer en gagner, domin? par la passion de l'avarice, il a toujours rejet? la responsabilit? de ses contrari?t?s sur sa femme, avec injustice, et avec une violence parfois terrible, comme ? l'?poque o? elle devint grosse de son second enfant; en effet, redoutant le surcro?t de d?penses qui r?sulterait de la naissance de cet enfant, il pr?tendit qu'il n'en ?tait pas le p?re, et lan?a un coup de pied dans le ventre de sa femme, esp?rant sans doute la faire avorter.

Apr?s plusieurs tentatives infructueuses, las de r?aliser des pertes au lieu de b?n?fices, il vendit son fonds, et se mit ? travailler de son m?tier chez les autres, tandis que sa femme faisait de la broderie, lorsqu'au mois de mars 1875, sur le conseil d'un blanchisseur de Boulogne, il se d?cida ? louer une boutique, route de la Reine, et y ouvrit une p?tisserie. L?, les choses n'all?rent pas beaucoup mieux qu'? Paris; malgr? beaucoup d'activit? et de travail, les ?poux D..., s'ils ne perdaient pas d'argent, ne gagnaient pas assez pour faire des ?conomies. Aussi D... ?tait-il toujours d'humeur sombre et chagrine et maltraitait-il de plus en plus sa femme.

Celle-ci ne se plaignit pas et supporta avec r?signation tous les mauvais traitements dont elle ?tait victime. On peut croire qu'elle avait reconnu que son mari avait la raison souvent troubl?e, que, peut-?tre m?me, elle s'?tait aper?ue qu'il buvait, car il r?sulte de la d?position d'un apprenti de D..., que celui-ci faisait acheter de l'absinthe, en prenant toutes sortes de pr?cautions pour qu'on ne le s?t pas, et qu'il en absorbait de grandes quantit?s. Mais, par affection pour son mari, elle ne voulait pas faire de r?v?lations auxquelles on aurait pu ne pas ajouter foi, et qui n'auraient apport? aucun soulagement ? sa d?tresse.

Toutefois, les sc?nes se multipliaient; non seulement D... frappait sa femme, mais il l'accablait des soup?ons les plus injurieux, et la malheureuse, pouss?e plus encore par l'humiliation des reproches de son mari au sujet de sa pr?tendue l?g?ret? de conduite, que par la terreur de ses menaces et de ses violences, fit enfin quelques confidences ? la concierge de la maison et ? une parente qui l'avait ?lev?e, qui l'avait mari?e, qui ?tait comme une m?re pour elle, et que D... avait suppli?e de venir demeurer pr?s d'eux, ? Boulogne, sans doute avec la pens?e qu'elle l'aiderait ? surveiller sa femme; mais malgr? toute leur bonne volont?, la concierge et la parente ne purent lui ?tre d'aucun secours, et ce n'est qu'apr?s l'?v?nement, que l'on a su par elles le long martyre de la femme D...

? ces id?es de folle jalousie, vinrent bient?t s'ajouter des id?es d'empoisonnement: il ?tait un obstacle aux mauvaises passions de sa femme, et naturellement, elle voulait se d?barrasser de lui; il l'en accusa d'abord directement elle-m?me, puis il alla le d?clarer au commissaire de police. Dans le courant de novembre 1877, il dit au docteur que sa femme voulait l'empoisonner, et, quelques jours plus tard, ayant pris des pilules et quelques cuiller?es d'une potion qui lui avaient ?t? prescrites, il s'imagina que le m?decin ?tait d'accord avec sa femme, et que les m?dicaments qu'il lui avait donn?s ?taient du poison; il s'adressa alors ? un autre m?decin, auquel il fit le m?me tableau de ses malheurs et des tentatives d'empoisonnement dont il ?tait l'objet.

D... craignait ?galement que sa femme voul?t le quitter, en emmenant sa fille, et il se rendit ? Montreuil, o? cette enfant ?tait en pension, pour d?fendre qu'on la rem?t ? sa m?re.

Ne trouvant aucun appui, ni aucun soulagement aupr?s de toutes les personnes auxquelles il racontait ses souffrances morales et physiques, D... r?solut d'en faire part ? sa m?re, qui habite R...; le 21 novembre, il partit donc de chez lui, sans dire ? sa femme o? il allait; celle-ci ne le voyant pas rentrer le soir, en fut m?me tr?s-inqui?te, et pria un de ses voisins d'aller ? sa recherche, laissant percer dans son langage ses pr?occupations sur l'?tat d'esprit de son mari, et exprimant la crainte qu'il n'e?t ?t? arr?t?, ou qu'il lui f?t arriv? un accident.

Il ?tait all? ? R... D'abord, ne voulant pas affliger sa m?re, il ne lui dit rien, mais press? de questions sur le but de son voyage inattendu et inexplicable, il finit par lui faire la confidence de ses malheurs.

Nous allons maintenant reproduire textuellement le r?cit qu'il nous a fait ? notre premi?re visite:

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Pendant ce r?cit D... ne s'est pas anim? un instant; il l'a d?bit? avec l'accent de la sinc?rit?, sans aucune passion, ne paraissant pr?occup? que du d?sir d'?tre exact, et de prouver que ses convictions ?taient fond?es sur des faits positifs, s'attachant aux plus petits d?tails, avec cette pr?cision de m?moire que l'on rencontre chez les ali?n?s dont l'esprit est domin? par un nombre restreint de conceptions d?lirantes, cherchant ? expliquer ce qu'il avait fait, mais non ? s'en disculper, finissant seulement par dire qu'il regrettait d'avoir c?d? ? un mouvement de fureur, mais ne t?moignant pas du moindre doute ni de la moindre h?sitation sur la v?rit? absolue de tout ce qu'il avait dit.

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