Read Ebook: L'âne mort by Janin Jules Gabriel Johannot Tony Illustrator
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Ebook has 477 lines and 58261 words, and 10 pages
Illustrator: Tony Johannot
L'ANE MORT
PAR JULES JANIN.
?DITION ILLUSTR?E
PAR TONY JOHANNOT.
Paris,
ERNEST BOURDIN, ?DITEUR
PR?FACE.
La pr?sente histoire n'est pas ?crite par un de ces auteurs qui refusent ? la Critique le droit d'interroger un ?crivain sur son oeuvre, et de lui demander, avant que de lire son livre:--? quoi bon tel sujet? pourquoi ce h?ros? d'o? vient-il? et enfin, o? donc me conduisez-vous?
Au contraire, l'auteur reconna?t ? la Critique son droit imprescriptible de compl?te interrogation, et il le reconna?t dans son entier; seulement il se permet de trouver que, dans bien des cas, la question: o? allez-vous? qui ?tes-vous? que demandez-vous? est des plus embarrassantes.--? de pareilles questions, l'auteur ne saurait que r?pondre, en v?rit?.
Je sais, il est vrai, aussi bien que personne, qu'? son premier voyage dans le domaine des inventions, il serait facile ? un ?crivain peu timor? d'aborder ces gentilshommes le chapeau ? la main; puis, avec l'humilit? d'une pr?face du dix-septi?me si?cle ou d'un couplet final de vaudeville moderne, on pourrait leur promettre effront?ment de les conduire ? S?ville ou ? Londres, au Kremlin ou ? Saint-Pierre de Rome, par les plus beaux sentiers, les mieux connus et les plus fray?s, et alors, les honn?tes gens qu'ils sont, ils vous suivraient, et sans nul doute, tout d'abord, les yeux ferm?s.
Mais ce n'est pas tout que d'entreprendre un voyage, il faut l'achever. Que le plus malheureux coucou de Saint-Denis me charge pour la vall?e de Montmorency ou pour les eaux d'Enghien, et qu'il me d?pose au milieu de la route poudreuse de Pontoise, j'imagine que je serai fort m?content. De m?me si, apr?s vos belles promesses, au lieu de jeter votre lecteur dans quelque ville morte de l'Orient, au milieu de ces palais et de ces sphinx contemporains de S?sostris, vous lui faites passer la nuit dans quelque mis?rable auberge mal servie par une vach?re en haillons, ? la lueur d'une lampe enfum?e, vous verrez si vous le trouverez dispos? ? vous suivre une seconde fois.
Ainsi fais-je aujourd'hui; cependant c'est ? peine si je sais moi-m?me ce que c'est que mon livre;
Si, par exemple, je n'ai fait l? qu'un roman frivole,
Ou une longue dissertation litt?raire;
Ou bien encore un sanguinaire plaidoyer en faveur de la peine de mort;
Ou m?me une histoire personnelle;
Ou, si vous aimez mieux, quelque long r?ve commenc? dans une nuit d'?t? lourde et chaude, achev? au milieu de l'orage.
Quoi qu'il en soit, mon livre est fait; le voici: maintenant, ? la gr?ce de Dieu et du lecteur!
? peine sorti de ma retraite, mon oeuvre ? la main, j'ai rencontr? tout ? coup la Critique, cette capricieuse d?esse dont on parle en sens si divers; je l'ai reconnue ? son air ennuy?; d?s le premier abord, elle a ?t? impitoyable ? mon ?gard; c'?tait pourtant la premi?re fois qu'elle me voyait.
Elle a commenc? par me demander si j'?tais un po?te; et lorsque dans toute l'humilit? de mon ?me je lui eus r?pondu que non-seulement je ne l'?tais pas, mais que je ne l'avais jamais ?t?, elle est devenue plus affable; seulement elle m'a conseill? de prendre un air plus grave et moins content de moi-m?me, et surtout de me couvrir d'un manteau plus prosa?que pour le voyage p?rilleux que je voulais accomplir.
Elle a repris son air affable quand je lui ai jur? sur mon ?me et conscience que, malgr? ce titre bizarre, il ne s'agissait rien moins que d'une parodie; que le m?tier de loustic litt?raire ne convenait nullement ? mon caract?re et ? ma position; que j'avais fait un livre sans vouloir nuire ? personne; que si mon livre ?tait par malheur une parodie, c'?tait une parodie s?rieuse, une parodie malgr? moi, comme en font aujourd'hui tant de grands auteurs qui ne s'en doutent pas plus que moi-m?me je ne m'en suis dout?.
Mais tout ? coup son visage redevint sombre et soucieux quand, forc? de lui r?pondre de nouveau, je lui expliquai que j'avais ?crit de sang-froid l'histoire d'un homme triste et atrabilaire, pendant que dans le fait je n'?tais qu'un gai et jovial gar?on de la plus belle sant? et de la meilleure humeur; que je m'?tais plong? dans le sang sans avoir aucun droit ? ce triste plaisir, moi qui, de toutes les soci?t?s savantes de l'Europe, ne suis encore que membre tr?s-innocent de la soci?t? d'Agronomie pratique qui m'a fait l'honneur, il y a deux mois, de m'admettre dans son sein, le jour m?me o? M. Etienne fut re?u.
Cet air f?ch? de la Critique me fit grand mal; je vis rena?tre le sourire sur ses l?vres quand, pour m'excuser de l'affreux cauchemar que je m'?tais donn? ? moi-m?me, je lui racontai que pour n'?tre pas la dupe de ces ?motions fatigantes d'une douleur factice, dont on abuse ? la journ?e, j'avais voulu m'en rassasier une fois pour toutes, et d?montrer invinciblement aux ?mes compatissantes, que rien n'est d'une fabrication facile comme la grosse terreur. Dans ce genre, Anne Radcliffe, si m?pris?e aujourd'hui, est un v?ritable chef de secte. Bien longtemps avant le cabinet d'anatomie de Dupont, elle avait devin? les pustules sanguinolentes et les ?corch?s en cire; nous n'avons fait que creuser plus avant ? mesure que nous avons mieux appris l'anatomie. J'ai voulu profiter comme les autres des progr?s de la science; au lieu de tailler ma plume avec un canif, je l'ai taill?e avec un scalpel, voil? tout.
Puis la Critique me prit en grande piti? quand je lui expliquai par quels efforts incroyables j'?tais arriv? ? l'horrible, quelle peine je m'?tais donn?e pour m?ler quelque chose de moi ? mon atroce fable. Sa piti? alla jusqu'aux larmes quand elle sut que le coeur et l'?me de mon h?ro?ne n'?taient peut-?tre qu'une triste r?alit?, et que mon livre ?tait non-seulement une ?tude po?tique que j'avais voulu faire, mais encore les m?moires exacts de ma jeunesse: elle n'eut presque plus la force de me gronder.
Toutefois elle s'emporta violemment lorsqu'au milieu de tous ces r?cits et au plus fort de tout ce fracas de style qui lui plut d'abord et qui finit par la fatiguer, la Critique ne trouva pas une id?e morale, pas un mot qui all?t au-del? du fait mat?riel; rien, au milieu de tant de descriptions compl?tes, que des formes et des couleurs; tout ce qui fait le monde physique, rien de l'autre monde, rien de l'?me; elle fut pr?te un instant ? s'?loigner de mon livre avec d?dain.
Comme c'?tait l? le reproche qui m'?tait le plus sensible et le d?faut dont je rougissais le plus, int?rieurement, je tombai aux pieds de mon juge, et, tout tremblant, je lui expliquai comment ce vice dans mon livre n'?tait pas le vice de mon coeur; comment il appartenait enti?rement au genre que j'avais voulu exploiter; comment mon but aurait ?t? tout ? fait d?pass? si j'avais parl? d'autre chose que des choses qui tiennent aux sens; et ? ce propos j'invoquai la po?sie descriptive, telle qu'on l'a faite depuis M. Delille jusqu'? nos jours, et je parvins ? faire comprendre ? mon juge qu'il fallait accuser de cette s?cheresse le genre d'?motions auxquelles je m'?tais livr? dans un moment de d?sespoir, pour n'y plus revenir, n'en doutez pas.
Ici la conversation devint amicale et plus intime entre moi et mon juge. Je n'?tais ni un chef de secte ni un s??de litt?raire; j'?tais un de ces simples ?crivains qui vont o? ils peuvent, qui ne font pas ?cole, qui n'engendrent pas de schismes, dont on s'occupe quand on a le temps, et qui ont autre chose ? faire eux-m?mes que de pousser ? une renomm?e ? laquelle d'ailleurs ils ont la bonne foi de ne pr?tendre pas.
Et pour preuve, je lui racontai l'histoire d'une t?te coup?e dans le S?rail, et le Grand-Seigneur montrant ? un peintre fran?ais comment les veines d'un homme d?capit? se resserrent au lieu de se dilater. Avant ce terrible mahom?tan tous les peintres qui avaient repr?sent? la d?collation de saint Jean-Baptiste, Poussin lui-m?me, en avaient donc menti par la gorge de leur martyr!
D'abord je choisirais, sur le haut de quelque montagne ou sur le bord de quelque rivi?re, un vaste emplacement; et quand mon emplacement serait trouv?, je creuserais un large foss?, que le temps remplirait d'une boue noire et verte; sous ce foss? je placerais une prison f?odale aux murs suintants, et pour tout meuble, quelque gril de quatre pieds pour y br?ler ? petit feu le juif vagabond; au-dessus de ma prison, de larges salles pour mes archers et mes hommes d'armes; et sur les murs, en guise de tableaux, des armets, des cuirasses, des cuissards, des gantelets, des arquebuses aux m?ches flamboyantes, des arcs d?tendus aux cordes sonores, du fer partout, des fen?tres ouvertes ? tous les vents.
Apr?s la salle des feudataires viendrait une salle de c?r?monie tout envelopp?e d'une vaste tapisserie soulev?e, par la bise du soir et anim?e par de gigantesques figures de l'Histoire sainte, lente et formidable cr?ation de l'aiguille de nos grand'm?res. Je vois d?j? les vastes fauteuils, l'?tre immense, les torches attach?es ? des bras de fer aux murs de cette demeure f?odale; puis, ? c?t? de cette salle si favorable aux fant?mes, une autre salle pav?e de grosses dalles, pour servir aux banquets; la table est charg?e de viandes et de vins; les paladins s'y pressent en masse, chacun v?tu de son ?charpe et portant les couleurs de sa dame; on mange, on boit, on s'enivre, on se bat, on blasph?me. Cependant les tours s'?l?vent, lourdes, meurtri?res, perc?es de trous, jusqu'? ce qu'enfin le ch?teau ?tant achev?, l'architecte s'aper?oive qu'il a perdu son temps ? ?lever une masse inutile, et qu'il e?t bien mieux fait, puisqu'il en voulait au moyen-?ge, de se construire ? meilleur march? un moyen-?ge de carton ou de terre cuite.
? tout prendre, ce paladin de la Manche qui s'en va dans la campagne, cherchant des torts ? redresser, des g?ants ? pourfendre, et tout pr?t ? se faire tuer pour la veuve, pour l'orphelin, pour la dame de ses pens?es, est une figure respectable dont on est f?ch? de s'?tre moqu?, lorsqu'on vient ? r?fl?chir quel noble coeur recouvrait cette armure de carton, quel brave homme portait ce cheval efflanqu?, quel bon ma?tre servait cet ?cuyer grotesque; on est irrit? contre soi-m?me du plaisir qu'on a pris ? cette admirable histoire, parce qu'il y a l?, en effet, beaucoup plus de l'homme moral que d'autre chose, et qu'un seul discours du h?ros compense ? merveille les moulins ? vent et l'armet de Membrin.
Voil? ce que je dis ? la Critique pour ma d?fense et pour me faire pardonner tout ce qu'elle aurait pu appeler dans mon livre: imitation, incertitude, plagiat. Elle m'?couta tant bien que mal, et quand j'eus tout dit, elle ajouta que j'?tais terriblement obscur.
--C'est le beau d'une pr?face, lui r?pondis-je effront?ment.
Elle me dit encore que c'?tait une insolence ? faire ? mes lecteurs.
Je sautai de joie, comme si j'avais re?u le plus flatteur des ?loges.
Alors elle s'approcha de moi; elle me serra dans ses deux bras longs et secs comme les bras des fant?mes de Louis Boulanger; puis elle me donna le baiser de paix, en appliquant sur mon visage un visage d'un ?ge, d'un embonpoint et d'une fra?cheur tr?s-?quivoques.
Cependant je la remerciais de ses caresses, quand, portant la main ? ma joue, je trouvai que ma joue ?tait sanglante: la cruelle m'avait donn? le baiser de Judas.
Mais, Dieu merci! je fus bien vite consol? en songeant que dans ma mani?re d'?tre isol?, et d'?crire au hasard, et peut-?tre aussi avec les haines dont on commence d?j? ? m'honorer, la Critique ne pouvait gu?re m'embrasser autrement.
LA BARRI?RE DU COMBAT.
D'ailleurs, qu'est-ce que la coupe m?me de Rodogune et le poison aristot?lien qui la remplit jusqu'aux bords, compar?s ? des flots de sang noir qui se tracent un sillon obstin? dans la poussi?re, pendant qu'autour du cirque romain, les chr?tiens, br?l?s vifs dans leur enveloppe de poix et de soufre, servent de flambeaux ? ces combats nocturnes; pendant que le robuste athl?te, terrass? et cherchant de son dernier regard le doux ciel de l'Argolide, ne rencontre que le regard avide de la jeune vierge romaine dont la main blanche et fr?le le condamne ? mourir? Alors le h?ros de cette ?trange f?te arrange sa mort; il s'?tudie ? rendre harmonieux son dernier soupir, ? m?riter encore une fois les applaudissements de cette foule satisfaite!
H?las! nous n'avons pas encore le cirque o? les hommes se d?vorent entre eux, comme dans le cirque des Romains, mais nous avons d?j? la Barri?re du Combat:
Une enceinte pauvre et d?labr?e, de grosses portes grossi?res et une vaste cour garnie de molosses jeunes et vieux, les yeux rouges, la bouche ?cumante, de cette ?cume blanch?tre qui descend lentement ? travers les l?vres livides. Surtout, parmi les h?tes dramatiques de cette basse-cour, il y en avait un qui faisait silence dans son coin. C'?tait une horrible b?te fauve,--un g?ant h?riss?! mais l'?ge et la bataille lui avaient d?garni les m?choires; vous eussiez dit le fr?re a?n? de quelque sultan retranch? du nombre des hommes, ou bien un ancien roi des Francs ? la t?te ras?e. Ce dogue ?m?rite ?tait affreux ? voir, aussi affreux que Bajazet dans sa cage, avec quelque chose du cardinal de la Balue dans la sienne; fier et bas, impuissant et hargneux, col?re et rampant, aussi pr?t ? vous l?cher qu'? vous mordre: le digne com?dien d'un pareil th??tre. Dans un coin de ces coulisses infectes, de vieux morceaux de cheval, des cr?nes ? demi rong?s, des cuisses saignantes, des entrailles d?chir?es, des morceaux de foie r?serv?s aux chiennes en g?sine. Ces affreux d?bris arrivaient en droite ligne de Montfaucon: c'est ? Montfaucon que se rendent, pour y mourir, tous les coursiers de Paris. Ils arrivent attach?s ? la queue l'un de l'autre, tristes, maigres, vieux, faibles, ?puis?s de travail et de coups. Quand ils ont d?pass? la porte et la cabane de la vieille ch?telaine, qui, l'oeil fix? sur les victimes, les voit d?filer avec ce sourire rid? de vieille femme qui ?pouvanterait un mort, ils se placent au milieu de la cour, vis-?-vis d'une mare violette dans laquelle nage un sang coagul?; alors le massacre commence: un homme arm? d'un couteau, les bras nus, les frappe l'un apr?s l'autre: ils tombent en silence, ils meurent; et, quand tout est fini, tout se vend de ces cadavres, le cuir, le crin, le sabot, les vers pour les faisans du roi, et la chair pour les com?diens d?vorants de la Barri?re du Combat.
Je pris donc place dans cette enceinte muette, sans que m?me un honn?te boucher se trouv?t derri?re moi, escort? de quelque bonne exclamation admirative. J'?tais dans une atmosph?re d'?go?sme difficile ? d?crire. Cependant une porte s'ouvrit lentement, et je vis entrer.....
Un pauvre ?ne!
Il avait ?t? fier et robuste; il ?tait triste, infirme, et ne se tenait plus que sur trois pieds; le pied gauche de devant avait ?t? cass? par un tilbury de louage; c'?tait tout au plus si l'animal avait pu se tra?ner jusqu'? cette ar?ne.
Je vous assure que c'?tait un lamentable spectacle. Le malheureux ?ne commen?a d'abord par chercher l'?quilibre; il fit un pas, puis un autre pas, puis il avan?a autant que possible sa jambe droite de devant, puis il baissa la t?te, pr?t ? tout. Au m?me instant quatre dogues affreux s'?lancent; ils s'approchent, ils reculent et enfin ils h?sitent; ils s'enhardissent, ils se jettent sur le pauvre animal. La r?sistance ?tait impossible, l'?ne ne pouvait que mourir. Ils d?chirent son corps en lambeaux; ils le percent de leurs dents aigu?s; l'honorable athl?te reste calme et tranquille: pas une ruade, car il serait tomb?, et, comme Marc-Aur?le, il voulait mourir debout. Bient?t le sang coule, le patient verse des larmes, ses poumons s'entre-choquent avec un bruit sourd; et j'?tais seul! Enfin l'?ne tombe sous leurs dents; alors, mis?rable! je jetai un cri per?ant: dans ce h?ros vaincu je venais de reconna?tre un ami!
En effet, et ? n'en pas douter... c'?tait lui!
C'?tait Charlot! voil? sa t?te allong?e, son calme regard, sa robe grisonnante!... C'est bien lui! Le pauvre diable! il avait jou? un r?le trop important dans ma vie pour que le moindre accident de sa personne ne f?t pas pr?sent ? mon souvenir. Digne Charlot, c'est donc moi qui devais ?tre la cause, le pr?texte et le t?moin impassible de ta mort! Le voil? gisant sur la terre sanglante, mon pauvre ami, que nagu?re j'avais flatt? d'une main caressante! Et sa ma?tresse, sa jeune ma?tresse, o? est-elle ? pr?sent? o? est-elle? Ainsi agit?, je me pr?cipitai dans l'ar?ne pour fuir plus vite. En passant devant Charlot, je vis qu'il se d?battait sous le poids de l'horrible agonie; m?me dans un de ces derniers bonds d'une mort qui s'approche, je re?us de sa jambe cass?e un faible coup, un coup inoffensif qui ressemblait ? un reproche doux et tendre, au dernier et triste adieu d'un ami que vous avez offens? et qui vous pardonne.
Je sortis, en ?touffant, de ce lieu fatal.
--Charlot, Charlot! m'?criai-je, est-ce donc toi, Charlot? Toi, mort! mort pour mon passe-temps d'un quart d'heure! toi, jadis si fringant et si leste! Et sans le vouloir je me rappelai tant de bonheur d?cevant, tant d'agacerie innocente, tant de gr?ce d?cente et jeune, qui un jour m'?taient arriv?s au petit trot sur le dos de ce pauvre ?ne! C'est l? une attendrissante et m?lancolique histoire! Deux h?ros bien diff?rents, sans doute, mais pourtant deux h?ros ins?parables dans mon souvenir et dans mes larmes. L'un s'appelait Charlot, comme vous savez; l'autre se nommait Henriette. Je vais dire leur histoire; je la dirai pour moi d'abord, pour vous ensuite, si vous voulez.
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