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Editor: Isidore Liseux
LE PETIT-NEVEU DE GR?COURT
OU ?trennes Gaillardes
Recueil de Contes en vers, r?imprim? sur l'?dition de 1782.
PARIS Isidore LISEUX, ?diteur Quai Malaquais, n? 5
AVIS DE L'?DITEUR
La chose, en somme, est de minime importance. Quel que soit l'Amateur qui a recueilli ces bluettes, acceptons-les pour elles-m?mes et ne leur demandons pas plus qu'elles ne peuvent tenir. Elles ont ?t? glan?es un peu partout: cependant, la majeure partie n'en est gu?re connue; elles sont lestes, court-v?tues, provocantes, et si elles donnent au Lecteur une heure ou deux d'amusement, nous aurions grand tort de regretter les quelques feuilles de joli papier que nous avons sacrifi?es pour cette modeste ?dition.
Paris, le 20 Juillet 1883.
A MA COMM?RE
Votre Comp?re,
Petit-Neveu de Gr?court
?trennes Gaillardes
LA FEMME SANS CHOSE
Le trait suivant, Lecteur, est d'assez bon aloi: Je le tiens de Monsieur G?ronte, Lequel me l'a donn? pour une histoire, et moi Je vous le donne pour un Conte: Car il faut, tant qu'on peut, ?tre de bonne foi. C'est tout pr?s de Paris que se passe la sc?ne.
Un Grenadier Jeune, bien fait, bon compagnon, ?tant en semestre ? Sur?ne, De Th?r?se un beau jour lorgna le pied mignon. <> dit-il, <>Qui pourroit l'attirer ? soi >>Auroit un vrai morceau de Roi, >>Ou tout au moins de Capitaine.>> Il aborde ? l'instant Th?r?se sans fa?on, D'un air joyeux lui conte sa fleurette Et lui porte la main au-dessous du menton. Son geste, son habit, son ton Plurent beaucoup ? la fillette: Bref, quelques jours apr?s la retrouvant seulette, Dans le fond d'une grange ? sa d?votion, Il ne put r?sister ? la tentation, Et l'affaire fut bient?t faite. N'en parlons plus; ajoutons seulement Que depuis cet heureux moment, Th?r?se et son ami, tous les jours en cachette, Alloient au m?me lieu se rendre exactement. Th?r?se y vint un soir, elle ?toit inqui?te Et paraissoit r?ver profond?ment. En regardant La Rose, elle reste muette. <> lui dit-il, <>Et qui peut te causer une peine secr?te? >>Ne cache rien ? ton Amant, >>Parle.>> Th?r?se enfin parla na?vement: --<>Mais la serai-je encor longtemps? >>Vienne Saint-Nicolas, j'aurai mes vingt-deux ans, >>Et je ne veux pas mourir fille. >>Je sais que le Meunier du village voisin >>A mon p?re en secret a demand? ma main; >>Et mon p?re a dit oui: suffit que j'y consente, >>J'?pouserai Colas pas plus tard que demain >>Conseille-moi!--Colas, parbleu! c'est mon cousin,>> Reprit le Grenadier, <>Ce gar?on l? n'est pas malin, >>Mais il a malgr? ?a quelque chose qui tente; >>C'est deux cents bons ?cus de rente: >>Si je les avois, je... Mais puisque je n'ai rien, >>?pouse-le, tu feras bien. >>J'exige seulement...--Quoi?--Tu sais bien, ma ch?re, >>Que je dois te quitter dans vingt jours au plus tard; >>Avant le temps fix? pour mon d?part >>La noce, dis-tu, peut se faire. >>En ce cas je pr?tends ? ton ben?t d'?poux >>De ses droits conjugaux interdire l'usage: >>Si donc il t'invitait ? des ?bats trop doux, >>D?s la premi?re nuit brusque le personnage, >>Dusses-tu le mettre en courroux. >>Quand je serai parti, je lui donne carri?re; >>Mais jusque-l?, Madame la Meuni?re, >>De Monsieur le Meunier je serois trop jaloux. >>--Comment? tu veux que, sans d?fense, >>D?s la premi?re nuit, seulette entre deux draps, >>Avec un homme...? Allons, tu te moques, je pense. >>Qui pourroit se tirer d'un pareil embarras? >>J'aurois beau faire la mutine, >>Beau me f?cher, beau le gronder, >>Colas croiroit que je badine; >>Il seroit le plus fort, il faudroit bien c?der. >>--D'accord, mais si je peux par un bon stratag?me >>Lui fermer ce qu'il croit ouvert?... >>--Pour te prouver combien je t'aime, >>Je consens volontiers ? le prendre sans vert. >>--Eh bien! avertis-moi la veille de la noce, >>Et nous agirons de concert, >>Afin que, comme un sot, il donne dans la bosse.>> A point nomm? La Rose est averti: Imaginez un peu ce qu'il fit ? Th?r?se. . Il colle artistement sur un certain endroit, Que point ne veux nommer, que pourtant on devine, Une peau de mouton douce, fra?che et tr?s fine. Le pli le plus l?ger, il l'efface du doigt, Et partout, ainsi qu'on le croit. Appliquant une main experte et libertine, Il fait si bien qu'on n'aper?oit Ni le creux du vallon, ni le duvet qui cro?t Sur le penchant de la colline. Ceci peut sembler fort, mais un amant adroit Ex?cute ais?ment tout ce qu'il imagine, Mieux encor qu'on ne le con?oit. Et puis, ami Lecteur, un peu de complaisance; Pr?tez-vous ? l'illusion, Et vous croirez qu'apr?s cette op?ration Th?r?se n'en eut plus... du moins en apparence. Au fait. Le lendemain elle ?pouse Colas: En sortant de l'?glise on vint faire bombance, On but du petit vin, on servit de grands plats; Mais parlons du souper, lequel suivit la danse: Le souper d'une noce est le meilleur repas. Le mari?, droit comme un ?chalas, D'aller se mettre au lit br?loit d'impatience. La Rose, riant aux ?clats, Par des couplets gaillards ?gayoit l'assistance, S'approchoit de Colas, et lui disoit tout bas: <>Gageons que cette nuit tu ne dormiras pas: >>La mari?e est des plus belles; >>Demain, les yeux battus et les membres bien las, >>Tu nous en diras des nouvelles.>> Tout en parlant de bagatelles, On entendit sonner minuit: Lors au lit nuptial chaque ?poux fut conduit, Et l'on ?teignit les chandelles: On sait d?j? tout ce qui se passa. Colas, dont on se peint ais?ment la surprise, Pour f?ter sa comm?re en vain se tr?moussa, Tentant dix fois l'assaut, et dix fois l?chant prise. D'un jeu si d?plaisant enfin il se lassa, Et fut toute la nuit dans une horrible crise. Au point du jour, mon Jocrisse ? grands pas Va chez le Grenadier en poussant des h?las! --<>Ma femme, elle n'a pas de...--Quoi? >>--De... la... de...--Quoi donc?--Aidez-moi! >>Eh bien! elle n'a pas... elle n'a pas de chose! >>--Ah! parbleu, n'est-ce que cela? >>On peut rem?dier ? cet accident-l?; >>Et je ne sais pourquoi tu t'inqui?tes: >>Beaucoup de femmes n'en ont pas; >>Mais je leur en fais, moi.--Comment, vous leur en faites! >>--J'en fis un l'an dernier ? celle de Lucas; >>Tu pourrois m?me aller la trouver de ce pas, >>Et par des questions secr?tes... >>En observant surtout de lui parler bien bas, >>Peut-?tre avoueroit-elle...--Ah! que je serois aise >>Si vous pouviez ce soir en faire un ? Th?r?se! >>--Ce soir, le terme est un peu court; >>Mais apporte au logis avant la fin du jour >>Douze livres de crin, douze francs pour ma peine; >>Pars demain, va passer huit jours chez ta marraine, >>Imagine quelque d?tour >>Afin de lui cacher le sujet qui t'am?ne: >>Dis-lui que par malheur tu deviens un peu sourd, >>Et qu'on t'a conseill? de voyager en plaine. >>Sur le chose de ta Chr?tienne >>Sois plus muet que la bouche d'un four, >>Entends-tu bien, Colas?--Oh! qu'? cela ne tienne! >>--C'est aujourd'hui lundi, je fixe ton retour >>Au Mardi de l'autre semaine: >>Ce jour-l? tu pourras sans g?ne >>Faire un petit Colas.--Ah! Th?r?se, ah! mamour, >>Mardi j'en aurai donc l'?trenne! >>--Adieu, cousin.--Bonsoir.>> Une heure apr?s Le crin est envoy?, les douze francs sont pr?ts; Et comme une franche p?core, Colas le lendemain partit avant l'aurore. Vous jugez bien que notre amant Sut mettre ? profit son absence. A Th?r?se il fit un enfant, Puis il vendit le crin pour en avoir l'argent, Et riant du cousin docile ? la d?fense, Il regagna son R?giment. Colas, au bout de la huitaine, Croyant avec raison l'ouverture certaine, Revient trouver sa femme en faisant les yeux doux, --<> lui dit-il, <> Th?r?se au lit suit son ?poux; L?, sans compliment il l'enga?ne. Le jeu fini, Colas visita son domaine; Et lorsqu'en tous les coins il eut pass? la main: --<> s'?cria-t-il, <>Par ma foi, je vous garde une bonne semonce: >>Vous m'avez demand? douze livres de crin, >>Et je n'en trouve pas une once!>>
LA CROYANCE FOND?E
Un jour que Madame dormoit, Monsieur f?toit sa Chambri?re; Celle-ci qui la danse aimoit, Remuoit fort bien la charni?re: Or la Coquine, toute fi?re, Lui dit: <>Qui le fait mieux, Madame ou moi? >>--C'est toi, Barbe, sans contredit. >>--Saint Jean!>> dit-elle, <>Car tout le monde me le dit.>>
LA D?CLARATION MILITAIRE
Puisque vous m'avez dit souvent Que vous n'aimez pas la morale. On m'a fait un conte plaisant. Il faut que je vous en r?gale:
LA R?PONSE SENS?E
CONTE
LA PLAINTE INJUSTE
A la campagne, un jour qu'il faisoit beau, Gilet fut voir Madame du Martelle. Bien fut re?u dans l'antique Ch?teau: Pour le traiter, on mit tout par ?cuelle; Mais il se plaint que la ronde femelle L'ait fait coucher aupr?s d'un grand Valet. Or de la Dame ? tort se plaint Gilet: Mieux n'e?t choisi, si c'e?t ?t? pour elle.
BADINAGE IN-PROMPTU
Passants, respectez celle Que vous voyez c?ans: C'est la seule pucelle Qui soit dans Orl?ans.
LA BELLE ACCOMMODANTE
L?on, pouss? d'humeur fol?tre, Regardoit ? son aise un jour Les jambes plus blanches qu'alb?tre De Lise, objet de son amour. Tant?t il s'attache ? la gauche, Tant?t la droite le d?bauche; <> dit-il, <>Une ?gale beaut? fait un combat entre elles. >>--Ah!>> dit Lise, <>Mettez-vous entre deux, pour finir leurs querelles!>>
IN-PROMPTU
Vous me priez toujours de vous faire des vers, Je vous l'ai dit vingt fois, Madame, en bonne prose: Je les ferois tout de travers; J'aime mieux vous faire autre chose.
COUPLET
Pendant six mois, notre voisin Crut sa femme hydropique; Mais en criant un beau matin: <> Elle accoucha d'un gros gar?on, La faridondaine, la faridondon, Qui ressemble au pauvre mari, Biribi, A la fa?on de Barbari, Mon ami.
En ce jour que je dois f?ter, Je vous pr?sente ma personne; C'est le bouquet que je vous donne, Mais voudrez-vous bien le porter?
LA RAGE D'AMOUR
CONTE
A Cupidon la jeune et belle Amynthe Malgr? l'hymen sacrifioit toujours; Son pauvre ?poux toujours ?toit en crainte Qu'elle ne f?t de nouvelles amours. Il ne pouvoit en siller la paupi?re; Veilles, soucis l'eurent t?t emport?. Lui mort, Amynthe, en pleine libert?, A son humeur donna belle carri?re; On en jasa; son Cur? crut devoir L'en avertir: <>Changez de vie, ou c'est fait de votre ?me! >>--H?las! Monsieur, je voudrois le pouvoir,>> Lui r?pondit la trop fringante veuve; <>Que je ne puis avoir l'esprit content, >>Si chaque mois je n'ai pratique neuve. >>Cela me vient d'un accident fatal: >>A quatorze ans d'un chien je fus mordue, >>Chien enrag?. Pour pr?venir le mal, >>L'avis commun fut qu'il me falloit nue >>Plonger en mer. Nue on me d?pouilla. >>Honteuse alors de me voir sans chemise, >>Incontinent je portai la main l?... >>O? vous savez, sans jamais l?cher prise. >>On me plongea; mais qu'est-il arriv?? <>Partout ailleurs du mal fut pr?serv?, >>Hors cet endroit o? la rage me reste.>>
LE PR?TENDU MALIN
Jean recherchoit pour l'hym?n?e P?quette l'?merillonn?e; Chacun disoit ? Jean: <
>Son honneur est un grand peut-?tre. >>--Oh!>> dit Jean, <>Je saurai bien le reconno?tre.>>
LA GAGEURE
Deux Penaillons, voulant prendre un ?bat Pour ?gayer l'ennui du Monast?re, Gageoient un jour deux flacons de muscat A qui plut?t auroit dit son Br?viaire: Ce n'est du tout agir Chr?tiennement. Avant d'entrer en si plaisante lice, Nos deux Frocards se pr?t?rent serment De ne sauter un mot du saint Office. Le serment fait, les voil? donc en train De marmoter; quand l'un, gagnant la fin. Dit: <>--Ah! malheureux, tu m'as fourb? vraiment, >>Car je ne suis qu'au milieu,>> r?pond l'autre, <LE PAIEMENT D'AVANCE
IN-PROMPTU
LA CALOMNIE FOUDROY?E
<>Monsieur l'Abb?, je ne serois pas dupe; >>Avouez, croyez-moi, que vous aimez la jupe. >>Et sur ce point n'ayons plus d'altercat. >>--Mais, Madame, jetez les yeux sur mon rabat... >>--Toutes vos raisons sont frivoles... >>--Vous ?tes incr?dule et voulez un ?clat? >>Eh bien! retenez ces paroles: >>Du cotillon je fais si peu d'?tat, >>Que je donnerois cent pistoles >>Pour que personne n'en port?t!>>
LA FENTE
CONTE
Orante avoit fait emplette D'un quarteau de vieux Rota; Sa chambri?re P?quette, Un beau matin le go?ta Et le trouva bon sans doute. Elle y revint: Jean l'aida. Verre ? verre, goutte ? goutte La feuillette se vida. Au bout d'une quarantaine Il advint que le Patron, Qui croit la feuillette pleine, Va pour en prendre l'?trenne. L'eut-il? Vous savez que non. Abus? dans son attente, D'abord il est stup?fait, Puis songeant que le vin tente Et se doutant du m?fait, Il appelle sa servante Et lui dit ce qu'elle sait. Pourtant elle s'?merveille: Jamais, jamais on n'a vu Une aventure pareille! --<> R?pondit-elle ? son ma?tre, <>Quelque fente aura peut-?tre >>Caus? cet accident-l?; >>Nous pourrons le reconno?tre.>> Elle va prendre un flambeau. L'allume, vient, fait sa ronde: Rien ne manquoit au tonneau. --<>Voyons par-dessous>>, dit-elle. Au m?me instant la donzelle, En se baissant, met au jour Ce qui pla?t dans une belle, Morceau digne de l'amour. Et pour parler sans d?tour, Le parois de sa Chapelle Que couvroit un jupon court. --<>, lui dit Orante, En lorgnant le d?fil?, <>Par o? mon vin a coul?.>>
LE REPENTIR SINC?RE
Avec la brune et la blonde Un Prieur B?n?dictin Prit tant d'?bats, qu'un matin Il gagna le mal immonde. Voyant son chose maigri, L'horreur du crime le frappe; <> dit-il, <>Avant que je sois gu?ri!>>
L'ARMURE DE V?NUS