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Read Ebook: Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle - Tome 7 - (P) by Viollet Le Duc Eug Ne Emmanuel

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Ebook has 363 lines and 166832 words, and 8 pages

Droits de traduction et de reproduction r?serv?s.

PARIS.--IMPRIMERIE DE E. MARTINET, RUE MIGNON, 2.

PAR

M. VIOLLET-LE-DUC ARCHITECTE DU GOUVERNEMENT INSPECTEUR-G?N?RAL DES ?DIFICES DIOC?SAINS

TOME SEPTI?ME

PARIS

A. MOREL, ?DITEUR RUE BONAPARTE, 13.

Ce ne fut qu'apr?s les invasions des Normands que ces r?sidences se convertirent en forteresses, et constitu?rent les premiers ch?teaux f?odaux.

La plupart de ces palais n'avaient pas ?t? b?tis d'un seul jet, mais s'?taient accrus peu ? peu, en raison de la richesse ou de l'importance des seigneurs auxquels ils servaient de r?sidence.

Philippe le Bel fit construire les galeries H, la grand'salle l, les portiques K et le logis L, <>, dit Corrozet, qui les a encore vus tout entiers, b?tis sous la direction de <> Enguerrand de Marigny n'en fut pas moins pendu, comme chacun sait, ce qui enl?ve quelque chose au sens moral de la remarque du bon Parisien Corrozet.

C'est dans ce palais que Charles V re?ut et logea l'empereur Charles IV, probablement dans des b?timents qui occupaient l'emplacement affect? plus tard ? la chambre des comptes... <>

Il est certain que ces palais, ces grandes r?sidences seigneuriales, au moyen ?ge, s'?levaient successivement. Suivant une habitude que nous voyons encore observ?e en Orient, chaque prince ajoutait aux b?timents qu'il trouvait debout, un logis, une salle, suivant les go?ts ou les besoins du moment. Il n'y avait pas de projet d'ensemble suivi m?thodiquement, ex?cut? par fractions, et loin de se conformer ? une disposition unique, les seigneurs qui faisaient ajouter quelque logis ? la demeure de leurs pr?d?cesseurs, pr?tendaient donner ? l'oeuvre nouvelle un caract?re particulier; ils marquaient ainsi leur passage, laissaient l'empreinte de leur ?poque en b?tissant un logis tout neuf, suivant le go?t du jour, plut?t que d'approprier d'anciens b?timents. Ces r?sidences pr?sentent donc de la vari?t? non-seulement dans les parties qui les composent, mais aussi entre elles, et si leur programme est le m?me, la mani?re dont il a ?t? interpr?t? diff?re dans chaque province. Ici la chapelle prend une importance consid?rable, l? elle se r?duit aux proportions d'un oratoire. Dans tel palais, le donjon est un ouvrage de d?fense important; dans tel autre, il ne consiste qu'en une b?tisse un peu plus ?paisse et un peu plus ?lev?e que le reste du logis. Seule la grand'salle occupe toujours une vaste surface, car c'est l? une partie essentielle, c'est le signe de la juridiction seigneuriale, le lieu des grandes assembl?es; comme dans les ch?teaux, elle poss?de un large perron et s'?l?ve sur des celliers vo?t?s. ? Troyes, par exemple, le palais des comtes de Champagne, accol? ? l'?glise Saint-?tienne, qui lui servait de chapelle, n'avait, relativement ? l'?difice religieux, qu'une ?tendue assez m?diocre; ses logements ?taient peu nombreux, mais la grand'salle avait 52 m?tres de longueur sur 20 m?tres environ de largeur. Une tour carr?e, accol?e au flanc nord de l'?glise et d?pendant de celle-ci, servait de tr?sor et de donjon. Les pi?ces destin?es ? l'habitation, renferm?es dans un premier ?tage sur rez-de-chauss?e vo?t?, ?taient plac?es en enfilade sur l'un des flancs de la grand'salle et devant l'?glise du c?t? ouest; elles donnaient sur un bras de la Seine. Un jardin du c?t? du midi et une place du c?t? septentrional bornaient le palais; c'?tait sur cette place que s'?tendait le large perron servant d'entr?e principale ? la grand'salle. Du reste, le palais de Troyes cessa d'?tre la demeure des comtes de Champagne d?s 1220; ceux-ci pr?f?r?rent ?tablir leur r?sidence ? Provins.

Ces constructions sont ?lev?es en belles pierres de Sijean et de B?ziers; elles couvrent une surface de 4000 m?tres environ, d?duction faite des cours, et malgr? les nombreuses mutilations qu'elles ont subies, bien que des couvertures plates modernes et sans caract?re aient remplac? les anciennes toitures ? pentes rapides, bien que des adjonctions mis?rables, ou l'abandon, aient d?truit plusieurs de leurs parties les plus int?ressantes, elles ne laissent pas d'en imposer par leur grandeur et leur puissance.

Nous donnons une vue cavali?re de ce palais, prise du c?t? de la grosse tour carr?e . Mais ce palais des archev?ques de Narbonne est un pauvre logis, si on le compare au palais des papes ? Avignon. Il est n?cessaire, pour faire comprendre l'importance de cette r?sidence des souverains pontifes, de donner un historique sommaire de leur s?jour dans le comtat Venaissin.

Le pape Cl?ment V vint ? Avignon en 1308, et habita le couvent des Fr?res pr?cheurs . Cl?ment V ?tait Bertrand de Grotte, archev?que de Bordeaux; ce pr?lat passait pour ?tre l'ennemi du roi de France, Philippe le Bel. Ce prince eut avec lui une entrevue: <> Bertrand tomba ? ses genoux, et lui r?pondit: <> Bertrand de Grotte fut ?lu, et vint s'?tablir en France, ? Avignon.

Innocent VI acheva la partie m?ridionale et la grande chapelle sup?rieure. Urbain V fit tailler dans le roc l'emplacement de la cour principale du palais, et y fit creuser un puits; il fit construire l'aile orientale donnant sur des jardins, et ajouta une septi?me tour, dite des Anges, aux six d?j? b?ties.

On a tenu dans le palais d'Avignon six conclaves:

Ainsi, en soixante ann?es, les papes firent b?tir non-seulement cette r?sidence, dont la masse formidable couvre une surface de 6400 m?tres environ, mais encore toute l'enceinte de la ville, dont le d?veloppement est de 4,800 m?tres.

Tout ce rez-de-chauss?e est vo?t? et construit de mani?re ? d?fier le temps et la main des hommes. Du corps de garde B on monte par un escalier ? vis aux d?fenses sup?rieures de la porte principale A. Un autre escalier Q monte aux appartements donnant sur l'esplanade.

Afin de ne pas multiplier les figures, nous pr?sentons le plan du palais des papes ? rez-de-chauss?e pour la partie la plus ?lev?e, et au premier ?tage pour la partie situ?e au-dessus des b?timents entourant la cour d'honneur. Par le fait, le niveau du rez-de-chauss?e des b?timents sup?rieurs correspond au niveau d'un ?tage entresol?, dispos? en partie sur le plan donn? dans la figure 14.

Ce dernier exemple indique, comme les pr?c?dents, que la question de sym?trie n'?tait point soulev?e lorsqu'il s'agissait de b?tir des palais pendant le moyen ?ge. On cherchait ? placer les services suivant le terrain ou l'orientation la plus favorable, suivant les besoins, et l'on donnait ? chaque corps de logis la forme, l'apparence qui convenaient ? sa destination.

Les ch?teaux du Louvre, de la Bastille, de Vincennes, ceux des bords de la Loire, devinrent la r?sidence habituelle des rois de France, depuis les guerres de l'ind?pendance jusqu'au r?gne de Fran?ois Ier. Les grands vassaux suivirent en cela l'exemple du souverain, et pr?f?raient leurs ch?teaux ? leurs r?sidences urbaines, et le nom de palais resta aux b?timents occup?s par les parlements.

PALIER, s. m. Repos m?nag? entre les vol?es d'un escalier .

Beaucoup de bourgades, de villages et d'habitations rurales, manoirs, granges, etc., n'?taient, pendant le moyen ?ge, ferm?s que de palissades. Les d?pendances des ch?teaux, basses-cours, jardins, garennes, n'avaient souvent d'autre d?fense qu'une palissade avec haie vive.

<>

<>

Ces ouvrages de bois autour des places avaient souvent une grande importance; ils formaient de v?ritables barbacanes, ou d?fendaient de longues caponni?res. Les assi?g?s faisaient du mieux qu'ils pouvaient pour les conserver, car ces palissades for?aient les assaillants ? ?tendre leur contrevallation, permettaient l'entr?e des secours et des provisions, et rendaient la d?fense du haut des remparts plus efficace en ce qu'elle d?couvrait un champ plus ?tendu.

On ne saurait donner le nom de pan de bois aux empilages horizontaux de troncs d'arbres ?quarris; cette sorte de structure n'appartient pas ? l'art du charpentier; on ne la voit employ?e que chez certains peuples, et jamais elle ne fut admise sur le territoire de la France, ? dater de l'?poque gallo-romaine. Les Gaulois, au dire de C?sar, ?levaient quelques constructions, notamment des murs de d?fense, au moyen de longrines de bois altern?es avec des pierres et des traverses; mais il ne para?t pas que cette m?thode ait ?t? employ?e pendant le moyen ?ge, et elle n'a aucun rapport avec ce que nous appelons un pan de bois.

Le pan de bois, par la combinaison de ses assemblages, exige en effet des connaissances ?tendues d?j? de l'art du charpentier, et ne se rencontre que chez les populations qui ont longtemps pratiqu? cet art difficile. Les Romains ?taient d'habiles charpentiers, et savaient en peu de temps ?lever des ouvrages de bois d'une grande importance. Employant des bois courts comme plus maniables, ils les assemblaient solidement, et pouvaient au besoin s'?lever ? de grandes hauteurs. Les peuples du Nord, et particuli?rement des Normands, excellents charpentiers, m?l?rent ? ces traditions antiques de nouveaux ?l?ments, comme par exemple l'emploi des bois de grandes longueurs et des bois courbes, si fr?quemment usit?s dans la charpenterie navale; ils adopt?rent certains assemblages dont les coupes ont une puissance extraordinaire, comme pour r?sister aux chocs et aux ?branlements auxquels sont soumis les navires, et jamais ils n'eurent recours au fer pour relier leurs ouvrages de bois.

Prodigues d'une mati?re qui n'?tait pas rare sur le sol des Gaules, les architectes romans, lorsqu'ils ?levaient des pans de bois, laissaient peu de place aux remplissages, et se servaient volontiers de pi?ces, sinon tr?s ?paisses, au moins tr?s larges, d?bit?es dans des troncs ?normes, et formant par leur assemblage une lourde membrure, n'ayant gu?re d'espaces vides entre elles que les baies n?cessaires pour ?clairer les int?rieurs.

Ce pan de bois est bien trac?; les bois sont parfaitement ?quarris, les moulures nettement coup?es, les assemblages faits avec soin. Il ?tait, bien entendu, apparent; les remplissages ?taient hourd?s en mortier et petit moellon enduits.

Notre-Dame de Paris, Notre-Dame de Reims, poss?daient leur parvis. Quelques ?glises conventuelles ont parfois devant leur fa?ade des parvis, mais ces derniers avaient un caract?re particulier.

Le parvis est ?videmment une tradition de l'antiquit?: les temples des Grecs ?taient habituellement pr?c?d?s d'une enceinte sacr?e dont la cl?ture n'?tait qu'une barri?re ? hauteur d'appui.

Les Romains suivirent cet exemple, et nous voyons sur une m?daille frapp?e ? l'occasion de l'?rection du temple d'Antonin et Faustine, ? Rome, la fa?ade du monument, devant laquelle est figur?e une barri?re avec porte. Ces enceintes ajoutaient au respect qui doit entourer tout ?difice religieux, en isolant leur entr?e, en la s?parant du mouvement de la voie publique. Un des plus remarquables parvis de l'?poque romaine est celui qu'Adrien ?leva en avant du temple du Soleil, ? Baalbek. Ce parvis ?tait entour? de portiques avec ex?dres couverts, et ?tait pr?c?d? d'une avant-cour ? six c?t?s, avec p?ristyle et large emmarchement.

Les premi?res basiliques chr?tiennes poss?daient ?galement une cour entour?e de portiques, en avant de leur fa?ade, et, au milieu de cette cour, ?taient plac?s quelques monuments consacr?s, tombeaux, puits, fontaines, statues.

L'enceinte se composait de pilettes portant un appui avec pinacles aux entr?es et aux angles, c'est-?-dire en B. Nous donnons en C le d?tail de cette cl?ture ? l'ext?rieur, et en D sa coupe. Les deux pinacles B' de chaque c?t? de l'entr?e principale ?taient surmont?s de supports avec ?cussons; des fleurons G amortissaient les autres pinacles.

Le parvis de la cath?drale d'Amiens est relev?; mais sa cl?ture, si jamais elle a ?t? faite, n'existe plus depuis longtemps.

Il n'est pas besoin de faire ressortir l'effet monumental de ces aires cl?tur?es en avant des ?glises. Quelquefois, comme devant le portail de l'?glise abbatiale de Cluny, une croix de pierre ?tait plant?e au milieu du parvis; des tombes ?taient ?lev?es dans l'enceinte. Ces dispositions, comme la plupart de celles qui tenaient ? la dignit? des ?glises cath?drales ou abbatiales, furent boulevers?es par les abb?s et les chapitres pendant le dernier si?cle. Ces emplacements furent livr?s, moyennant une redevance, ? des marchands, les jours de foire, puis bient?t se couvrirent d'?choppes permanentes. Pour quelques rentes, le clerg? des cath?drales et des abbayes ali?nait ainsi les d?pendances de l'?glise; le premier il portait le marteau sur tout ce qui devait inspirer le respect pour les monuments sacr?s.

PATIENCE, s. f. . Petit si?ge en forme de cul-de-lampe, plac? sous la tablette mobile des stalles, et servant de point d'appui lorsque celle-ci est relev?e .

Nous avons retrouv? parfois des restes de ces pavages, faits habituellement de petits cubes de gr?s ou de pierre r?sistante .

Quand les pentes ?taient roides, on pavait les voies au moyen de pierres dures pos?es de champ. Nous avons d?couvert des pav?s de ce genre en bon ?tat de conservation, aux alentours du ch?teau de Pierrefonds.

Les ?tages inf?rieurs des habitations ?taient souvent pav?s, et l'on voyait encore des maisons du moyen ?ge, il y a peu d'ann?es, dont le sol ? rez-de-chauss?e ?tait couvert de petits cubes de pierre de 0m,10 de c?t? environ, pos?s pointifs sur une aire de mortier ou de ciment.

PEINTURE, s. f. Plus on remonte vers les temps antiques, plus on reconna?t qu'il existait une alliance intime entre l'architecture et la peinture. Tous les ?difices de l'Inde, ceux de l'Asie Mineure, ceux d'?gypte, ceux de la Gr?ce, ?taient couverts de peintures en dedans et au dehors. L'architecture des Doriens, celles de l'Attique, de la grande Gr?ce et de l'?trurie ?taient peintes. Les Romains paraissent avoir ?t? les premiers qui aient ?lev?, sous l'empire, des monuments de marbre blanc ou de pierre sans aucune coloration; quant ? leurs enduits de stuc, ils ?taient color?s ? l'ext?rieur comme ? l'int?rieur. Les populations barbares de l'Europe septentrionale et occidentale peignaient leurs maisons et leurs temples de bois, et les Scandinaves prodiguaient les couleurs brillantes et les dorures dans leurs habitations.

La peinture appliqu?e ? l'architecture ne peut proc?der que de deux mani?res: ou elle est soumise aux lignes, aux formes, au dessin de la structure; ou elle n'en tient compte, et s'?tend ind?pendante sur les parois, les vo?tes, les piles et les profils.

Dans la d?coration de l'architecture, il faut convenir, il est vrai, que la peinture est la partie la plus difficile peut-?tre et celle qui demande le plus de calculs et d'exp?rience. Alors que l'on peignait tous les int?rieurs des ?difices, les plus riches comme les plus pauvres, on avait n?cessairement des donn?es, des r?gles que l'on suivait par tradition; les artistes les plus ordinaires ne pouvaient ainsi s'?garer. Mais aujourd'hui ces traditions sont absolument perdues, chacun cherche une loi inconnue; il ne faut donc pas s'?tonner si la plupart des essais tent?s n'ont produit que des r?sultats peu satisfaisants.

Partant donc de cette condition rigoureuse impos?e au tableau, nous ne comprenons pas un tableau, c'est-?-dire une sc?ne repr?sent?e suivant les r?gles de la perspective, de la lumi?re et de l'effet, plac? de telle fa?on que le spectateur se trouve ? 4 ou 5 m?tres au-dessous de son horizon, et bien loin du point de vue ? droite ou ? gauche. Les ?poques brillantes de l'art n'ont pas admis ces ?normit?s: ou bien les peintres n'ont tenu compte, dans les sujets peints ? toutes hauteurs sur les murs, ni d'un horizon, ni d'un lieu r?el, ni de l'effet perspectif, ni d'une lumi?re unique; ou bien ces peintres ont r?solument abord? la difficult? en tra?ant les sc?nes qu'ils voulaient repr?senter sur les parois ou sous le plafond d'une salle, d'apr?s une perspective unique, supposant que tous les personnages ou objets que l'on montrait au spectateur se trouvaient dispos?s r?ellement o? on les figurait, et se pr?sentaient par cons?quent sous un aspect d?termin? par cette place m?me. Ainsi voit-on, dans des plafonds de cette ?poque, des personnages par la plante des pieds, certaines figures dont les genoux cachent la poitrine. Naturellement cette fa?on de tromper l'oeil eut un grand succ?s. Il est clair cependant que si, dans cette mani?re de d?coration monumentale, l'horizon est suppos? plac? ? 2 m?tres du sol, ? la hauteur r?elle de l'oeil du spectateur, il ne peut y avoir sur toute cette surface horizontale suppos?e ? 2 m?tres du pav?, qu'un seul point de vue. Or, du moment qu'on sort de ce point unique, le trac? perspectif de toute la d?coration devient faux, toutes les lignes paraissent danser et donnent le mal de mer aux gens qui ont pris l'habitude de vouloir se rendre compte de ce que leurs yeux leur font percevoir. Quand l'art en vient ? tomber dans ces erreurs, ? vouloir sortir du domaine qui lui est assign?, il cesse bient?t d'exister: c'est le saut p?rilleux qui remplace l'?loquence, le jongleur qui prend la place de l'orateur. Mais encore les artistes qui ont adopt? ce genre de peinture d?corative ont pu admettre un point, un seul, disons-nous, d'o? le spectateur pouvait, pensaient-ils, ?prouver une satisfaction compl?te; c'?tait peu, sur toute la surface d'une salle, de donner un seul point d'o? l'on p?t en saisir parfaitement la d?coration, mais enfin c'?tait quelque chose. Les sc?nes repr?sent?es se trouvaient d'ailleurs encadr?es au milieu d'une ornementation qui elle-m?me affectait la r?alit? de reliefs, d'ombres et de lumi?res se jouant sur des corps saillants. C'?tait un syst?me d?coratif poss?dant son unit? et sa raison, tandis qu'on ne saurait trouver la raison de ce parti de peinture, par exemple, qui, ? c?t? de sc?nes affectant la r?alit? des effets, des ombres et des lumi?res, de la perspective, place des ornements plats compos?s de tons juxtapos?s. Alors les sc?nes qui admettent l'effet r?el produit par le relief et les diff?rences de plans sont en dissonance compl?te avec cette ornementation plate. Ce n'?tait donc pas sans raison que les peintres du moyen ?ge voyaient dans la peinture, soit qu'elle figur?t des sc?nes, soit qu'elle ne se compos?t que d'ornements, une surface qui devait toujours para?tre plane, solide, qui ?tait destin?e non ? produire une illusion, mais une harmonie. Nous admettons qu'on pr?f?re la peinture en trompe-l'oeil de la vo?te des Grands J?suites ? Rome ? celle de la vo?te de Saint-Savin, pr?s de Poitiers; mais ce que nous ne saurions admettre, c'est qu'on pr?tende concilier ces deux principes oppos?s. Il faut opter pour l'un des deux.

Par le fait, dans ces peintures de sujets, chaque figure pr?sente une silhouette se d?tachant en vigueur sur un fond clair, ou en clair sur un fond sombre, et rehauss?e seulement de traits qui indiquent les formes, les plis des draperies, les lin?aments int?rieurs. Le model? n'est obtenu que par ces traits plus ou moins accentu?s, tous du m?me ton brun, et la couleur n'est autre chose qu'une enluminure. Les peintures des vases dits ?trusques, celles que l'on a d?couvertes dans les tombeaux de Corneto, proc?dent absolument de la m?me mani?re. Alors les accessoires sont trait?s comme des hi?roglyphes, la figure humaine seule se d?veloppe d'apr?s sa forme r?elle. Un palais est rendu par deux colonnes et un fronton, un arbre par une tige surmont?e de quelques feuilles, un fleuve par un trait serpentant, etc. Peut-on, lorsqu'il s'agit de peinture monumentale, produire sur le spectateur autant d'effet par ces moyens primitifs que par l'emploi des trompe-l'oeil? ou, pour parler plus vrai, des hommes n?s au milieu d'une civilisation chez laquelle on s'est habitu? ? estimer la peinture en raison du plus ou moins de r?alit? mat?rielle obtenue, peuvent-ils s'?mouvoir devant des sujets trait?s comme le sont ceux des tombeaux de Corneto, ceux des catacombes, ou ceux de l'?glise de Saint-Savin? C'est l? toute la question, qui n'est autre qu'une question d'?ducation.

Les peuples artistes n'ont vu dans la peinture monumentale qu'un dessin enlumin? et tr?s-l?g?rement model?. Que le dessin soit beau, l'enluminure harmonieuse, la peinture monumentale dit tout ce qu'elle peut dire; la difficult? est certes assez grande, le r?sultat obtenu consid?rable, car c'est seulement ? l'aide de ces moyens si simples en apparence que l'on peut produire de ces grands effets de d?coration colori?e dont l'impression reste profond?ment grav?e dans l'esprit.

<<... pictoribus atque poetis, Quidlibet audendi semper fuit aequa potestas.>>

Il arrivait m?me souvent aux artistes peignant des sujets ou des ornements sur fond d'or, de dorer les dessous des ornements ou draperies destin?s ? ?tre color?s en rouge, en pourpre ou en jaune mordor?. Alors la coloration n'?tait qu'un glacis tr?s-transparent pos? sur le m?tal, et, avec des tons tr?s-intenses, on ?vitait les lourdeurs. Ces tons participaient du fond et conservaient quelque chose de son ?clat m?tallique.

Nous ne pourrions nous ?tendre davantage, sans sortir du cadre de cet article, sur la peinture des sujets dans les ?difices. D'ailleurs nous avons l'occasion de revenir sur quelques points touchant la peinture, dans les articles STYLE et VITRAIL. Nous passerons maintenant ? la peinture d'ornement, ? la d?coration peinte proprement dite. Il y a lieu de croire que sur cette partie importante de l'art, les artistes du moyen ?ge n'avaient que des traditions, une exp?rience journali?re, mais peu ou point de th?ories. Les trait?s de peinture ne s'occupent que des moyens mat?riels et n'entrent pas dans des consid?rations sur l'art, sur les m?thodes ? employer dans tel ou tel cas. Pour nous, qui avons absolument perdu ces traditions, et qui ne poss?dons qu'une exp?rience tr?s-born?e de l'effet d?coratif de la peinture, nous devons n?cessairement nous appuyer sur l'observation des exemples pass?s pour reconstituer certaines th?ories r?sultant de cette exp?rience et de ces traditions. Il serait assez inutile ? nos lecteurs de savoir que tel ornement est jaune ou bleu, si nous n'expliquons pas pourquoi il est jaune ici et bleu l?, et comment il produit un certain effet dans l'un ou l'autre cas. La peinture d?corative est avant tout une question d'harmonie, et il n'y a pas de syst?me harmonique qui ne puisse ?tre expliqu?.

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