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Read Ebook: Cours de philosophie positive. (1/6) by Comte Auguste

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Ebook has 345 lines and 118985 words, and 7 pages

te comme direct un objet qui, presque toujours, est, au contraire, fort indirect, et par l?, elle ne fait nullement concevoir la nature de la science.

On comprendra toute l'exactitude de cette observation g?n?rale, en se bornant ? consid?rer sp?cialement le cas particulier qui pr?sente ?videmment le plus de facilit?, celui de la mesure d'une ligne droite par une autre ligne droite. Cette comparaison, qui, de toutes celles que nous pouvons imaginer, est sans contredit la plus simple, ne peut n?anmoins presque jamais ?tre effectu?e imm?diatement. En r?fl?chissant ? l'ensemble des conditions n?cessaires pour qu'une ligne droite soit susceptible d'une mesure directe, on voit que le plus souvent elles ne peuvent point ?tre remplies ? la fois, relativement aux lignes que nous d?sirons conna?tre. La premi?re et la plus grossi?re de ces conditions, celle de pouvoir parcourir la ligne d'un bout ? l'autre, pour porter successivement l'unit? dans toute son ?tendue, exclut ?videmment d?j? la tr?s-majeure partie des distances qui nous int?ressent le plus; d'abord toutes les distances entre les diff?rens corps c?lestes, ou de la terre ? quelqu'autre corps c?leste, et ensuite m?me la plupart des distances terrestres, qui sont si fr?quemment inaccessibles. Quand cette premi?re condition se trouve accomplie, il faut encore que la longueur ne soit ni trop grande ni trop petite, ce qui rendrait la mesure directe ?galement impossible; il faut qu'elle soit convenablement situ?e, etc. La plus l?g?re circonstance, qui abstraitement ne para?trait devoir introduire aucune nouvelle difficult?, suffira souvent, dans la r?alit?, pour nous interdire toute mesure directe. Ainsi, par exemple, telle ligne que nous pourrions mesurer exactement avec la plus grande facilit?, si elle ?tait horizontale, il suffira de la concevoir redress?e verticalement, pour que la mesure en devienne impossible. En un mot, la mesure imm?diate d'une ligne droite, pr?sente une telle complication de difficult?s, surtout quand on veut y apporter quelque exactitude, que presque jamais nous ne rencontrons d'autres lignes susceptibles d'?tre mesur?es directement avec pr?cision, du moins parmi celles d'une certaine grandeur, que des lignes purement artificielles, cr??es express?ment par nous pour comporter une d?termination directe, et auxquelles nous parvenons ? rattacher toutes les autres.

Ce que je viens d'?tablir relativement aux lignes se con?oit, ? bien plus forte raison, des surfaces, des volumes, des vitesses, des temps, des forces, etc., et, en g?n?ral, de toutes les autres grandeurs susceptibles d'appr?ciation exacte, et qui, par leur nature, pr?sentent n?cessairement beaucoup plus d'obstacles encore ? une mesure imm?diate. Il est donc inutile de s'y arr?ter, et nous devons regarder comme suffisamment constat?e l'impossibilit? de d?terminer, en les mesurant directement, la plupart des grandeurs que nous d?sirons conna?tre. C'est ce fait g?n?ral qui n?cessite la formation de la science math?matique, comme nous allons le voir. Car, renon?ant, dans presque tous les cas, ? la mesure imm?diate des grandeurs, l'esprit humain a d? chercher ? les d?terminer indirectement, et c'est ainsi qu'il a ?t? conduit ? la cr?ation des math?matiques.

La m?thode g?n?rale qu'on emploie constamment, la seule ?videmment qu'on puisse concevoir, pour conna?tre des grandeurs qui ne comportent point une mesure directe, consiste ? les rattacher ? d'autres qui soient susceptibles d'?tre d?termin?es imm?diatement, et d'apr?s lesquelles on parvient ? d?couvrir les premi?res, au moyen des relations qui existent entre les unes et les autres. Tel est l'objet pr?cis de la science math?matique envisag?e dans son ensemble. Pour s'en faire une id?e suffisamment ?tendue, il faut consid?rer que cette d?termination indirecte des grandeurs peut-?tre indirecte ? des degr?s fort diff?rens. Dans un grand nombre de cas, qui souvent sont les plus importans, les grandeurs, ? la d?termination desquelles on ram?ne la recherche des grandeurs principales qu'on veut conna?tre, ne peuvent point elles-m?mes ?tre mesur?es imm?diatement, et doivent par cons?quent, ? leur tour, devenir le sujet d'une question semblable, et ainsi de suite; en sorte que, dans beaucoup d'occasions, l'esprit humain est oblig? d'?tablir une longue suite d'interm?diaires entre le syst?me des grandeurs inconnues qui sont l'objet d?finitif de ses recherches, et le syst?me des grandeurs susceptibles de mesure directe, d'apr?s lesquelles on d?termine finalement les premi?res, et qui ne paraissent d'abord avoir avec celles-ci aucune liaison.

Quelques exemples vont suffire pour ?claircir ce que les g?n?ralit?s pr?c?dentes pourraient pr?senter de trop abstrait.

Consid?rons, en premier lieu, un ph?nom?ne naturel tr?s-simple qui puisse n?anmoins donner lieu ? une question math?matique r?elle et susceptible d'applications effectives, le ph?nom?ne de la chute verticale des corps pesans.

Dans l'exemple pr?c?dent, la question math?matique est fort simple, du moins quand on n'a pas ?gard ? la variation d'intensit? de la pesanteur, ni ? la r?sistance du fluide que le corps traverse dans sa chute. Mais, pour agrandir la question, il suffira de consid?rer le m?me ph?nom?ne dans sa plus grande g?n?ralit?, en supposant la chute oblique, et tenant compte de toutes les circonstances principales. Alors, au lieu d'offrir simplement deux quantit?s variables li?es entr'elles par une relation facile ? suivre, le ph?nom?ne en pr?sentera un plus grand nombre, l'espace parcouru, soit dans le sens vertical, soit dans le sens horizontal, le temps employ? ? le parcourir, la vitesse du corps ? chaque point de sa course, et m?me l'intensit? et la direction de son impulsion primitive, qui pourront aussi ?tre envisag?es comme variables, et enfin, dans certains cas, pour tenir compte de tout, la r?sistance du milieu et l'?nergie de la gravit?. Toutes ces diverses quantit?s seront li?es entr'elles, de telle sorte que chacune ? son tour pourra ?tre d?termin?e indirectement d'apr?s les autres, ce qui pr?sentera autant de recherches math?matiques distinctes qu'il y aura de grandeurs coexistantes dans le ph?nom?ne consid?r?. Ce changement tr?s-simple dans les conditions physiques d'un probl?me pourra faire, comme il arrive en effet pour l'exemple cit?, qu'une recherche math?matique, primitivement fort ?l?mentaire, se place tout-?-coup au rang des questions les plus difficiles, dont la solution compl?te et rigoureuse surpasse jusqu'? pr?sent toutes les plus grandes forces de l'esprit humain.

C'est par de tels travaux, que l'homme a pu parvenir ? conna?tre, non-seulement les distances des astres ? la terre, et par suite, entr'eux, mais leur grandeur effective, leur v?ritable figure, jusqu'aux in?galit?s de leur surface, et, ce qui semble se d?rober bien plus encore ? nos moyens d'investigation, leurs masses respectives, leurs densit?s moyennes, les circonstances principales de la chute des corps pesans ? la surface de chacun d'eux, etc. Par la puissance des th?ories math?matiques, tous ces divers r?sultats, et bien d'autres encore relatifs aux diff?rentes classes de ph?nom?nes naturels, n'ont exig? d?finitivement d'autres mesures imm?diates que celles d'un tr?s-petit nombre de lignes droites, convenablement choisies, et d'un plus grand nombre d'angles. On peut m?me dire, en toute rigueur, pour indiquer d'un seul trait la port?e g?n?rale de la science, que si l'on ne craignait pas avec raison de multiplier sans n?cessit? les op?rations math?matiques, et si, par cons?quent, on ne devait pas les r?server seulement pour la d?termination des quantit?s qui ne pourraient nullement ?tre mesur?es directement, ou d'une mani?re assez exacte, la connaissance de toutes les grandeurs susceptibles d'estimation pr?cise que les divers ordres de ph?nom?nes peuvent nous offrir, serait finalement r?ductible ? la mesure imm?diate d'une ligne droite unique et d'un nombre d'angles convenable.

Nous avons jusqu'ici envisag? la science math?matique seulement dans son ensemble total, sans avoir aucun ?gard ? ses divisions. Nous devons maintenant, pour compl?ter cette vue g?n?rale et nous former une juste id?e du caract?re philosophique de la science, consid?rer sa division fondamentale. Les divisions secondaires seront examin?es dans les le?ons suivantes.

Cette division principale ne saurait ?tre vraiment rationnelle, et d?river de la nature m?me du sujet, qu'autant qu'elle se pr?sentera spontan?ment, en faisant l'analyse exacte d'une question math?matique compl?te. Ainsi, apr?s avoir d?termin? ci-dessus quel est l'objet g?n?ral des travaux math?matiques, caract?risons maintenant avec pr?cision les divers ordres principaux de recherches dont ils se composent constamment.

Cette analyse peut ?tre observ?e dans toute question math?matique compl?te, quelque simple ou quelque compliqu?e qu'elle soit. Il suffira, pour la faire bien comprendre, d'en indiquer un seul exemple.

Dans cet exemple, la question concr?te est plus difficile que la question abstraite. Ce serait l'inverse, si l'on consid?rait le m?me ph?nom?ne dans sa plus grande g?n?ralit?, tel que je l'ai envisag? plus haut pour un autre motif. Suivant les cas, ce sera tant?t la premi?re, tant?t la seconde de ces deux parties qui constituera la principale difficult? de la question totale; la loi math?matique du ph?nom?ne pouvant ?tre tr?s-simple, mais difficile ? obtenir, et, dans d'autres occasions, facile ? d?couvrir, mais fort compliqu?e: en sorte que les deux grandes sections de la science math?matique, quand on les compare en masse, doivent ?tre regard?es comme exactement ?quivalentes en ?tendue et en difficult?, aussi bien qu'en importance, ainsi que nous le constaterons plus tard en consid?rant chacune d'elles s?par?ment.

Ces deux parties, essentiellement distinctes, d'apr?s l'explication pr?c?dente, par l'objet que l'esprit s'y propose, ne le sont pas moins par la nature des recherches dont elles se composent.

En pr?sentant cette comparaison sous un nouveau point de vue, on peut dire que la math?matique concr?te a un caract?re philosophique essentiellement exp?rimental, physique, ph?nom?nal; tandis que celui de la math?matique abstraite est purement logique, rationnel. Ce n'est pas ici le lieu de discuter exactement les proc?d?s qu'emploie l'esprit humain pour d?couvrir les lois math?matiques des ph?nom?nes. Mais, soit que l'observation pr?cise sugg?re elle-m?me la loi, soit, comme il arrive plus souvent, qu'elle ne fasse que confirmer la loi construite par le raisonnement d'apr?s les faits les plus communs; toujours est-il certain que cette loi n'est envisag?e comme r?elle qu'autant qu'elle se montre d'accord avec les r?sultats de l'exp?rience directe. Ainsi, la partie concr?te de toute question math?matique est n?cessairement fond?e sur la consid?ration du monde ext?rieur, et ne saurait jamais, quelle qu'y puisse ?tre la part du raisonnement, se r?soudre par une simple suite de combinaisons intellectuelles. La partie abstraite, au contraire, quand elle a ?t? d'abord bien exactement s?par?e, ne peut consister que dans une s?rie de d?ductions rationnelles plus ou moins prolong?e. Car, si l'on a une fois trouv? les ?quations d'un ph?nom?ne, la d?termination des unes par les autres des quantit?s qu'on y consid?re, quelques difficult?s d'ailleurs qu'elle puisse souvent offrir, est uniquement du ressort du raisonnement. C'est ? l'intelligence qu'il appartient de d?duire, de ces ?quations, des r?sultats qui y sont ?videmment compris, quoique d'une mani?re peut-?tre fort implicite, sans qu'il y ait lieu ? consulter de nouveau le monde ext?rieur, dont la consid?ration, devenue d?s lors ?trang?re, doit m?me ?tre soigneusement ?cart?e pour r?duire le travail ? sa v?ritable difficult? propre.

On voit, par cette comparaison g?n?rale, dont je dois me borner ici ? indiquer les traits principaux, combien est naturelle et profonde la division fondamentale ?tablie ci-dessus dans la science math?matique.

Pour terminer l'exposition g?n?rale de cette division, il ne nous reste plus qu'? circonscrire, aussi exactement que nous puissions le faire dans ce premier aper?u, chacune des deux grandes sections de la science math?matique.

Cela suffit, il est vrai, pour lui donner un caract?re complet d'universalit? logique, quand on consid?re l'ensemble des ph?nom?nes du point de vue le plus ?lev? de la philosophie naturelle. En effet, si toutes les parties de l'univers ?taient con?ues comme immobiles, il n'y aurait ?videmment ? observer que des ph?nom?nes g?om?triques, puisque tout se r?duirait ? des relations de forme, de grandeur, et de situation; ayant ensuite ?gard aux mouvemens qui s'y ex?cutent, il y a lieu ? consid?rer de plus des ph?nom?nes m?caniques. En appliquant ici, apr?s l'avoir suffisamment g?n?ralis?e, une conception philosophique, due ? M. de Blainville, et d?j? cit?e pour un autre usage dans la 1re le?on , on peut donc ?tablir que, vu sous le rapport statique, l'univers ne pr?sente que des ph?nom?nes g?om?triques; et, sous le rapport dynamique, que des ph?nom?nes m?caniques. Ainsi la g?om?trie et la m?canique constituent, par elles-m?mes, les deux sciences naturelles fondamentales, en ce sens, que tous les effets naturels peuvent ?tre con?us comme de simples r?sultats n?cessaires, ou des lois de l'?tendue, ou des lois du mouvement.

Mais, quoique cette conception soit toujours logiquement possible, la difficult? est de la sp?cialiser avec la pr?cision n?cessaire, et de la suivre exactement dans chacun des cas g?n?raux que nous offre l'?tude de la nature, c'est-?-dire, de r?duire effectivement chaque question principale de philosophie naturelle, pour tel ordre de ph?nom?nes d?termin?, ? la question de g?om?trie ou de m?canique, ? laquelle on pourrait rationnellement la supposer ramen?e. Cette transformation, qui exige pr?alablement de grands progr?s dans l'?tude de chaque classe de ph?nom?nes, n'a ?t? r?ellement ex?cut?e jusqu'ici que pour les ph?nom?nes astronomiques, et pour une partie de ceux que consid?re la physique terrestre proprement dite. C'est ainsi que l'astronomie, l'acoustique, l'optique, etc., sont devenues finalement des applications de la science math?matique ? de certains ordres d'observations. Mais, ces applications n'?tant point, par leur nature, rigoureusement circonscrites, ce serait assigner ? la science un domaine ind?fini et enti?rement vague, que de les confondre avec elle, comme on le fait dans la division ordinaire, si vicieuse ? tant d'autres ?gards, des math?matiques en pures et appliqu?es. Nous persisterons donc ? regarder la math?matique concr?te comme uniquement compos?e de la g?om?trie et de la m?canique.

Afin de r?sumer le plus philosophiquement possible les consid?rations ci-dessus expos?es sur la division fondamentale des math?matiques, il importe de remarquer qu'elle n'est qu'une application du principe g?n?ral de classification qui nous a permis d'?tablir, dans la le?on pr?c?dente, la hi?rarchie rationnelle des diff?rentes sciences positives.

Si l'on compare, en effet, d'une part le calcul, et d'une autre part la g?om?trie et la m?canique, on v?rifie, relativement aux id?es consid?r?es dans chacune de ces deux sections principales de la math?matique, tous les caract?res essentiels de notre m?thode encyclop?dique. Les id?es analytiques sont ?videmment ? la fois plus abstraites, plus g?n?rales et plus simples que les id?es g?om?triques ou m?caniques. Bien que les conceptions principales de l'analyse math?matique, envisag?es historiquement, se soient form?es sous l'influence des consid?rations de g?om?trie ou de m?canique, au perfectionnement desquelles les progr?s du calcul sont ?troitement li?s, l'analyse n'en est pas moins, sous le point de vue logique, essentiellement ind?pendante de la g?om?trie et de la m?canique, tandis que celles-ci sont, au contraire, n?cessairement fond?es sur la premi?re.

Cette nature propre de l'analyse math?matique permet de s'expliquer ais?ment pourquoi, lorsqu'elle est convenablement employ?e, elle nous offre un si puissant moyen, non-seulement pour donner plus de pr?cision ? nos connaissances r?elles, ce qui est ?vident de soi-m?me, mais surtout pour ?tablir une coordination infiniment plus parfaite dans l'?tude des ph?nom?nes qui comportent cette application. Car, les conceptions ayant ?t? g?n?ralis?es et simplifi?es le plus possible, ? tel point qu'une seule question analytique, r?solue abstraitement, renferme la solution implicite d'une foule de questions physiques diverses, il doit n?cessairement en r?sulter pour l'esprit humain une plus grande facilit? ? apercevoir des relations entre des ph?nom?nes qui semblaient d'abord enti?rement isol?s les uns des autres, et desquels on est ainsi parvenu ? tirer, pour le consid?rer ? part, tout ce qu'ils ont de commun. C'est ainsi qu'en examinant la marche de notre intelligence dans la solution des questions importantes de g?om?trie et de m?canique, nous voyons surgir naturellement, par l'interm?diaire de l'analyse, les rapprochemens les plus fr?quens et les plus inattendus entre des probl?mes qui n'offraient primitivement aucune liaison apparente, et que nous finissons souvent par envisager comme identiques. Pourrions-nous, par exemple, sans le secours de l'analyse, apercevoir la moindre analogie entre la d?termination de la direction d'une courbe ? chacun de ses points, et celle de la vitesse acquise par un corps ? chaque instant de son mouvement vari?, questions qui, quelque diverses qu'elles soient, n'en font qu'une, aux yeux du g?om?tre?

La haute perfection relative de l'analyse math?matique, compar?e ? toutes les autres branches de nos connaissances positives, se con?oit avec la m?me facilit?, quand on a bien saisi son vrai caract?re g?n?ral. Cette perfection ne tient pas, comme l'ont cru les m?taphysiciens, et surtout Condillac, d'apr?s un examen superficiel, ? la nature des signes ?minemment concis et g?n?raux qu'on emploie comme instrumens de raisonnement. Dans cette importante occasion sp?ciale, comme dans toutes les autres, l'influence des signes a ?t? consid?rablement exag?r?e, bien qu'elle soit sans doute, tr?s r?elle, ainsi que l'avaient reconnu, avant Condillac, et d'une mani?re bien plus exacte, la plupart des g?om?tres. En r?alit?, toutes les grandes conceptions analytiques ont ?t? form?es sans que les signes alg?briques fussent d'aucun secours essentiel, autrement que pour les exploiter apr?s que l'esprit les avait obtenues. La perfection sup?rieure de la science du calcul tient principalement ? l'extr?me simplicit? des id?es qu'elle consid?re, par quelques signes qu'elles soient exprim?es: en sorte qu'il n'y a pas le moindre espoir, ? l'aide d'aucun artifice quelconque du langage scientifique, m?me en le supposant possible, de perfectionner, au m?me degr?, des th?ories qui, portant sur des notions plus complexes, sont n?cessairement condamn?es, par leur nature, ? une inf?riorit? logique plus ou moins grande suivant la classe correspondante de ph?nom?nes.

L'examen que nous avons tent? de faire, dans cette le?on, du caract?re philosophique de la science math?matique, resterait incomplet, si, apr?s l'avoir envisag?e dans son objet et dans sa composition, nous n'indiquions pas quelques consid?rations g?n?rales directement relatives ? l'?tendue r?elle de son domaine.

? cet effet, il est indispensable de reconna?tre avant tout, pour se faire une juste id?e de la v?ritable nature des math?matiques, que, sous le point de vue purement logique, cette science est, par elle-m?me, n?cessairement et rigoureusement universelle. Car il n'y a pas de question quelconque qui ne puisse finalement ?tre con?ue comme consistant ? d?terminer des quantit?s les unes par les autres d'apr?s certaines relations, et, par cons?quent, comme r?ductible, en derni?re analyse, ? une simple question de nombres. On le comprendra si l'on remarque effectivement que, dans toutes nos recherches, ? quelque ordre de ph?nom?nes qu'elles se rapportent, nous avons d?finitivement en vue d'arriver ? des nombres, ? des doses. Quoique nous n'y parvenions le plus souvent que d'une mani?re fort grossi?re et d'apr?s des m?thodes tr?s incertaines, il n'en est pas moins ?vident que tel est le terme r?el de tous nos probl?mes quelconques. Ainsi, pour prendre un exemple dans la classe de ph?nom?ne la moins accessible ? l'esprit math?matique, les ph?nom?nes des corps vivans, consid?r?s m?me, pour plus de complication, dans le cas pathologique, n'est-il pas manifeste que toutes les questions de th?rapeutique peuvent ?tre envisag?es comme consistant ? d?terminer les quantit?s de tous les divers modificateurs de l'organisme qui doivent agir sur lui pour le ramener ? l'?tat normal, en admettant, suivant l'usage des g?om?tres, les valeurs nulles, n?gatives, ou m?me contradictoires, pour quelques-unes de ces quantit?s dans certains cas? Sans doute, une telle mani?re de se repr?senter la question ne peut ?tre en effet r?ellement suivie, comme nous allons le voir, pour les ph?nom?nes les plus complexes, parce qu'elle nous pr?sente dans l'application des difficult?s insurmontables; mais quand il s'agit de concevoir abstraitement toute la port?e intellectuelle d'une science, il importe de lui supposer l'extension totale dont elle est logiquement susceptible.

Mais si, pour se former une id?e convenable de la science math?matique, il importe de la concevoir comme ?tant n?cessairement dou?e par sa nature d'une rigoureuse universalit? logique, il n'est pas moins indispensable de consid?rer maintenant les grandes limitations r?elles qui, vu la faiblesse de notre intelligence, r?tr?cissent singuli?rement son domaine effectif, ? mesure que les ph?nom?nes se compliquent en se sp?cialisant.

Toute question peut sans doute, ainsi que nous venons de le voir, ?tre con?ue comme r?ductible ? une pure question de nombres. Mais la difficult? de la traiter r?ellement sous ce point de vue, c'est-?-dire d'effectuer une telle transformation, est d'autant plus grande, dans les diverses parties essentielles de la philosophie naturelle, que l'on consid?re des ph?nom?nes plus compliqu?s, en sorte que sauf pour les ph?nom?nes les plus simples et les plus g?n?raux, elle devient bient?t insurmontable.

Ce n'est pas n?anmoins qu'on doive cesser, d'apr?s cela, de concevoir, en th?se philosophique g?n?rale, les ph?nom?nes de tous les ordres comme n?cessairement soumis par eux-m?mes ? des lois math?matiques, que nous sommes seulement condamn?s ? ignorer toujours dans la plupart des cas, ? cause de la trop grande complication des ph?nom?nes. Il n'y a en effet aucune raison de penser que, sous ce rapport, les ph?nom?nes les plus complexes des corps vivans soient essentiellement d'une autre nature sp?ciale que les ph?nom?nes les plus simples des corps bruts. Car, s'il ?tait possible d'isoler rigoureusement chacune des causes simples qui concourent ? produire un m?me ph?nom?ne physiologique, tout porte ? croire qu'elle se montrerait dou?e, dans des circonstances d?termin?es, d'un genre d'influence et d'une quantit? d'action aussi exactement fixes que nous le voyons dans la gravitation universelle, v?ritable type des lois fondamentales de la nature. Ce qui engendre la variabilit? irr?guli?re des effets, c'est le grand nombre d'agens divers d?terminant ? la fois un m?me ph?nom?ne, et d'o? il r?sulte que, dans les ph?nom?nes tr?s-compliqu?s, il n'y a peut-?tre pas deux cas rigoureusement semblables. Nous n'avons pas besoin, pour trouver une telle difficult?, d'aller jusqu'aux ph?nom?nes des corps vivans. Elle se pr?sente d?j? dans ceux des corps bruts, quand nous consid?rons les cas les plus complexes; par exemple, en ?tudiant les ph?nom?nes m?t?orologiques. On ne peut douter que chacun des nombreux agens qui concourent ? la production de ces ph?nom?nes ne soit soumis s?par?ment ? des lois math?matiques, quoique nous ignorions encore la plupart d'entr'elles; mais leur multiplicit? rend les effets observ?s aussi irr?guli?rement variables que si chaque cause n'?tait assuj?tie ? aucune condition pr?cise.

La consid?ration pr?c?dente conduit ? apercevoir un second motif distinct en vertu duquel il nous est n?cessairement interdit, vu la faiblesse de notre intelligence, de faire rentrer l'?tude des ph?nom?nes les plus compliqu?s dans le domaine des applications de l'analyse math?matique. En effet, ind?pendamment de ce que, dans les ph?nom?nes les plus sp?ciaux, les r?sultats effectifs sont tellement variables que nous ne pouvons pas m?me y saisir des valeurs fixes, il suit de la complication des cas, que, quand m?me nous pourrions conna?tre un jour la loi math?matique ? laquelle est soumis chaque agent pris ? part, la combinaison d'un aussi grand nombre de conditions rendrait le probl?me math?matique correspondant tellement sup?rieur ? nos faibles moyens, que la question resterait le plus souvent insoluble. Ce n'est donc pas ainsi qu'on peut faire une ?tude r?elle et f?conde de la majeure partie des ph?nom?nes naturels.

Pour appr?cier aussi exactement que possible cette difficult?, consid?rons ? quel point se compliquent les questions math?matiques, m?me relativement aux ph?nom?nes les plus simples des corps bruts, quand on veut rapprocher suffisamment l'?tat abstrait de l'?tat concret, en ayant ?gard ? toutes les conditions principales qui peuvent exercer sur l'effet produit, une influence v?ritable. On sait, par exemple, que le ph?nom?ne tr?s-simple de l'?coulement d'un fluide, en vertu de sa seule pesanteur, par un orifice donn?, n'a pas jusqu'? pr?sent de solution math?matique compl?te, quand on veut tenir compte de toutes les circonstances essentielles. Il en est encore ainsi, m?me pour le mouvement encore plus simple d'un projectile solide dans un milieu r?sistant.

Pourquoi l'analyse math?matique a-t-elle pu s'adapter, avec un succ?s si admirable, ? l'?tude approfondie des ph?nom?nes c?lestes? Parce qu'ils sont, malgr? les apparences vulgaires, beaucoup plus simples que tous les autres. Le probl?me le plus compliqu? qu'ils pr?sentent, celui de la modification que produit, dans le mouvement de deux corps tendant l'un vers l'autre en vertu de leur gravitation, l'influence d'un troisi?me corps agissant sur tous deux de la m?me mani?re, est bien moins compos? que le probl?me terrestre le plus simple. Et, n?anmoins, il offre d?j? une telle difficult?, que nous n'en poss?dons encore que des solutions approximatives. Il est m?me ais? de voir, en examinant ce sujet plus profond?ment, que la haute perfection ? laquelle a pu s'?lever l'astronomie solaire par l'emploi de la science math?matique est encore essentiellement due ? ce que nous avons profit? avec adresse de toutes les facilit?s particuli?res, et, pour ainsi dire, accidentelles, qu'offrait pour la solution des probl?mes la constitution sp?ciale, tr?s-favorable sous ce rapport, de notre syst?me plan?taire. En effet, les plan?tes dont il se compose sont assez peu nombreuses, mais surtout elles sont, en g?n?ral, de masses fort in?gales et bien moindres que celle du soleil, et de plus fort ?loign?es les unes des autres; elles ont des formes presque sph?riques; leurs orbites sont presque circulaires, et pr?sentent de faibles inclinaisons mutuelles, etc. Il r?sulte de cet ensemble de circonstances que les perturbations sont le plus souvent peu consid?rables, et que pour les calculer il suffit ordinairement de tenir compte, concurremment avec l'action du soleil sur chaque plan?te en particulier, de l'influence d'une seule autre plan?te, susceptible, par sa grosseur et sa proximit?, de d?terminer des d?rangemens sensibles. Mais si, au lieu d'un tel ?tat de choses, notre syst?me solaire e?t ?t? compos? d'un plus grand nombre de plan?tes concentr?es dans un moindre espace, et ? peu pr?s ?gales en masse; si leurs orbites avaient offert des inclinaisons fort diff?rentes, et des excentricit?s consid?rables; si ces corps eussent ?t? d'une forme plus compliqu?e, par exemple, des ellipso?des tr?s-excentriques, etc.; il est certain qu'en supposant la m?me loi r?elle de gravitation, nous ne serions pas encore parvenus ? soumettre l'?tude des ph?nom?nes c?lestes ? notre analyse math?matique, et probablement nous n'eussions pas m?me pu d?m?ler jusqu'? pr?sent la loi principale.

Ces conditions hypoth?tiques se trouveraient pr?cis?ment r?alis?es au plus haut degr? dans les ph?nom?nes chimiques, si on voulait les calculer d'apr?s la th?orie de la gravitation g?n?rale.

En pesant convenablement les diverses consid?rations qui pr?c?dent, on sera convaincu, je crois, qu'en r?duisant aux diverses parties de la physique inorganique l'extension future des grandes applications r?ellement possibles de l'analyse math?matique, j'ai bien plut?t exag?r? que r?tr?ci l'?tendue de son domaine effectif. Autant il importait de rendre sensible la rigoureuse universalit? logique de la science math?matique, autant je devais signaler les conditions qui limitent pour nous son extension r?elle, afin de ne pas contribuer ? ?carter l'esprit humain de la v?ritable direction scientifique dans l'?tude des ph?nom?nes les plus compliqu?s, par la recherche chim?rique d'une perfection impossible.

Ainsi, tout en s'effor?ant d'agrandir autant qu'on le pourra le domaine r?el des math?matiques, on doit reconna?tre que les sciences les plus difficiles sont destin?es, par leur nature, ? rester ind?finiment dans cet ?tat pr?liminaire qui pr?pare pour les autres l'?poque o? elles deviennent accessibles aux th?ories math?matiques. Nous devons, pour les ph?nom?nes les plus compliqu?s, nous contenter d'analyser avec exactitude les circonstances de leur production, de les rattacher les uns aux autres d'une mani?re g?n?rale, de conna?tre le genre d'influence qu'exerce chaque agent principal, etc.; mais sans les ?tudier sous le point de vue de la quantit?, et par cons?quent sans espoir d'introduire, dans les sciences correspondantes, ce haut degr? de perfection que procure, quant aux ph?nom?nes les plus simples, un usage convenable de la math?matique, soit sous le rapport de la pr?cision de nos connaissances, soit, ce qui est peut-?tre encore plus remarquable, sous le rapport de leur coordination.

Ayant expos?, dans cette le?on, le but essentiel et la composition principale de la science math?matique, ainsi que ses relations g?n?rales avec l'ensemble de la philosophie naturelle, son caract?re philosophique se trouve d?termin?, autant qu'il puisse l'?tre par un tel aper?u. Nous devons passer maintenant ? l'examen sp?cial de chacune des trois grandes sciences dont elle est compos?e, le calcul, la g?om?trie et la m?canique.

QUATRI?ME LE?ON.

SOMMAIRE. Vue g?n?rale de l'Analyse math?matique.

Dans le d?veloppement historique de la science math?matique depuis Descartes, les progr?s de la partie abstraite ont presque toujours ?t? d?termin?s par ceux de la partie concr?te. Mais il n'en est pas moins n?cessaire, pour concevoir la science d'une mani?re vraiment rationnelle, de consid?rer le calcul dans toutes ses branches principales avant de proc?der ? l'?tude philosophique de la g?om?trie et de la m?canique. Les th?ories analytiques, plus simples et plus g?n?rales que celles de la math?matique concr?te, en sont, par elles-m?mes, essentiellement ind?pendantes; tandis que celles-ci ont, au contraire, de leur nature, un besoin continuel des premi?res, sans le secours desquelles elles ne pourraient faire presque aucun progr?s. Quoique les principales conceptions de l'analyse conservent encore aujourd'hui quelques traces tr?s-sensibles de leur origine g?om?trique ou m?canique, elles sont maintenant n?anmoins essentiellement d?gag?es de ce caract?re primitif, qui ne se manifeste plus gu?re que pour quelques points secondaires; en sorte que, depuis les travaux de Lagrange surtout, il est possible, dans une exposition dogmatique, de les pr?senter d'une mani?re purement abstraite, en un syst?me unique et continu. C'est ce que je vais entreprendre dans cette le?on et dans les cinq suivantes, en me bornant, comme il convient ? la nature de ce cours, aux consid?rations les plus g?n?rales sur chaque branche principale de la science du calcul.

J'aurai encore occasion de citer tout ? l'heure, pour un autre motif, un nouvel exemple tr?s-propre ? faire bien sentir la distinction fondamentale que je viens d'exposer; c'est celui des fonctions circulaires, soit directes, soit inverses, qui sont encore aujourd'hui tant?t concr?tes, tant?t abstraites, selon le point de vue sous lequel on les envisage.

Tels sont les ?l?mens tr?s-peu nombreux qui composent directement toutes les fonctions abstraites aujourd'hui connues. Quelque peu multipli?s qu'ils soient, ils suffisent ?videmment pour donner lieu ? un nombre tout-?-fait infini de combinaisons analytiques.

En consid?rant directement l'ensemble de cette question capitale, on est naturellement conduit ? concevoir d'abord un premier moyen pour faciliter l'?tablissement des ?quations des ph?nom?nes. Puisque le principal obstacle ? ce sujet vient du trop petit nombre de nos ?l?mens analytiques, tout semblerait se r?duire ? en cr?er de nouveaux. Mais ce parti, quelque naturel qu'il paraisse, est v?ritablement illusoire, quand on l'examine d'une mani?re approfondie. Quoiqu'il puisse certainement ?tre utile, il est ais? de se convaincre de son insuffisance n?cessaire.

Si nous cherchons ? nous faire une id?e des moyens que l'esprit humain pourrait employer pour inventer de nouveaux ?l?mens analytiques, par l'examen des proc?d?s ? l'aide desquels il a effectivement con?u ceux que nous poss?dons, l'observation nous laisse ? cet ?gard dans une enti?re incertitude, car les artifices dont il s'est d?j? servi pour cela sont ?videmment ?puis?s. Afin de nous en convaincre, consid?rons le dernier couple de fonctions simples qui ait ?t? introduit dans l'analyse, et ? la formation duquel nous avons pour ainsi dire assist?, savoir le quatri?me couple, car, comme je l'ai expliqu?, le cinqui?me couple ne constitue pas, ? proprement parler, de v?ritables nouveaux ?l?mens analytiques. La fonction a^x, et, par suite, son inverse, ont ?t? form?es en concevant sous un nouveau point de vue une fonction d?j? connue depuis long-temps, les puissances, lorsque la notion en a ?t? suffisamment g?n?ralis?e. Il a suffi de consid?rer une puissance relativement ? la variation de l'exposant, au lieu de penser ? la variation de la base, pour qu'il en r?sult?t une fonction simple vraiment nouvelle, la variation suivant alors une marche toute diff?rente. Mais cet artifice, aussi simple qu'ing?nieux, ne peut plus rien fournir. Car, en retournant, de la m?me mani?re, tous nos ?l?mens analytiques actuels, on n'aboutit qu'? les faire rentrer les uns dans les autres.

Nous ne concevons donc nullement de quelle mani?re on pourrait proc?der ? la cr?ation de nouvelles fonctions abstraites ?l?mentaires, remplissant convenablement toutes les conditions n?cessaires. Ce n'est pas ? dire, n?anmoins, que nous ayons atteint aujourd'hui la limite effective pos?e ? cet ?gard par les bornes de notre intelligence. Il est m?me certain que les derniers perfectionnemens sp?ciaux de l'analyse math?matique ont contribu? ? ?tendre nos ressources sous ce rapport, en introduisant dans le domaine du calcul certaines int?grales d?finies, qui, ? quelques ?gards, tiennent lieu de nouvelles fonctions simples, quoiqu'elles soient loin de remplir toutes les conditions convenables, ce qui m'a emp?ch? de les inscrire au tableau des vrais ?l?mens analytiques. Mais, tout bien consid?r?, je crois qu'il demeure incontestable que le nombre de ces ?l?mens ne peut s'accro?tre qu'avec une extr?me lenteur. Ainsi, ce ne peut ?tre dans un tel proc?d? que l'esprit humain ait puis? ses ressources les plus puissantes pour faciliter autant que possible l'?tablissement des ?quations.

CINQUI?ME LE?ON.

SOMMAIRE. Consid?rations g?n?rales sur le calcul des fonctions directes.

Dans l'enfance de l'alg?bre, ces ?quations avaient ?t? class?es d'apr?s le nombre de leurs termes. Mais cette classification ?tait ?videmment vicieuse; comme s?parant des cas r?ellement semblables, et en r?unissant d'autres qui n'avaient rien de commun qu'un caract?re sans aucune importance v?ritable. Elle n'a ?t? maintenue que pour les ?quations ? deux termes, susceptibles, en effet, d'une r?solution commune qui leur est propre.

Cet accroissement de difficult? est tel, que jusqu'ici la r?solution des ?quations alg?briques ne nous est connue que dans les quatre premiers degr?s seulement. ? cet ?gard, l'alg?bre n'a pas fait de progr?s consid?rables depuis les travaux de Descartes, et des analystes italiens du seizi?me si?cle, quoique, dans les deux derniers si?cles, il n'ait peut-?tre pas exist? un seul g?om?tre qui ne se soit occup? de pousser plus avant la r?solution des ?quations. L'?quation g?n?rale du cinqui?me degr? elle-m?me, a jusqu'ici r?sist? ? toutes les tentatives.

Dans l'?tat pr?sent de l'alg?bre, la r?solution compl?te des ?quations des quatre premiers degr?s, des ?quations binomes quelconques, de certaines ?quations sp?ciales des degr?s sup?rieurs, et d'un tr?s-petit nombre d'?quations exponentielles, logarithmiques, ou circulaires, constituent donc les m?thodes fondamentales que pr?sente le calcul des fonctions directes pour la solution des probl?mes math?matiques. Mais, avec des ?l?mens aussi born?s, les g?om?tres n'en sont pas moins parvenus ? traiter, d'une mani?re vraiment admirable, un tr?s-grand nombre de questions importantes, comme nous le reconna?trons successivement dans la suite de ce volume. Les perfectionnemens g?n?raux introduits depuis un si?cle dans le syst?me total de l'analyse math?matique ont eu pour caract?re principal d'utiliser ? un degr? immense ce peu de connaissances acquises sur le calcul des fonctions directes, au lieu de tendre ? les augmenter. Ce r?sultat a ?t? obtenu ? un tel point, que le plus souvent ce calcul n'a de r?le effectif dans la solution compl?te des diverses questions que par ses parties les plus simples, celles qui se rapportent aux ?quations des deux premiers degr?s, ? une seule ou ? plusieurs variables.

Cette derni?re branche si importante de l'alg?bre se divise naturellement en deux ordres de questions, d'abord celles qui se rapportent ? la composition des ?quations, et ensuite celles qui concernent leur transformation; ces derni?res ayant pour objet de modifier les racines d'une ?quation sans les conna?tre, suivant une loi quelconque donn?e, pourvu que cette loi soit uniforme relativement ? toutes ces racines.

Ce nombre ?tant, comme il est ais? de le voir, inf?rieur au pr?c?dent de n, il en r?sulte qu'un tel produit, ayant moins de g?n?ralit? que la fonction primitive, ne peut la repr?senter constamment. On voit m?me qu'une telle comparaison exigerait n relations sp?ciales entre les coefficiens de cette fonction, qu'on trouverait ais?ment en d?veloppant l'identit?.

Pour compl?ter cette rapide ?num?ration g?n?rale des diverses parties essentielles du calcul des fonctions directes, je dois enfin mentionner express?ment une des th?ories les plus f?condes et les plus importantes de l'alg?bre proprement dite, celle relative ? la transformation des fonctions en s?ries ? l'aide de ce qu'on appelle la m?thode des coefficiens ind?termin?s. Cette m?thode, si ?minemment analytique, et qui doit ?tre regard?e comme une des d?couvertes les plus remarquables de Descartes, a sans doute perdu de son importance depuis l'invention et le d?veloppement du calcul infinit?simal, dont elle pouvait tenir lieu si heureusement sous quelques rapports particuliers. Mais l'extension croissante de l'analyse transcendante, quoique ayant rendu cette m?thode bien moins n?cessaire, en a, d'un autre c?t?, multipli? les applications et agrandi les ressources; en sorte que par l'utile combinaison qui s'est finalement op?r?e entre les deux th?ories, l'usage de la m?thode des coefficiens ind?termin?s est devenu aujourd'hui beaucoup plus ?tendu qu'il ne l'?tait m?me avant la formation du calcul des fonctions indirectes.

Apr?s avoir esquiss? le tableau g?n?ral de l'alg?bre proprement dite, il me reste maintenant ? pr?senter quelques consid?rations sur divers points principaux du calcul des fonctions directes, dont les notions peuvent ?tre utilement ?claircies par un examen philosophique.

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