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Read Ebook: Cours de philosophie positive. (2/6) by Comte Auguste

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Ebook has 487 lines and 121950 words, and 10 pages

Les distances des astres ? la terre ?tant une fois bien connues, l'?tude de leur figure et de leur grandeur ne peut plus pr?senter d'autre difficult? que celle d'une observation suffisamment pr?cise, en r?servant toutefois la question ? l'?gard de notre propre plan?te, qui sera ci-apr?s sp?cialement consid?r?e. Cette recherche est, en effet, par sa nature, du ressort de l'inspection imm?diate. L'?loignement m?me o? ces grands corps sont plac?s de nos yeux est une circonstance ?minemment favorable qui nous permet d'embrasser d'un seul regard l'ensemble de leur forme, en m?me temps que leur mouvement ou le n?tre nous les fait voir successivement sous tous les aspects possibles. La distance, il est vrai, pourrait ?tre tellement grande que les dimensions et, par suite, la forme nous devinssent totalement imperceptibles: tel est le cas de tous les astres ext?rieurs ? notre monde, qui ne sont aper?us, dans les plus puissans t?lescopes, que comme des points math?matiques d'un tr?s vif ?clat, et dont la sph?ricit? ne nous est r?ellement indiqu?e que par une induction tr?s forte. C'est aussi ce qui arrive jusqu'ici pour quelques corps secondaires de notre propre syst?me, pour les satellites d'Uranus par exemple, et m?me, ? un certain degr?, pour les quatre petites plan?tes situ?es entre Mars et Jupiter. Mais tous les astres de quelque importance dans notre monde comportent, ? cet ?gard, une exploration compl?te, du moins avec nos instrumens actuels. Il suffit donc de mesurer soigneusement, par les meilleurs moyens microm?triques, leurs diam?tres apparens dans tous les sens possibles, pour juger imm?diatement de leur v?ritable figure, apr?s avoir toutefois effectu? les deux corrections fondamentales de la r?fraction et de la parallaxe. Si la figure de la terre a ?t? long-temps mise en question, et si sa connaissance exacte a exig? les recherches les plus difficiles et les plus laborieuses, comme je l'indiquerai plus bas, il n'a jamais pu en ?tre ainsi du soleil et de la lune, et successivement de tous les autres astres de notre syst?me; ? mesure que le perfectionnement de la vision artificielle a permis de les explorer assez distinctement. Un seul cas a d? pr?senter, ? cet ?gard, une v?ritable difficult? scientifique. C'est celui des deux singuliers satellites annulaires dont Saturne est imm?diatement entour?. L'?tranget? de leur figure a exig? que, pour la bien reconna?tre, Huyghens, guid? par des apparences long-temps inexplicables, form?t ? ce sujet une heureuse hypoth?se, qui a satisfait ensuite ? toutes les observations. Il en a ?t? ainsi, jusqu'? un certain point, dans l'origine de la science astronomique, ? l'?gard de la lune, par la diversit? de ses aspects, quoique la plus simple g?om?trie permette ici de d?cider la question. ? ces seules exceptions pr?s, l'inspection imm?diate a ?videmment suffi pour reconna?tre la sph?ricit? presque parfaite de tous nos astres, et pour s'apercevoir plus tard qu'ils sont tous l?g?rement aplatis dans le sens de leur axe de rotation et renfl?s dans leur ?quateur. La quantit? de cet aplatissement a pu m?me ?tre exactement mesur?e avec des microm?tres perfectionn?s. Le r?sultat g?n?ral de ces mesures a ?t? de montrer, ce me semble, que les astres sont d'autant plus aplatis que leur rotation est plus rapide, depuis l'aplatissement presque imperceptible de la lune ou de V?nus, jusqu'? l'aplatissement d'environ 1/12 dans Jupiter ou dans Saturne; ce que nous verrons plus tard ?tre conforme ? la th?orie de la gravitation.

Quant ? la v?ritable grandeur des corps c?lestes, un calcul tr?s facile la d?duit imm?diatement de la mesure du diam?tre apparent combin?e avec la d?termination de la distance. Car, la s?cante du demi-diam?tre apparent d'un corps sph?rique est ?videmment ?gale au rapport entre son rayon r?el et sa distance ? l'oeil; ce qui permet d'?valuer maintenant ce rayon, et, par suite, la surface et le volume. L'homme n'a eu si long-temps des id?es profond?ment erron?es des vraies dimensions des astres que parce que leurs distances r?elles lui ?taient inconnues; quoique, d'ailleurs, par son ignorance des lois de la vision, il n'ait pas toujours maintenu une exacte harmonie entre les fausses notions qu'il se formait des unes et des autres.

Le r?sultat g?n?ral de ces diverses d?terminations pour tous les astres de notre monde, compar? avec l'ordre fondamental de leurs distances au soleil, ne se montre assujetti jusqu'? pr?sent ? aucune r?gle. On y remarque seulement que le soleil est beaucoup plus volumineux que tous les autres corps de ce syst?me, m?me r?unis; et, en g?n?ral, que les satellites sont aussi beaucoup moindres que leurs plan?tes, comme l'exige la m?canique c?leste.

Il est presque superflu d'ajouter ici que notre ignorance ? l'?gard des distances effectives de tous les corps ext?rieurs ? notre monde, nous interdit toute connaissance de leurs vraies dimensions, quand m?me nous parviendrions, ? l'aide de plus puissans t?lescopes, ? mesurer leurs diam?tres apparens. Nous avons seulement lieu de penser vaguement que leur volume doit ?tre analogue ? celui de notre soleil.

Une question secondaire, mais qui n'est point sans int?r?t, se rattache ? l'?tude de la figure et de la grandeur des astres, dont elle est, en quelque sorte, un compl?ment minutieux. C'est l'?valuation exacte de la hauteur des petites asp?rit?s qui recouvrent leur surface, ? la fa?on de nos montagnes. Rien n'est plus propre peut-?tre qu'une telle estimation ? rendre sensible la puissance de nos lunettes actuelles et la pr?cision qu'ont acquis nos moyens microm?triques.

On con?oit, en g?n?ral, que l'un quelconque des astres int?rieurs ? notre monde doit avoir un h?misph?re ?clair? par le soleil et un autre h?misph?re visible de la terre; et que nous apercevons seulement la portion commune, plus ou moins ?tendue suivant les divers aspects, de ces deux h?misph?res, dont chacun serait d'ailleurs nettement termin? par un cercle, si la surface ?tait parfaitement polie. Cela pos?, s'il existe, dans la partie invisible de l'h?misph?re ?clair?, ou dans la partie obscure de l'h?misph?re visible, et tout pr?s de la ligne de s?paration, une montagne suffisamment ?lev?e, son sommet nous appara?tra n?cessairement, dans l'image de l'astre, comme un point isol? ext?rieur au disque r?gulier, et dont la distance ? ce disque, ainsi que la situation, exactement appr?ci?es l'une et l'autre ? l'aide d'un bon microm?tre, nous permettront de d?terminer, avec plus ou moins de pr?cision, par un calcul trigonom?trique fort simple, la hauteur cherch?e, d'abord comparativement au rayon de l'astre, et finalement en m?tres si nous le d?sirons. Le degr? de pr?cision que comporte une estimation aussi d?licate d?pend, ?videmment, de l'?tendue et de la nettet? du disque; et l'absence d'atmosph?re doit aussi contribuer ? l'augmenter. Aucun astre, sous ces divers rapports, ne peut ?tre plus exactement explor?, ? cet ?gard, que la lune, dont les principales montagnes sont peut-?tre mieux mesur?es aujourd'hui, d'apr?s les op?rations de M. Schro?ter, qu'un grand nombre des montagnes terrestres. Il est remarquable qu'elles soient, en g?n?ral, plus ?lev?es que nos plus hautes montagnes, puisqu'on en trouve de huit mille m?tres au moins, ce qui est surtout frappant par contraste avec un diam?tre plus de trois fois moindre. La m?me singularit? s'observe ? l'?gard de V?nus et de Mercure, seules plan?tes qui aient pu jusqu'ici permettre une semblable d?termination, bien moins exacte toutefois que pour la lune; M. Schro?ter a trouv? que leurs montagnes atteignent jusqu'? quatre myriam?tres environ, dans la premi?re, qui est ? peu pr?s ?gale en grandeur ? la terre, et deux dans la seconde, dont le diam?tre est presque trois fois moindre.

Une recherche plus importante, qui compl?te naturellement l'?tude de la figure et de la grandeur des astres, consiste ? ?valuer l'?tendue et l'intensit? de leurs atmosph?res. Elle est fond?e sur la d?viation appr?ciable que ces atmosph?res doivent imprimer ? la lumi?re des astres ext?rieurs ? notre monde, devant lesquels vient se placer en ligne droite l'astre int?rieur propos?; ce qui constitue ce genre particulier d'?clipses, connu sous le nom d'occultations d'?toiles, et qui est, comme tout autre, et m?me mieux qu'aucun autre, susceptible d'?tre exactement calcul?. Cette d?viation, qui est parfaitement semblable ? la r?fraction horizontale de notre atmosph?re, peut ?tre surtout estim?e d'une mani?re extr?mement pr?cise, par un proc?d? indirect, qui ne nous serait point applicable, d'apr?s l'influence tr?s sensible qu'elle exerce sur la dur?e totale de l'occultation. Par le simple mouvement diurne du ciel, cette dur?e serait naturellement ind?finie; mais elle est, en r?alit?, plus ou moins longue, suivant le mouvement propre plus ou moins lent de l'astre propos?. On peut la calculer d'avance avec exactitude, d'apr?s la vitesse angulaire et la direction de ce mouvement, compar?es au diam?tre apparent de l'astre, et modifi?es d'ailleurs par le mouvement de l'observateur lui-m?me. Or, maintenant, la r?fraction atmosph?rique doit, en r?alit?, diminuer, plus ou moins selon les diff?rens astres, mais toujours tr?s notablement, cette dur?e g?om?trique; car elle retarde le commencement de l'occultation, et elle en acc?l?re la fin. Cette influence, enti?rement comparable ? celle qui prolonge un peu la pr?sence du soleil sur notre horizon, est d'ailleurs beaucoup plus grande; elle quadruple en quelque sorte l'effet direct de la r?fraction, puisqu'on cumule ainsi la d?viation ?prouv?e par la lumi?re ? sa sortie de l'atmosph?re aussi bien qu'? son entr?e, et cela tant ? la fin de l'occultation qu'au commencement. On pourra donc, en comparant la dur?e effective de cette occultation avec sa dur?e math?matique, conna?tre, d'apr?s l'exc?s plus ou moins grand de celle-ci sur l'autre, la valeur de la r?fraction horizontale de l'atmosph?re propos?e, bien plus exactement que par aucune observation directe. Le degr? de pr?cision que comporte cette d?termination compliqu?e, et qui est ?videmment mesur? par le temps plus ou moins long que l'occultation doit durer, est tr?s in?gal suivant les diff?rens astres. C'est ainsi que, pour la lune, qui offre, il est vrai, le cas le plus favorable, on a pu garantir que la r?fraction horizontale, dont la valeur est, sur notre terre, de trente-quatre minutes, ne s'?l?ve pas ? une seule seconde, d'apr?s les mesures de M. Schro?ter, et que, par cons?quent, il n'y existe aucune atmosph?re appr?ciable, ce qui a ?t? confirm? plus tard par M. Arago, d'apr?s un tout autre genre d'observations, relatif ? la polarisation de la lumi?re que r?fl?chissent sous certaines incidences les surfaces liquides, et d'o? il est r?sult? qu'il n'y a point, ? la surface de la lune, de grandes masses liquides, susceptibles de former une atmosph?re. Parmi tous les autres cas, le mieux connu est celui de V?nus, o? M. Schro?ter a constat? une r?fraction horizontale de trente minutes vingt-quatre secondes.

Quant ? l'?tendue des atmosph?res, il est clair qu'elle est appr?ciable, jusqu'? un certain point, en examinant, soit d'apr?s le proc?d? pr?c?dent, soit ? l'aide d'une observation directe, ? quelle distance de la plan?te peut cesser l'action r?fringente. Mais, comme la r?fraction d?cro?t graduellement ? mesure qu'on s'?loigne de l'astre, elle finit par devenir assez faible pour ne plus exercer aucune influence bien sensible, quoique les limites de l'atmosph?re soient peut-?tre encore tr?s recul?es. Le r?sultat le plus singulier, ? cet ?gard, est celui des plan?tes t?lescopiques, en exceptant Vesta, dont les atmosph?res sont vraiment monstrueuses; la hauteur de l'atmosph?re de Pallas surtout exc?de, suivant M. Schro?ter, douze fois le rayon de la plan?te. Le cas normal, dans l'ensemble du syst?me solaire, semble ?tre cependant, comme pour la terre, une tr?s petite ?tendue atmosph?rique comparativement aux dimensions de l'astre, quoique l'extr?me incertitude de ce genre d'exploration ne permette encore de rien affirmer bien positivement ? ce sujet.

Pour compl?ter l'examen des ph?nom?nes statiques ?tudi?s en g?om?trie c?leste, il me reste enfin ? consid?rer la question fondamentale de la figure et de la grandeur de la terre, qui a d? ci-dessus ?tre soigneusement r?serv?e, ? cause de sa nature toute sp?ciale.

Si l'inspection imm?diate a d? suffire pour conna?tre, d'apr?s leurs distances, les dimensions et la forme de tous les astres de notre monde, il est ?vident que cela ne pouvait ?tre ? l'?gard de la plan?te que nous habitons. L'impossibilit? absolue o? nous sommes de nous en ?carter assez pour en apercevoir l'ensemble d'un seul coup d'oeil ne nous a permis de conna?tre exactement sa v?ritable figure qu'? l'aide de raisonnemens math?matiques tr?s compliqu?s, fond?s sur une longue suite d'observations indirectes, laborieusement accumul?es. Quoiqu'une telle question se rattache aux plus hautes th?ories de la m?canique c?leste, et malgr? m?me que la premi?re impulsion des plus grands travaux g?om?triques ? cet ?gard soit r?ellement due ? une conception m?canique, je dois n?anmoins me r?duire ici, autant que possible, ? consid?rer ce sujet sous le point de vue purement g?om?trique, devant l'envisager plus tard sous le rapport m?canique.

? la naissance de l'astronomie math?matique, les variations que pr?sente dans les diff?rens lieux le spectacle g?n?ral du mouvement diurne ont d'abord fourni la preuve g?om?trique de la figure sph?rique de la terre. Il a suffi, pour s'en convaincre, de constater que le changement ?prouv? par la hauteur du p?le sur chaque horizon ?tait toujours exactement proportionnel ? la longueur du chemin parcouru suivant un m?me m?ridien quelconque, ce qui est un caract?re ?vident et exclusif de la sph?re. Or, cette comparaison primitive, sans cesse d?velopp?e et perfectionn?e pendant vingt si?cles, est la v?ritable et unique source de toutes nos connaissances g?om?triques sur la forme et la grandeur de notre plan?te. L'explication en sera simplifi?e si, sans nous occuper d'abord de la figure, et continuant ? la supposer parfaitement sph?rique, nous cherchons ? d?terminer la grandeur, comme l'ont r?ellement fait les astronomes; car la connaissance de la forme n'a pu ?tre perfectionn?e que par la comparaison des mesures effectu?es en des lieux diff?rens. Dans ce cas, comme dans tout autre, la figure d'un corps n'est appr?ciable qu'en comparant ses dimensions en divers sens: il n'y a ici de particulier que la difficult? de les mesurer.

Le principe fondamental de cette importante d?termination a ?t? ?tabli, d?s les premiers temps de l'?cole d'Alexandrie, par ?ratosth?ne. Il consiste, sous sa forme la plus simple et la plus ordinaire, ? mesurer la longueur effective d'une portion plus ou moins grande d'un m?ridien quelconque, pour en conclure celle de la circonf?rence enti?re, et par suite du rayon, d'apr?s les hauteurs comparatives du p?le observ?es aux deux extr?mit?s de l'arc. On pourrait choisir, sans doute, au lieu d'un m?ridien, un grand cercle quelconque, et m?me un petit cercle; mais l'op?ration deviendrait plus compliqu?e et plus incertaine, sans procurer d'ailleurs aucune facilit? r?elle.

Quelque recul?e que soit l'origine de cette id?e g?n?rale, elle n'a pu ?tre, en r?alit?, convenablement appliqu?e que dans la c?l?bre op?ration con?ue et ex?cut?e par Picard, vers le milieu de l'avant-dernier si?cle, pour mesurer le degr? entre Paris et Amiens; soit que, jusque alors, la hauteur du p?le ne p?t pas ?tre connue d'une mani?re suffisamment exacte; soit, surtout, qu'on n'e?t point imagin? de d?terminer la longueur de l'arc par des proc?d?s purement trigonom?triques. Tel est le vrai point de d?part des grands travaux g?od?siques ex?cut?s depuis, et qui ont tr?s peu chang? la valeur moyenne du rayon terrestre que Picard avait obtenue.

Malgr? le penchant naturel ? regarder la terre comme une sph?re parfaite, le simple d?sir de perfectionner cette mesure fondamentale, en donnant ? l'arc plus d'?tendue, aurait sans doute in?vitablement conduit ? d?couvrir la vraie figure, par la seule in?galit? des degr?s les plus oppos?s. Mais cette importante connaissance e?t ?t? certainement tr?s retard?e, puisque le premier prolongement, inexactement op?r? par Jacques Cassini et La Hire, et d'ailleurs trop peu consid?rable, avait d'abord donn?, comme on sait, une figure inverse de la v?ritable. Cette r?flexion doit faire sentir, quoique ce ne soit pas ici le moment de l'expliquer davantage, combien a ?t? n?cessaire, pour h?ter cette d?couverte, la grande impulsion donn?e par Newton, qui, d'apr?s la seule th?orie de la gravitation, et sans aucun autre fait que le simple raccourcissement du pendule ? secondes ? Cayenne, eut l'heureuse hardiesse de d?cider que notre globe devait ?tre n?cessairement aplati ? ses p?les et renfl? ? son ?quateur, dans le rapport de 229 ? 230.

Ce trait de g?nie devint l'origine de la controverse, prolong?e pendant plus d'un demi-si?cle, entre les g?om?tres proprement dits, pour lesquels la th?orie newtonienne avait une pleine ?vidence, et les astronomes, qui ne croyaient point devoir prononcer contrairement ? des mesures directes. Rien n'a plus excit? qu'un tel d?bat ? entreprendre les m?morables op?rations qui, faisant cesser cette sorte d'anarchie scientifique, ont mis enfin les observations en harmonie avec les principes, et d?termin? exactement la forme r?elle de notre plan?te.

Si la terre ?tait rigoureusement sph?rique, les degr?s du m?ridien seraient parfaitement ?gaux, ? quelque latitude qu'ils fussent mesur?s: ainsi, le seul fait de leur in?galit? constate directement le d?faut de sph?ricit?. D'une autre part, si la terre est aplatie dans un sens quelconque, il est clair qu'il faudra parcourir un arc plus ?tendu pour que le p?le s'?l?ve sur l'horizon d'un degr? de plus, ? mesure que la courbure deviendra moindre. Toute la question se r?duit donc essentiellement ? savoir dans quel sens effectif a lieu l'accroissement des degr?s. Mais l'aplatissement r?el devant, en tout cas, ?tre fort petit, ce qu'indiquait clairement le fait m?me d'une telle ind?cision, il ne saurait ?tre sensible dans la comparaison de degr?s tr?s rapproch?s, et l'on ne pouvait le d?couvrir irr?cusablement qu'en confrontant les degr?s les plus diff?rens. Tel est le motif rationnel de la grande exp?dition scientifique ex?cut?e, il y a un si?cle, par les acad?miciens fran?ais, pour aller mesurer, les uns ? l'?quateur, les autres aussi pr?s que possible du p?le, les deux degr?s extr?mes, dont la comparaison, soit entre eux, soit avec le degr? de Picard, termina enfin, ? la satisfaction g?n?rale, cette longue contestation, en confirmant la profonde justesse de la pens?e de Newton, et m?me l'exactitude tr?s approch?e de son calcul. Cette conclusion a ?t? de plus en plus v?rifi?e par toutes les mesur?s ex?cut?es depuis en divers pays, et surtout par la plus importante d'entre elles, cette que Delambre et M?chain parvinrent ? effectuer avec une si merveilleuse pr?cision, au milieu de l'?poque la plus orageuse, de Dunkerque ? Barcelone, pour la fondation du nouveau syst?me m?trique, et qui a ?t? ensuite consid?rablement prolong?e par diff?rens astronomes. Le perfectionnement des proc?d?s a permis de constater, entre des limites moins ?cart?es, l'accroissement continuel des degr?s ? mesure qu'on s'avance vers le p?le.

En supposant ? la terre la forme rigoureuse d'un ellipso?de de r?volution, la seule comparaison entre deux degr?s ?valu?s ? des latitudes quelconques bien connues doit suffire pour d?terminer, d'apr?s la th?orie de l'ellipse, le vrai rapport des deux axes. Si donc on en a mesur? un plus grand nombre, en les comparant deux ? deux de toutes les mani?res possibles, on doit toujours trouver le m?me aplatissement, ou bien la v?ritable figure ne serait pas encore obtenue, et il faudrait alors construire une nouvelle hypoth?se, n?cessairement plus compliqu?e: celle, par exemple, d'un ellipso?de ? trois axes in?gaux. Tel est l'?tat d'ind?cision o? l'on se trouve aujourd'hui, d'apr?s les mesures les plus parfaites. L'aplatissement de 1/300, indiqu? par l'ensemble des op?rations, s'?carte trop peu de chacune d'elles, pour qu'on puisse affirmer que cette diff?rence ne tient pas ? ce qui reste encore d'incertitude in?vitable dans les r?sultats des observations. D'un autre c?t?, la comparaison de quelques degr?s mesur?s ? la m?me latitude, sous des m?ridiens diff?rens ou dans les deux h?misph?res, tend ? d?montrer que la terre n'est pas un v?ritable ellipso?de de r?volution. Cette figure et cet aplatissement sont cependant encore g?n?ralement adopt?s. Quels que puissent ?tre, sous ce rapport, les progr?s des op?rations futures, il restera toujours bien certain que cette hypoth?se s'?carte extr?mement peu de la r?alit?, et beaucoup moins que la sph?re ne diff?rait de l'ellipso?de r?gulier. Or, cette derni?re diff?rence est d?j? assez petite pour ?tre n?gligeable sans inconv?nient dans la plupart des cas usuels, except? dans les questions les plus d?licates de la m?canique c?leste. Aucune recherche n'exige jusqu'ici qu'on ait ?gard ? l'irr?gularit? de l'ellipso?de; ce qui reste ? d?sirer ? ce sujet ne saurait donc avoir une v?ritable importance. La figure pr?cise de notre plan?te est probablement tr?s compliqu?e ? cause des influences locales, qui, en descendant dans un d?tail trop minutieux, doivent n?cessairement devenir sensibles. Il faut donc reconna?tre que toute connaissance absolue nous est interdite ? cet ?gard, comme ? tout autre, et nous devons nous contenter de compliquer nos approximations ? mesure que de nouveaux ph?nom?nes viennent r?ellement ? l'exiger.

Aucun exemple ne rend plus sensible cette marche rationnelle de l'esprit humain une fois engag? dans la direction positive, que l'histoire g?n?rale des travaux sur la figure de la terre, depuis l'?cole d'Alexandrie jusqu'? nos jours. Quelque diff?rence qu'aient pr?sent?e les opinions scientifiques successivement adopt?es ? ce sujet, chacune d'elles a conserv? ind?finiment la propri?t? de correspondre aux ph?nom?nes qui l'ont inspir?e, et de pouvoir ?tre toujours employ?e, m?me aujourd'hui, lorsqu'il s'agit seulement de consid?rer ces m?mes ph?nom?nes. C'est ainsi que, en conservant une exacte harmonie entre la pr?cision de nos th?ories et celle dont nous avons besoin dans nos d?terminations, l'ensemble de nos ?tudes positives pr?sente, en tout genre, malgr? les r?volutions scientifiques, un v?ritable caract?re de stabilit?, propre ? d?truire enti?rement le reproche d'arbitraire sugg?r? si souvent ? des esprits superficiels par le spectacle inattentif de ces variations.

Apr?s avoir suffisamment consid?r? l'?tude g?n?rale des ph?nom?nes g?om?triques que pr?sentent les astres de notre monde envisag?s dans l'?tat de repos, je dois commencer l'examen philosophique de la th?orie g?om?trique de leurs mouvemens, qui sera compl?t? dans les deux le?ons suivantes.

Le mouvement d'un astre, comme celui de tout autre corps, est toujours compos? de translation et de rotation. La liaison de ces deux mouvemens est tellement naturelle, ainsi que nous l'avons vu en philosophie math?matique, que la seule connaissance de l'un est un motif extr?mement puissant de pr?sumer l'existence de l'autre. N?anmoins, il est indispensable, en g?om?trie c?leste, de les ?tudier s?par?ment, car ils pr?sentent des difficult?s tr?s in?gales.

Quoique les rotations de nos astres aient ?t? connues beaucoup plus tard que leurs translations, vu l'impossibilit? de les observer ? l'oeil nu, leur ?tude n'en est pas moins, en r?alit?, bien plus facile sous le point de vue g?om?trique, et c'est justement l'inverse sous le point de vue m?canique. Il est d'abord ?vident que ces rotations peuvent ?tre d?termin?es g?om?triquement, sans qu'il soit n?cessaire d'avoir aucun ?gard aux mouvemens de l'observateur lui-m?me, qui doivent ?tre pris, au contraire, en consid?ration essentielle quand il s'agit d'explorer les translations. En second lieu, la connaissance des rotations est en elle-m?me d'une bien plus grande simplicit?, puisque la question d'orbite, qui constitue la principale difficult? de l'?tude des translations, en est n?cessairement exclue: elle se rapproche beaucoup, par sa nature, des recherches purement statiques dont nous venons de nous occuper. L'ensemble de ces motifs ne permet point d'h?siter, ce me semble, ? placer d?sormais l'?tude des rotations avant celle des translations, dans toute exposition rationnelle de la g?om?trie c?leste.

La connaissance des rotations c?lestes a commenc? par la d?couverte que fit Galil?e de la rotation du soleil, la plus ais?e de toutes ? d?terminer, et qui ne pouvait manquer de suivre presque imm?diatement l'invention du t?lescope. La m?thode tr?s simple imagin?e dans cette premi?re occasion a ?t?, au fond, constamment la m?me pour tous les autres cas, qui ne diff?rent que par la difficult? plus ou moins grande de l'observation: elle est directement indiqu?e par la nature m?me du probl?me. En effet, la rotation d'une sph?re inaccessible et tr?s ?loign?e serait impossible ? apercevoir, si sa surface ?tait parfaitement polie et exactement uniforme. Mais il suffit de pouvoir y distinguer, soit par leur obscurit?, soit, au contraire, par leur ?clat, ou de toute autre mani?re, quelques points reconnaissables, qui soient r?ellement adh?rens ? la surface, ou du moins susceptibles d'?tre regard?s comme tels pendant un certain temps , pour que l'examen attentif de leur d?placement graduel sur l'image totale permette la d?termination g?om?trique de cette rotation. Un cercle ?tant connu par trois de ses points, on pourrait, ? la rigueur, se borner ? observer exactement trois positions successives de l'un quelconque des indices ainsi choisis, en notant avec soin les ?poques correspondantes. D'apr?s ces donn?es, un calcul g?om?trique, d'ailleurs un peu compliqu?, d?terminerait enti?rement le parall?le d?crit par cet indice, comme le temps employ? ? le parcourir; cons?quemment, la dur?e totale de la rotation et l'axe autour duquel elle s'effectue seraient ainsi exactement connus. Mais il est ?videmment indispensable de combiner un plus grand nombre de positions, et surtout de varier, autant que possible, les indices, pour obtenir des moyens de v?rification dans des op?rations aussi d?licates, qui reposent enti?rement sur les seules variations de la diff?rence tr?s petite que pr?sentent, ? chaque instant, l'ascension droite et la d?clinaison de l'indice compar?es ? celles du centre de l'astre. Ces comparaisons ?taient, en outre, primitivement n?cessaires afin de constater l'uniformit? r?elle de la rotation. Il faut d'ailleurs remarquer que l'observation directe de la dur?e totale d'une r?volution, fond?e sur le retour exact du m?me indice ? la m?me situation, fournit un moyen g?n?ral de v?rification tr?s pr?cieux; pourvu que l'on soit bien assur? de l'invariabilit? relative des indices, et m?me, si la rotation est un peu lente, ce qui n'a gu?re lieu qu'? l'?gard du soleil et de la lune, qu'on ait suffisamment tenu compte du d?placement propre de l'observateur dans cet intervalle.

Parmi les rotations bien connues, on n'aper?oit jusqu'ici aucune trace de loi r?guli?re, au sujet de leur dur?e, qui ne se lie ni aux distances, ni aux grandeurs, et qui para?t seulement, comme je l'ai not? plus haut, avoir une sorte de relation g?n?rale avec le degr? d'aplatissement: encore cette analogie n'est-elle point sans exception, l'aplatissement de Mars ?tant beaucoup plus prononc? que celui de la terre ou de V?nus, et sa rotation n'?tant certainement point plus rapide. Il faut toutefois remarquer que la rotation du soleil est beaucoup plus lente que celle d'aucune plan?te. Mais, si les dur?es des rotations, quoique d'ailleurs rigoureusement invariables, semblent tout-?-fait irr?guli?res, il n'en est nullement ainsi de leurs directions, ces mouvemens ayant toujours lieu de l'ouest ? l'est dans toutes les parties de notre monde, et suivant des plans tr?s peu inclin?s sur celui de l'?quateur solaire; ce qui constitue une donn?e g?n?rale fort importante sous le point de vue cosmogonique.

Passons maintenant ? l'examen des mouvemens de translation, dont l'?tude, beaucoup plus compliqu?e, est aussi bien autrement importante, en ?gard au but d?finitif des recherches astronomiques, la pr?vision exacte de l'?tat du ciel ? une ?poque future quelconque, dont je ne saurais craindre de rappeler trop souvent la consid?ration formelle.

Outre que le mouvement de la terre constitue directement une partie fort essentielle de cette grande recherche, il ne saurait ?videmment ?tre indiff?rent, ? l'?gard des autres astres, de regarder l'observateur comme fixe ou comme mobile, puisque son d?placement doit notablement affecter, de toute n?cessit?, sa mani?re d'apercevoir les divers mouvemens ext?rieurs. On peut bien, ? la v?rit?, d?cider avec certitude, sans cette connaissance pr?alable, que le soleil et non la terre est le vrai centre des mouvemens de toutes les plan?tes, comme l'avait reconnu Tycho-Brah?, en niant notre propre mouvement: car il suffit pour cela de constater, d'apr?s les proc?d?s indiqu?s dans cette le?on, que les distances des plan?tes au soleil sont tr?s peu variables, tandis que, au contraire, leurs distances ? la terre varient extr?mement; et, en second lieu, que la distance solaire de chaque plan?te inf?rieure est constamment moindre, et celle d'une plan?te sup?rieure constamment plus grande que l'intervalle entre le soleil et la terre: ce qui r?sulte des plus simples observations de parallaxe et de diam?tre apparent. Mais on ne peut aller plus loin, et d?terminer la vraie figure des orbites plan?taires, ainsi que la mani?re dont elles sont parcourues, sans tenir un compte exact et indispensable du d?placement de l'observateur. C'est pourquoi la le?on suivante sera tout enti?re consacr?e ? l'examen de la th?orie fondamentale du mouvement de la terre, apr?s quoi nous pourrons poursuivre, d'une mani?re vraiment rationnelle, l'?tude g?n?rale des mouvemens plan?taires. Toutefois, il convient, ce me semble, de compl?ter la le?on actuelle, en consid?rant la d?termination de certaines donn?es capitales au sujet de ces mouvemens, qui peuvent ?tre obtenues, comme elles l'ont ?t? en effet, sans avoir ?gard ? notre mouvement, et dont la th?orie, parfaitement analogue ? celle qui vient d'?tre caract?ris?e pour les rotations, pr?sente aussi la simplicit? essentielle des recherches purement statiques; en sorte que l'homog?n?it? de cette le?on sera pleinement maintenue. Je veux parler de la connaissance des plans des orbites et de la dur?e des r?volutions sid?rales, enti?rement ind?pendante, par sa nature, de tout ce qui concerne la figure des orbites et la vitesse variable de l'astre. On peut m?me, pour plus de simplicit?, regarder ici tous les mouvemens comme circulaires et uniformes, ainsi que les astronomes ont d? le faire primitivement.

C'est par l? qu'on a reconnu que les plans de toutes les orbites plan?taires passent par le soleil, et de m?me ? l'?gard des divers satellites d'une plan?te quelconque; et que ces plans sont, en g?n?ral, peu inclin?s sur l'?cliptique, et encore moins sur le plan de l'?quateur solaire, sauf les quatre plan?tes t?lescopiques o? l'on trouve des inclinaisons beaucoup plus consid?rables.

Quant ? la dur?e des r?volutions sid?rales, elle peut ?videmment, d'abord, ?tre directement observ?e, d'apr?s le retour de l'astre ? la m?me situation par rapport au centre de son mouvement. Les temps ?coul?s entre les trois positions successives consid?r?es ci-dessus permettraient m?me de l'?valuer, comme dans le cas des rotations, sans attendre une r?volution compl?te, souvent tr?s lente, si l'on supposait l'uniformit? du mouvement ainsi qu'on le peut pour une premi?re approximation. La connaissance compl?te de la loi g?om?trique de ce mouvement donne le moyen de d?duire de cette observation partielle une d?termination exacte, ainsi que nous l'expliquerons plus tard.

Les valeurs de ces temps p?riodiques ne sont point, comme toutes les autres donn?es examin?es dans cette le?on, irr?guli?rement r?parties entre les diff?rens astres de notre monde. En les comparant avec les distances de ces astres aux centres de leurs mouvemens, on reconna?t aussit?t que la r?volution est toujours d'autant plus rapide qu'elle est plus courte, et que sa dur?e cro?t m?me plus promptement que la distance correspondante; en sorte que la vitesse moyenne diminue ? mesure que la distance augmente. Il existe entre ces deux ?l?mens essentiels une harmonie fondamentale qui sera examin?e dans la vingt-troisi?me le?on, et dont la d?couverte, due au g?nie de K?pler, est un des plus beaux r?sultats g?n?raux de la g?om?trie c?leste et une des bases les plus indispensables de la m?canique c?leste.

Consid?rations g?n?rales sur le mouvement de la terre.

Pour faciliter l'examen g?n?ral de cette grande question fondamentale, il convient d'envisager s?par?ment, comme ? l'?gard des autres astres, les deux mouvemens dont notre plan?te est anim?e, en commen?ant aussi par la rotation, bien plus simple ? reconna?tre directement que la translation. Cette d?composition est ici d'autant plus naturelle que, dans l'accomplissement total de la profonde r?volution intellectuelle qui a d? r?sulter du passage de l'id?e de repos ? celle de mouvement, l'esprit humain a form? en effet une hypoth?se interm?diaire, peu connue aujourd'hui, celle de Longomontanus, qui admettait la rotation de la terre en continuant ? m?conna?tre sa translation, et qui, quelque absurde qu'elle soit sans doute, astronomiquement, n'a pas ?t? inutile, sous le point de vue philosophique, comme moyen transitoire. Il est d'ailleurs ?vident que, suivant le principe g?n?ral de la liaison de ces deux mouvemens dans un corps quelconque, les preuves directes de chacun deviennent ici, de m?me qu'envers toutes les plan?tes, autant de preuves indirectes de l'autre. Mais, de plus, cette relation pr?sente, dans le cas actuel, un caract?re tout sp?cial, qui ne saurait avoir lieu ? l'?gard d'aucun autre corps c?leste: c'est l'impossibilit? ?vidente que le mouvement annuel de la terre existe sans son mouvement diurne, quoique l'inverse ait pu logiquement ?tre suppos?.

La rotation de la terre ne pouvant point, par sa nature, ?tre exactement commune au m?me degr? ? tous les points de sa surface, doit laisser, parmi les ph?nom?nes purement terrestre quelques indices sensibles de son existence, comme je l'ai not? d'avance dans le premier volume, ce qui ne saurait ?tre pour la translation. Il faut donc distinguer les preuves c?lestes et les preuves terrestres de notre mouvement diurne, tandis que notre mouvement annuel n'en comporte que du premier genre, qui sont, il est vrai, plus vari?es.

Les astronomes commencent avec raison, par ?carter enti?rement la consid?ration des apparences imm?diates, qui ne sauraient devenir, en aucun sens, un motif r?el de d?cision, puisqu'elles s'accordent ?galement bien avec les deux hypoth?ses oppos?es. Il est clair, en effet, que l'observateur, ne pouvant avoir nullement la conscience de la rotation de sa plan?te, doit apercevoir, en vertu de cette rotation, le m?me spectacle c?leste que si le ciel tournait journellement, comme un syst?me solide, autour de l'axe de la terre, et en sens contraire du vrai mouvement; ainsi qu'on l'observe habituellement dans une foule de cas analogues.

Dans l'enfance de l'esprit humain, l'opinion, d'ailleurs spontan?e, de l'immobilit? de la terre, et du mouvement quotidien de la sph?re c?leste autour d'elle, n'avait point, ? beaucoup pr?s, le degr? d'absurdit? qu'elle pr?sente de nos jours chez le petit nombre d'intelligences mal organis?es qui s'obstinent quelquefois ? la maintenir: elle ?tait, au contraire, ce me semble, aussi logique que naturelle. Car elle se trouvait ?tre exactement en harmonie avec les id?es profond?ment erron?es que l'on se formait n?cessairement des distances et des dimensions des astres avant la naissance de la g?om?trie c?leste. Les astres ?taient regard?s comme tr?s voisins, et par suite suppos?s tr?s peu sup?rieurs ? leurs grandeurs apparentes, en m?me temps qu'on devait naturellement s'exag?rer beaucoup les dimensions de la terre, lorsqu'on eut commenc? ? lui reconna?tre des limites. Avec de tels renseignemens, il e?t ?t?, ?videmment, impossible de ne pas admettre l'immobilit? d'une masse aussi immense, et le mouvement journalier d'un univers dont les ?l?mens et les intervalles ?taient, comparativement, aussi petits. Une conception tellement enracin?e, et appuy?e sur des motifs directs d'une telle force, ind?pendamment de la confiance ?nergique que lui pr?tait l'ensemble des sentimens humains, ne pouvait donc ?tre ?branl?e que par une approximation au moins grossi?re, mais, pourtant g?om?trique, des distances et des dimensions c?lestes, compar?es ? la grandeur de la terre. Or, malgr? que ces d?terminations statiques, objet essentiel de la le?on derni?re, doivent certainement pr?c?der aujourd'hui l'?tude des mouvemens dans une exposition rationnelle de la g?om?trie c?leste, il n'a pu en ?tre enti?rement ainsi dans le d?veloppement historique de la science. L'astronomie grecque avait ?bauch? la th?orie vraiment g?om?trique des mouvemens c?lestes, en n'envisageant essentiellement que les directions, sans s'?tre nullement occup?e de mesurer les proportions de l'univers; ce qui a d? maintenir beaucoup plus long-temps l'opinion primitive sur le syst?me du monde.

Mais, depuis que ces proportions ont commenc? ? ?tre g?om?triquement appr?ci?es, l'ensemble des notions sur lesquelles reposait une telle opinion a pris un caract?re absolument inverse, qui a d? provoquer de plus en plus la formation de la conception copernicienne. Quand il a ?t? une fois bien constat? que la terre n'est qu'un point au milieu des intervalles c?lestes, et que ses dimensions sont extr?mement petites comparativement ? celles du soleil et m?me de plusieurs autres astres de notre monde, il est devenu absurde d'en faire le centre de divers mouvemens, et surtout l'immense rotation journali?re du ciel a aussit?t impliqu? une contradiction choquante. ? la v?rit?, les astres ext?rieurs ? notre syst?me seront r?put?s 24000 fois moins lointains, d'apr?s la le?on pr?c?dente, en n'admettant point la circulation annuelle de la terre: mais leurs distances n'en cesseraient pas d'?tre immenses, et beaucoup plus grandes que celle du soleil; ce qui doit, en outre, leur faire attribuer certainement des volumes au moins analogues. D?s lors, la prodigieuse vitesse que devraient avoir tous ces grands corps pour d?crire en un jour, autour de la terre, des cercles d'une telle immensit?, devient ?videmment inadmissible, surtout quand on reconna?t que, pour l'?viter, il suffit en laissant tout ce syst?me immobile, d'attribuer ? la terre un tr?s petit mouvement, qui n'exc?de point, m?me ? l'?quateur, le mouvement initial d'un boulet de 24. Cette consid?ration est puissamment fortifi?e en pensant, sous le point de vue m?canique, ? l'?normit? de la force centrifuge qui r?sulterait de mouvemens aussi ?tendus et aussi rapides, et qui exigerait continuellement, de la part de la terre, imperceptible comparativement ? l'univers, un effort ?videmment impossible, pour emp?cher ces masses immenses de poursuivre ? chaque instant leur route suivant la tangente, tandis que la rotation de la terre d?termine seulement une force centrifuge presque insensible, ais?ment surmont?e par la pesanteur, dont elle n'est, m?me ? l'?quateur, que la deux cent quatre-vingt-neuvi?me partie.

Une seconde preuve fondamentale, ind?pendante de la connaissance des intervalles et des dimensions, se tire de l'existence des mouvemens propres. Il a suffi de voir les astres passer les uns devant les autres pour ?tre assur? qu'ils sont in?galement ?loign?s; ensuite, l'observation des mouvemens particuliers aux diff?rentes plan?tes, en sens contraire du mouvement g?n?ral du ciel, et selon des directions et des p?riodes fort distinctes, a constat? que tous les astres ne tenaient point ensemble. Or, il ?tait ?videmment impossible de concilier cette ind?pendance avec la liaison si ?troite qu'exigeait l'harmonie fondamentale du mouvement diurne, o? l'on voyait le ciel tourner tout d'une pi?ce. Aristote et Ptol?m?e avaient ?t? in?vitablement conduits, pour ?tablir cette conciliation, ? construire l'hypoth?se si compliqu?e, quoique ing?nieuse, d'un syst?me de cieux solides et transparens, qui pr?sente d'ailleurs tant d'absurdit?s physiques. Mais la simple connaissance de certains astres, comme les com?tes, qui passent successivement dans toutes les r?gions c?lestes, aurait suffi seule ? d?truire tout ce p?nible ?chafaudage, qui, suivant l'ing?nieuse expression de Fontenelle, exposait ainsi l'univers ? ?tre cass?. Il est singulier que ce soit Tycho-Brah?, le plus illustre antagoniste de la d?couverte de Copernic, qui ait ainsi fourni un des argumens les plus sensibles contre sa propre opinion, en ?bauchant, le premier, la vraie th?orie g?om?trique des com?tes.

Depuis que la propagation des saines doctrines m?caniques a fait ainsi dispara?tre la seule difficult? qui s'oppos?t r?ellement ? l'admission de la rotation de la terre, on a cherch?, dans l'examen plus approfondi de ces m?mes ph?nom?nes de chute, une confirmation directe et terrestre de l'existence de ce mouvement. Il est clair, en effet, qu'un corps en tombant du sommet d'une tour tr?s ?lev?e, doit avoir une l?g?re vitesse initiale horizontale dans le sens de la rotation terrestre, d'apr?s le petit exc?s de la vitesse du sommet sur celle du pied, ? raison de son cercle diurne un peu plus grand. Le corps, ainsi lanc? comme un projectile, retombe donc n?cessairement un peu ? l'est du pied de la tour; et la quantit? de cette d?viation est ais?ment calculable, du moins en n?gligeant la r?sistance de l'air, en fonction de la hauteur de la tour et de sa latitude. Si cet ?cartement ?tait plus grand, on aurait l? un moyen exp?rimental tr?s pr?cieux de d?montrer la rotation terrestre. Mais il est malheureusement trop petit, ? l'?gard m?me de nos ?difices les plus ?lev?s, pour que l'exp?rience soit vraiment d?cisive, ? cause de l'impossibilit? presque absolue, quelques pr?cautions qu'on ait prises, de laisser tomber le corps sans qu'il re?oive aucune petite impulsion, comparable ? celle dont on veut appr?cier l'effet. N?anmoins, cette ing?nieuse exp?rience, tent?e en divers lieux au commencement de ce si?cle, a g?n?ralement donn? une d?viation dans le sens convenable, quoique sa valeur n'ait pu ?tre celle que la th?orie avait assign?e; ce qui fait esp?rer qu'on pourra plus tard, en choisissant des conditions plus favorables, parvenir ? la compl?ter. Il est regrettable qu'on ne l'ait point essay?e ? l'?quateur, o? l'?cartement doit avoir plus d'?tendue qu'en aucun autre lieu.

Afin d'obtenir des preuves terrestres vraiment incontestables de la r?alit? de notre rotation, il faut consid?rer l'influence de la force centrifuge qui en r?sulte n?cessairement, pour alt?rer la direction naturelle et surtout l'intensit? propre de la pesanteur.

Passons maintenant ? la consid?ration sp?ciale du mouvement de translation de la terre, dont l'existence ne peut ?tre constat?e, comme nous l'avons remarqu?, que par des preuves astronomiques, ? cause de la diff?rence tout-?-fait insensible de la vitesse des divers points de la terre en vertu de ce mouvement, qui ne saurait donc exercer la moindre influence sur nos ph?nom?nes terrestres.

La seule position exacte de la question ?tablit d'abord une analogie puissante en faveur de la th?orie copernicienne, puisque la circulation de toutes les autres plan?tes autour du soleil avait ?t? d?j? constat?e par Tycho lui-m?me, le syst?me ancien proprement dit ?tant ainsi d?finitivement ?cart? de la discussion, qui s'est d?s lors trouv?e r?duite ? examiner si la terre circule aussi ? son rang, comme V?nus, Mars, Jupiter, etc., ou bien si le soleil, centre reconnu de tous les mouvemens plan?taires, parcourt annuellement l'?cliptique autour de la terre immobile. Par ce simple ?nonc?, tout esprit impartial est, ?videmment, port? ? pr?sumer que le vrai motif de cette ind?cision tient uniquement ? la situation de l'observateur, qui, plac? sur quelque autre plan?te, en e?t fait sans doute aussi le centre g?n?ral des mouvemens c?lestes.

Ici, comme ? l'?gard de la rotation, il est d'abord ?vident que les apparences ne peuvent rien d?cider. Car, en ?tant la terre du centre de l'?cliptique pour y mettre le soleil, il suffit de placer la terre en un point de cette orbite diam?tralement oppos? ? celui qu'occupait le soleil auparavant; et d?s lors, sans rien changer au sens du mouvement, l'observateur terrestre apercevra continuellement le soleil dans la m?me direction que ci-devant. En regardant le mouvement annuel de la terre comme n'alt?rant point le parall?lisme de son axe de rotation, toute l'explication des ph?nom?nes relatifs aux saisons et aux climats, ?tant reprise sous ce point de vue, donnera, ?videmment, les m?mes r?sultats que dans l'ancien syst?me. Tous les ph?nom?nes les plus sensibles du ciel sont donc exactement les m?mes pour les deux hypoth?ses. Ainsi, c'est uniquement dans des comparaisons plus d?licates et plus d?tourn?es, fond?es sur des observations plus approfondies, qu'il faut chercher des motifs de prononcer entre elles, en consid?rant des ph?nom?nes qui conviennent beaucoup mieux ? l'une qu'? l'autre, ou m?me, comme on en a d?couvert, qui soient absolument incompatibles avec le syst?me ancien, et math?matiquement en harmonie avec le syst?me moderne. Si l'on ne voulait point distinguer, ? cet ?gard, entre les preuves directes et indirectes, il faudrait, pour ainsi dire, envisager l'ensemble des ph?nom?nes c?lestes, tant m?caniques que g?om?triques; car il n'en est presque aucun qui ne puisse fournir indirectement une confirmation sp?ciale du mouvement de notre plan?te, dont l'influence doit, en effet, se faire sentir naturellement dans toutes nos explorations astronomiques. Mais il ne saurait ?videmment ?tre question, en ce moment, que des preuves les plus directes. Je crois devoir les r?duire ? trois principales, que je vais successivement consid?rer dans l'ordre croissant de leur validit? logique; elles se tirent de l'examen des ph?nom?nes: 1?. de la pr?cession des ?quinoxes, modifi?e par la nutation de l'axe terrestre; 2?. des apparences stationnaires et r?trogrades que pr?sentent les mouvemens plan?taires; 3?. enfin, de l'aberration de la lumi?re, d'o? l'on a d?duit la d?monstration la plus d?cisive et la plus math?matique.

En comparant deux catalogues d'?toiles dress?s ? des ?poques diff?rentes, on remarque, dans les positions de tous ces astres, une variation tr?s singuli?re et croissante avec le temps, qui ne semble assujettie ? aucune loi, quand on se borne ? envisager les ascensions droites et les d?clinaisons. Mais, si l'on en d?duit les longitudes et les latitudes, on reconna?t aussit?t que les derni?res n'ont ?prouv? aucun changement, et que les premi?res ont subi une modification commune, consistant dans une augmentation g?n?rale d'environ cinquante secondes par an, qui se continue ind?finiment avec uniformit?. Cette importante d?couverte fut faite par Hipparque, d'apr?s la diff?rence de deux degr?s qu'il aper?ut entre ses longitudes d'?toiles et celles qui r?sultaient des observations d'Aristille et Timocharis un si?cle et demi auparavant. La pr?cision des observations modernes permet de v?rifier ce fait g?n?ral par des comparaisons beaucoup plus rapproch?es, et m?me d'une ann?e ? l'autre. Ce ph?nom?ne ?quivaut ?videmment ? une r?trogradation des points ?quinoxiaux sur l'?cliptique contre l'ordre des signes; d'o? vient sa d?nomination habituelle, ? cause de l'avancement continuel d'environ vingt minutes, qui en r?sulte n?cessairement chaque ann?e pour l'?poque des ?quinoxes.

Cette pr?cession des ?quinoxes ne pouvait ?tre con?ue, dans l'hypoth?se de la terre immobile, qu'en faisant tourner l'univers tout d'une pi?ce autour des p?les de l'?cliptique en vingt-cinq mille neuf cent vingt ans, en m?me temps qu'il tournait chaque jour, en sens contraire, autour des p?les de l'?quateur. Aussi Ptol?m?e avait-il imagin?, ? cet effet, un ciel de plus. Au lieu de cette complication inintelligible, il suffit, au contraire, en admettant le mouvement de la terre, d'alt?rer le parall?lisme de son axe de rotation d'une quantit? presque insensible; car, le ph?nom?ne sera compl?tement repr?sent?, si l'on fait tourner lentement cet axe, pendant cette longue p?riode, autour de celui de l'?cliptique, en formant avec lui un angle constant.

La consid?ration de ces ph?nom?nes du point de vue m?canique rend beaucoup plus frappant le contraste des deux syst?mes ? ce sujet. Car, ces l?g?res alt?rations du parall?lisme de l'axe terrestre sont, d'apr?s la th?orie de la gravitation, une simple cons?quence n?cessaire et ?vidente, comme je l'indiquerai plus tard, de l'action du soleil, et surtout de la lune, sur le renflement ?quatorial de notre globe, suivant le beau travail de D'Alembert, qui explique compl?tement, non-seulement la nature, mais encore la quantit? exacte de ces deux perturbations.

Voil? donc une premi?re classe de ph?nom?nes qui, sans ?tre absolument inconciliables avec l'ancien syst?me du monde, s'accordent infiniment mieux avec le mouvement de la terre, m?me en se bornant ? les envisager sous le rapport g?om?trique, comme nous devons le faire actuellement.

On a justement compar? ces ph?nom?nes aux apparences que pr?sente journellement un bateau, descendant une large rivi?re, ? un observateur qui la descend aussi de son c?t?, sans avoir conscience de son mouvement; et d'o? il r?sulte que le mouvement de ce bateau semble direct, stationnaire, ou r?trograde, selon que sa vitesse est sup?rieure, ?gale, ou inf?rieure ? celle de l'observateur. Nous concevons en effet, que le mouvement de notre globe doit nous faire continuellement apercevoir chaque plan?te au point de son orbite o? elle se trouverait en lui imprimant, en sens contraire, une vitesse ?gale ? la n?tre. Cela pos?, ? partir du moment o? la plan?te quelconque est le plus pr?s de nous, afin que les deux mouvemens soient exactement dans le m?me sens, cette correction la fera ?videmment para?tre r?trograde pendant un temps plus ou moins long d?pendant des vitesses et des distances relatives, jusqu'? ce que sa direction se trouve suffisamment chang?e, par la continuit? de sa propre circulation, pour que son mouvement apparent redevienne direct, comme il l'est le plus souvent. Il est d'ailleurs ?vident que, suivant la r?gle ordinaire de tous les ph?nom?nes qui changent de signe, il y aura, vers la fin et vers le renouvellement de la r?trogradation, un instant o? la plan?te para?tra sensiblement stationnaire dans le ciel. Toutes les parties du ph?nom?ne, l'?poque et la dur?e de la r?trogradation, l'?tendue de l'arc qu'elle embrasse et la position de ses points extr?mes, peuvent ?tre exactement calcul?es d'apr?s la distance de la plan?te au soleil et la dur?e de sa r?volution, compar?es au mouvement de la terre. On peut, dans ce cas, simplifier beaucoup le calcul, sans aucun inconv?nient r?el, en supposant tous les mouvemens circulaires et uniformes, et m?me dans le plan de l'?cliptique. Les r?sultats doivent ?videmment pr?senter de grandes diff?rences, suivant les diverses plan?tes. Leur comparaison g?n?rale montre que la dur?e absolue de la r?trogradation augmente ? mesure qu'on s'?loigne du soleil; mais que, relativement au temps p?riodique de la plan?te, elle diminue, au contraire, tr?s rapidement et de plus en plus. Or, l'observation directe de ces ph?nom?nes v?rifie, d'une mani?re remarquable, toutes ces cons?quences de la th?orie du mouvement de la terre, m?me quant ? leur valeur num?rique.

Ces apparences si simples n'avaient pu ?tre expliqu?es, dans l'ancien syst?me, qu'en faisant mouvoir chaque plan?te sur la circonf?rence d'un cercle id?al, dont le centre parcourait l'orbite effective. On con?oit que, ces deux mouvemens se trouvant ?tre tant?t conformes et tant?t contraires, il ?tait possible, en disposant convenablement du rayon arbitraire de cet ?picycle et du temps fictif de la r?volution correspondante, de repr?senter, jusqu'? un certain point, la r?trogradation et la station de chaque plan?te. Cette conception, qu'il faut juger comme subordonn?e ? l'ancien syst?me, ?tait sans doute fort ing?nieuse. Mais, malgr? toutes les ressources arbitraires qu'on s'y ?tait m?nag?, elle ne satisfaisait que d'une mani?re tr?s vague aux ph?nom?nes m?mes qui l'avaient provoqu?e, et elle ?tait manifestement contraire ? la v?ritable nature des orbites plan?taires, comme nous le verrons dans la le?on suivante. Ainsi, ind?pendamment de son absurdit? physique, elle ne pouvait ?videmment soutenir ? cet ?gard la moindre concurrence, avec la th?orie de Copernic, qui a rendu ces ph?nom?nes tellement simples et vulgaires, que les astronomes ne s'en occupent plus aujourd'hui. On n'avait pas m?me tent? d'y expliquer la circonstance la plus frappante que pr?sentent les r?trogradations plan?taires, leur co?ncidence invariable avec l'?poque de l'opposition, s'il s'agit d'une plan?te sup?rieure, ou de la conjonction inf?rieure, ? l'?gard des deux autres plan?tes, ce qui, au contraire, r?sulte, au premier coup d'oeil, de l'explication moderne.

Le mouvement annuel de la terre pourrait donc ?tre regard? comme suffisamment constat? par cette seconde classe de ph?nom?nes, qui faisait en effet la principale force de l'argumentation des coperniciens avant K?pler et Galil?e. N?anmoins, comme elle peut ? la rigueur se concilier, jusqu'? un certain point, avec l'ancien syst?me du monde, quelque ?trange et imparfaite qu'y soit son explication, l'astronomie moderne, dans l'admirable s?v?rit? de sa m?thode, ne proclame aujourd'hui, comme une vraie d?monstration math?matique du mouvement de la terre, que celle qui r?sulte de l'analyse exacte des ph?nom?nes si vari?s de l'aberration de la lumi?re, absolument incompatibles avec l'immobilit? de notre globe, et si parfaitement d?duits au contraire par le grand Bradley de la th?orie copernicienne; quoique, d'ailleurs, cette th?orie se trouv?t d?j? g?n?ralement admise par les astronomes, quand ces ph?nom?nes furent d?couverts. Telle est la troisi?me consid?ration fondamentale, qui me reste ? indiquer ici, au sujet du mouvement de la terre.

Il est pr?alablement indispensable d'examiner comment l'astronomie parvient ? mesurer la vitesse avec laquelle la lumi?re se propage.

Les distances terrestres sont beaucoup trop petites pour que le proc?d? qui permet d'estimer, par des observations directes, la dur?e de la propagation du son, puisse ?tre jamais applicable ? la lumi?re, dont le mouvement est tellement rapide qu'on ne saurait constater, quelques pr?cautions qu'on ait prises, la moindre diff?rence perceptible entre l'instant o? la lumi?re est ?mise en un certain lieu et le moment o? elle est vue d'un autre lieu aussi ?loign? que possible, quoique les deux ph?nom?nes ne soient pas sans doute exactement simultan?s. Mais la grandeur des espaces int?rieurs de notre syst?me solaire comporte, au contraire, une ?valuation tr?s pr?cise de cette vitesse. Toutefois, il semble au premier abord, que, quel que soit le temps employ? par la lumi?re ? nous venir des astres, il n'en doit r?sulter qu'un simple retard dans l'?poque que nous assignons ? chacune de leurs positions, ce qui n'exercerait aucune influence sur nos observations comparatives. C'est pourquoi ce temps ne peut ?tre aper?u et mesur? qu'en consid?rant des ph?nom?nes uniformes qui s'ex?cutent successivement ? des distances de la terre extr?mement in?gales, et qui, d?s lors, pr?senteront pour cette seule cause des diff?rences appr?ciables suivant les diverses situations. Tel est, en effet, le proc?d? imagin? par Ro?mer, auteur de cette immortelle d?couverte, que lui fournit l'observation comparative des ?clipses des satellites de Jupiter dans les situations oppos?es de cette plan?te ? l'?gard de la terre.

Le premier satellite, par exemple, est ?clips? par Jupiter toutes les quarante-deux heures et demie. Supposons que les tables en aient ?t? dress?es pour la moyenne distance de Jupiter ? la terre, qui a lieu lorsque Jupiter nous semble ? quatre-vingt-dix degr?s environ du soleil. En comparant ? cette situation moyenne l'?poque de l'opposition et celle de la conjonction, il est clair que l'apparition de l'?clipse aura lieu plus t?t dans le premier cas, et plus tard dans le second, ? cause du chemin moindre ou plus grand que la lumi?re devra parcourir. La confrontation des deux cas extr?mes d?termine le temps tr?s sensible employ? par la lumi?re ? d?crire le diam?tre de l'orbite terrestre, et il en est r?sult? qu'elle nous vient du soleil en huit minutes environ. L'observation des autres satellites, et, plus tard, celle des satellites de Saturne et m?me d'Uranus, ont fourni ? cet ?gard de nombreux moyens de v?rification, qui, d'ailleurs, ont constat? l'exacte uniformit? du mouvement de la lumi?re, du moins entre les limites de notre monde.

D'apr?s cette importante d?termination pr?liminaire, il devient ais? de concevoir comment le mouvement de la terre produit les ph?nom?nes de l'aberration de la lumi?re dans les ?toiles et dans les plan?tes.

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