Read Ebook: L'Illustration No. 3655 15 Mars 1913 by Various
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Ebook has 174 lines and 19228 words, and 4 pages
L'Illustration, No. 3655, 15 Mars 1913
LA REVUE COMIQUE, par Henriot.
Ce num?ro comprend VINGT-QUATRE PAGES.--Il est accompagn? de LA PETITE ILLUSTRATION, S?rie-Roman n? 2, contenant la deuxi?me partie du roman de M. Marcel Pr?vost: LES ANGES GARDIENS.
COURRIER DE PARIS
LES MAISONS EN CONSTRUCTION
De deux fen?tres ?loign?es l'une de l'autre, situ?es chacune ? une extr?mit? de mon appartement, celle-ci au nord, celle-l? au midi, de la fen?tre de ma chambre et de celle de mon cabinet, je vois construire deux maisons.
Je les regarde s'?lever ? la place m?me o? l'an dernier se tenaient, si droites encore, celles que j'ai vu jeter ? bas, dont il ne reste plus trace que dans mon souvenir, et peut-?tre dans celui des hommes qu'elles ont abrit?s. Et ces deux maisons, je ne sais pourquoi, occupent ma vie. Si ce n'est que toutes les deux elles sont <
Ces deux maisons, qui sont s?par?es par tout un p?t? d'immeubles, et qui, par cons?quent, ne peuvent pas <
D?s sept heures ils commencent ? arriver. Ils sont m?thodiques, pr?cis et lents. Chacun sa besogne. Il y a ceux qui g?chent, ceux qui coupent le fer, ceux qui le tordent et l'assemblent, ceux qui manient la truelle avec cette souplesse et cette virtuosit? de poignet dont nous demeurons confondus, ceux qui piochent ? toute vol?e, ? bout de bras, comme s'il s'agissait de d?foncer un couvercle de coffre-fort, ceux qui, inclin?s en oblique, poussent l? grosse brouette, ou qui, pliant sur leurs jambes nerveuses et nues dans les culottes flottantes de vieux velours aux inconcevables reflets, raclent et ramassent ? larges pellet?es les gravats pour les lancer en paquets dans le tombereau, ? la petite place o? ils veulent. Ils poursuivent tous leur t?che avec ordre et sans vaine fi?vre.--<
D'autres camarades, qui, sans doute, n'ont point de femmes ou qui, d'humeur ind?pendante, n'aiment pas que le sexe s'occupe d'eux, se rassemblent par petits groupes pour faire la collation. Malins comme des soldats, ils improvisent des cuisines en plein vent, coupent du menu bois, allument des feux entre les pierres, accroupis tout autour ? la zouave. Et cette copieuse s?ance dure une bonne demi-heure, si ce n'est plus. Apr?s quoi, le travail reprend. Et voil? de nouveau mes hommes repartis entre les piliers de boue, d'o? pointent les tiges de fer...
D?cid?ment, s'il me fallait choisir, pour y demeurer, entre les deux maisons que l'on b?tit sous mes yeux, ce n'est pas dans celle du b?ton que j'?lirais domicile. Plut?t dans l'autre, dans celle en pierre, qui me sourit. Sa couleur d'abord, app?tissante, blanche, nacr?e et jaune ? la fois, sa couleur de chair et de rose-th? ne chagrine pas, semble faite pour r?jouir la lumi?re. Et puis, cette maison-l? est logique, traditionnelle. Elle est ?lev?e selon les vieilles r?gles. Comme autrefois, comme toujours, depuis que la pierre est pierre, les blocs sont apport?s tout taill?s, d?grossis et num?rot?s. On les passe dans leurs quatre attelles et ils sont hiss?s un peu de travers, en tournant, ? l'aide de la m?canique imperturbable et s?re que manoeuvrent longtemps, sans s'impatienter, les deux hommes au torse d'Ixion, comme s'ils avaient ? tirer de l'eau d'un puits tr?s profond!... Seulement, au lieu de faire monter un seau d'eau fra?che, il s'agit d'envoyer doucement et d'aller poser, ? la hauteur d'un troisi?me ?tage, un f?tu de 400 kilos. Quel plaisir on ?prouve ? voir tous les morceaux de ce jeu d'architecture se placer et s'ajuster pour ainsi dire d'eux-m?mes, l? o? il le faut, les uns au-dessus des autres! La maison a l'air de se b?tir toute seule comme si les ouvriers n'?taient l? que pour surveiller les pierres, les mat?riaux, anim?s d'une vie intelligente. Et cette impression est si vive qu'il m'arrive chaque matin de m'?tonner que la maison soit au m?me point que la veille au soir. Je ne serais pas le moins du monde surpris qu'elle e?t continu? la nuit, qu'elle e?t avanc? par ses propres moyens, m?me quand les hommes sont partis se coucher.
Mes maisons me procurent d'autres pens?es, d'une ind?finissable m?lancolie dans leur banalit?.
Elles me font songer que j'ai pu voir, que j'ai vu le sol, invisible ? pr?sent et pour combien d'ann?es, o? elles ont pris racine, qu'elles couvrent d?sormais ainsi qu'un monument fun?raire. Elles me font songer ? ceux qui ont v?cu sur cet ?troit espace, qui sont aujourd'hui Dieu sait o?, dispers?s ou morts, ? ceux qui viendront demain au m?me endroit croire qu'ils s'y fixent dans le repos, et qu'ils y sont ? l'abri... Et ce sont eux qui, tr?s probablement, d'en face, verront ? leur tour, ? un moment que je ne sais pas, d?molir la maison o? je suis, o? je me crois garanti de durer. O? serai-je, moi, ce jour-l??... D?m?nag?? Ou bien...?
HENRI LAVEDAN.
SARAH BERNHARDT
CHEZ LES PRISONNIERS CALIFORNIENS
San-Francisco, 22 f?vrier 1913.
Les Californiens sont enclins ? l'indulgence. La beaut? des sites de leur pays, la douceur du climat, les jardins fleuris qui po?tisent leurs demeures, tout aide ? d?velopper chez eux <
Pour la f?te de Washington, ce 22 f?vrier, les autorit?s californiennes avaient demand? ? Sarah Bernhardt, en tourn?e ? San-Francisco juste ? ce moment-l?, de vouloir bien jouer devant les pensionnaires de Saint-Quentin. Toujours g?n?reuse, notre grande trag?dienne avait accept?, et elle avait eu l'amabilit? de m'inviter ? cette excursion pittoresque. J'avais accept?, comme on pense, avec empressement, car le spectacle promettait d'?tre infiniment curieux. Sarah Bernhardt jouant exclusivement pour deux mille d?tenus et une douzaine de condamn?s ? mort, voil? une manifestation qui valait la peine d'?tre vue!
Apr?s de nombreux d?tours dans la vall?e, nous apercevons la maison d'arr?t. On dirait un vaste ch?teau fort gard? par une s?rie de kiosques sur?lev?s, dans lesquels sont plac?s des gardiens pr?ts ? fusiller les fugitifs. D?s que l'on p?n?tre sur les terrains du p?nitencier, cette impression s?v?re s'adoucit, car le ch?teau fort est entour? de paisibles jardins potagers, de tennis-courts, de parterres multicolores et de vertes pelouses. Les premiers prisonniers que nous rencontrons, ras?s de frais, d?cemment habill?s dans leur uniforme de laine blanche ? larges raies noires, ont un air de prosp?rit? qui emp?che qu'on ne s'apitoie par trop sur leur sort.
Quand soudain le rideau se l?ve, une formidable acclamation retentit. Sarah, en Marion la vivandi?re, incarne si bien la g?n?rosit? et la vaillance fran?aises! Un groupe de d?tenus fran?ais crie ? pleins poumons: <
Madame,
Dans cette vie la plupart de nous sont, ? l'ext?rieur aussi bien qu'? l'int?rieur des murs d'une prison, prisonniers, prisonniers au moins de notre entourage. A de rares intervalles seulement nous est-il donn? d'?tre absolument libres. Pour ceux qui sont enferm?s entre des murs mena?ants, derri?re des grilles de fer formidables, ces intervalles sont, actuellement et ? jamais dans l'avenir , vraisemblablement bien ?loign?s. Mais, aujourd'hui, pour une petite heure, ces murs de pierre se sont ?vanouis. Pour une heure, gr?ce ? votre merveilleuse personnalit? et votre art enchanteur, nous avons ?t?, en ?me et en esprit, dans une libert? parfaite, captifs seulement de ce g?nie remarquable et de cette ardeur incomparable qui, ? juste titre, vous ont gagn? le nom de <
Nous appr?cions aussi profond?ment votre choix de la pi?ce, non seulement ? cause de sa beaut? intrins?que et de l'art qu'elle renferme, mais aussi parce qu'elle exalte, par ses ?lans puissants, une humanit?, et la solidarit? des ?mes, qui ne connaissent aucunes bornes, ni de parti, de factions, ou de politique. De plus, nous vous remercions particuli?rement que vous ayez jug? ? propos de nous pr?senter une oeuvre du g?nie de votre fils. En ce choix, nous voyons non seulement votre t?moignage de l'amour et des pens?es d'une m?re, mais aussi en toute probabilit? la r?flexion dans votre coeur que nous aussi avons des m?res qui nous ch?rissent, ? qui notre amour se porte, et dans les coeurs desquelles nous avons ?t? une esp?rance et un orgueil. Nous souhaitons, et pour vous et pour lui, beaucoup d'ann?es de joie et contentement mutuels.
Nous prions aussi, Madame, par votre interm?diaire, d'exprimer ? vos artistes et ? votre g?rance, notre chaleureuse appr?ciation de leur bont? et de leur talent. Et quand, dans l'avenir, vos pens?es se porteront vers ce pays du soleil couchant, pour nous aujourd'hui si brillant par votre bonne volont?, nous esp?rons que ces quelques paroles d'admiration sinc?re et de reconnaissance serviront ? vous rappeler cette heure, peut-?tre de toutes en votre vaste exp?rience, la plus ?trange et la plus frappante,--une heure dans un entourage s?v?re et m?me repoussant, oubli? par nous pour le moment gr?ce ? votre personnalit?,--une heure dans laquelle vous avez rendu cette multitude de malheureux, plus heureux, adouci les lignes de leurs vies et rendu leurs cours plus l?gers, par votre pr?sence dans notre milieu aujourd'hui.
De la part de
TOUS LES PRISONNIERS.
San Quentin, Californie, ce 22 f?vrier 1913.
L'orateur qui avait lu le compliment de circonstance, apr?s lui en avoir remis le texte, soigneusement calligraphi? par lui-m?me, demanda ? Sarah Bernhardt de lui baiser la main. Elle acquies?a gentiment, et une indescriptible ovation la remercia de ce geste. Sur cet incident se termina cette peu banale manifestation.
Ayant regagn? son auto, la grande trag?dienne, heureuse d'avoir apport? de la joie ? ce monde bizarre de prisonniers, me confia que c'?tait l? une des aventures les plus ?tonnantes de sa vie de com?dienne:
--J'ai ?prouv? une sensation inou?e, me dit-elle, en voyant fix?s sur moi avec un ?clat ?trange ces milliers d'yeux dont beaucoup ne verront plus la lumi?re de la libert? et dont certains seront avant peu obscurcis par la mort. Si vous saviez comme c'est bon d'avoir pu donner un peu d'illusion ? ces gens pendant quelques instants! Il faudra que je note cela dans mes M?moires...
La relation que Sarah Bernhardt ?crira elle-m?me de son voyage ? Saint-Quentin sera sans aucun doute l'un des chapitres les plus ?mouvants de son autobiographie. Elle la compl?te ? ses moments perdus, et il faut souhaiter qu'elle la livre bient?t au public pour qu'on y lise le r?cit de cette journ?e si originale du 22 f?vrier pass?e parmi les prisonniers californiens de Saint-Quentin.
FRAN?OIS DE TESSAN.
Dans l'apr?s-midi de dimanche dernier, la manifestation traditionnelle de la jeunesse des ?coles ? la statue de Strasbourg a eu lieu au milieu d'une affluence exceptionnelle et avec un calme, une pi?t? silencieuse, qui lui ont donn? un aspect impressionnant. Les ?tudiants avaient on effet r?solu de conserver ? cette manifestation, d'o? devait ?tre exclu tout geste politique, un caract?re exclusivement patriotique et national. Lorsque, ? deux heures, le cort?ge se forma sur la place de la Sorbonne, les ?tudiants ?taient au nombre de trois ? quatre mille. L'un d'eux, en t?te, portait un grand drapeau tricolore cravat? de cr?pe. Puis venaient les d?l?gu?s des diverses organisations, r?publicaine, jeune-r?publicaine, pl?biscitaire, nationaliste, et des universit?s de province, notamment de Bordeaux. Huit ?tudiants suivaient, porteurs de deux grandes couronnes endeuill?es de cr?pe et coup?es par un large ruban tricolore. Derri?re, marchait la foule des ?l?ves ou des aspirants aux ?coles militaires, le bonnet de police sur l'oreille, et des ?tudiants des diverses facult?s avec leurs b?rets aux couleurs distinctives. La longue colonne gagna, par la rue de Rivoli, en saluant la statue de Jeanne d'Arc, la place de la Concorde. Les couronnes et le drapeau furent d?pos?s sur le socle de la statue de Strasbourg, devant laquelle les jeunes gens d?fil?rent ensuite, pieusement recueillis.
LE TRICENTENAIRE DES ROMANOF
Il y a encore, en Russie, du loyalisme pour le tr?ne, un loyalisme ardent et mystique, un loyalisme populaire des faubourgs des villes et des immensit?s rurales, qui a donn?, ces derniers jours, ? l'occasion du tricentenaire des Romanof, ? c?t? du loyalisme officiel, militaire, aristocratique ou bourgeois, sa mesure ?loquente et profonde.
Les f?tes de ce Jubil? exceptionnel ont commenc? le 6 mars, au milieu de l'enthousiasme national et dans une sorte d'extase religieuse, car, seul maintenant en Europe o? le sultan ne compte plus gu?re, le monarque russe, chef d'?glise, ? la fois empereur et pape, conserve un caract?re sacr?.
Le 6 mars donc, il y a eu exactement trois cents ans que le Zemski-Sobor, ou assembl?e nationale russe, offrit, apr?s une longue p?riode d'anarchie, la couronne ? Michel Feodorovitch Romanof, fondateur de la dynastie qui s'est perp?tu?e sur le tr?ne et dont certains membres, illustres parmi les illustres, ont assur? la grandeur de l'empire et la magnifique expansion de la puissance russe.
En l'honneur de ces comm?morations historiques, le tsar Nicolas a d'abord publi? un ukase d'amnistie, impatiemment attendu, car le pr?c?dent d?cret de pardon datait de la naissance du prince h?ritier, c'est-?-dire de 1904. Un grand nombre de d?lits, et particuli?rement de d?lits politiques commis depuis cette ?poque, se sont donc trouv?s effac?s, et quelques nobles exil?s pourront d?s maintenant rentrer impun?ment dans leur patrie. Les condamn?s ? mort ont vu commuer leur peine en vingt ans de travaux forc?s et les prisons de Saint-P?tersbourg ont, d'un coup, lib?r? trois cents d?tenus. Dix millions ont ?t? accord?s ? la Finlande pour l'am?lioration de ses ?tablissements d'assistance et 50 millions de roubles ont ?t? donn?s ? la population rurale sur le produit de la vente des terres de l'empereur.
Toutes ces mesures, tr?s heureuses, tr?s opportunes, ont produit, sur les masses si profond?ment attach?es d'ailleurs ? la dynastie, la plus heureuse impression, et la communion entre le souverain et le peuple, au cours de ces grandioses journ?es, n'en a ?t? que plus ?troite.
A Saint-P?tersbourg, le tsar et le grand-duc h?ritier, qu'on ?tait ?mu et joyeux de voir repara?tre en public dans une voiture d?couverte, la tsarine, l'imp?ratrice douairi?re et toute la famille imp?riale se rendirent ? la cath?drale, en grand gala, pour assister au service d'actions de gr?ces. Et ce fut sur le passage du cort?ge imp?rial, dans les rues o? stationnait une foule ?norme, un v?ritable d?lire populaire. La circulation des voitures ?tait partout compl?tement interrompue. Les monuments ?taient richement d?cor?s et les ponts tellement transform?s par leur parure qu'ils semblaient reconstruits. Aux fen?tres, aux balcons, c'?taient des milliers d'oriflammes aux couleurs nationales et imp?riales, avec partout les blasons des Romanof. Des maisons disparaissaient enti?rement sous les draperies. La perspective Newsky ?tait tout enti?re d?cor?e dans le style empire. Le soir, Saint-P?tersbourg s'illumina de millions de lampes ?lectriques; des sc?nes d'histoire s'?voqu?rent sur des transparents lumineux et des cort?ges de patriotes parcoururent les avenues en chantant des hymnes nationaux et en portant des portraits de l'empereur.
Le lendemain, ? 4 heures, il y eut au Palais d'hiver, autour duquel continuait de se presser la foule, une grande r?ception imp?riale dans la salle de Malachite. L? se trouvaient r?unis tous les grands corps de l'?tat, avec de hauts dignitaires religieux d'Orient unis au tsar par le lien orthodoxe, le patriarche d'Antioche, le m?tropolite de Serbie. L? encore, on put voir, avec leur suite asiatique, des princes vassaux de la Russie, l'?mir de Boukhara, le khan de Khiva, et aussi des d?l?gu?s mongols.
La famille imp?riale au grand complet vint recevoir tous ces hommages, le tsar et le tsar?vitch portant l'uniforme des chasseurs de la garde avec le grand cordon de Saint-Andr?. Et le pr?sident de la Douma, M. Rodsianko, lorsque ce fut son tour de haranguer le souverain, employa le tutoiement des heures historiques. Son discours d?butait ainsi: <
Le 10 mars, les d?l?gations des paysans ont ?t? re?ues au palais et le tsar leur fit un accueil ?mouvant, embrassant les chefs de ces d?l?gations qui furent retenues ? d?ner.
LA C?L?BRATION DU TRICENTENAIRE DE LA DYNASTIE DES ROMANOF, A SAINT-P?TERSBOURG.
UN MOIS A P?KIN
Je vous ai d?j? dit que les chaises ? porteurs avaient presque compl?tement disparu de P?kin. J'en ai pourtant rencontr? ces jours-ci une, bien amusante, et tr?s ancien r?gime. Port?e par deux mules, elle longeait paisiblement la muraille de la ville imp?riale par-dessus laquelle un pavillon en ruines dressait, au milieu de la verdure, son toit aux tuiles d'or m?lang?es d'herbes folles. Un serviteur ? pied menait par la bride la mule de t?te tandis qu'un autre, ? cheval, fermait la marche. Le propri?taire, qui devait ?tre quelque rural ais? des environs, accroupi dans l'?troite caisse, fumait sa pipe, tr?s dignement.
Rien d'europ?en dans ce coin d?sert, pas un poteau t?l?graphique en vue; on aurait pu se croire dans le P?kin du temps de Kang Hi.
Comme je m'extasiais, un cycliste en robe lilas, tr?s jeune Chine, coiff? d'un ?l?gant canotier et chauss? de bottines jaunes, d?passa soudain ? toute p?dale l'antique ?quipage. Ce fut pour moi, durant une seconde, une saisissante vision r?sumant l'?tat actuel du vieil empire. Et, vraiment, la bicyclette et son cycliste ?taient en ce lieu quelque chose de choquant et de d?plac?; je ressentis une impression analogue ? celle que j'?prouve devant une belle chaumi?re ou un joli coin de paysage de chez nous souill? par quelque r?voltant panneau-r?clame.
Comme pendant ? ce croquis en voici un qui vous donnera l'aspect d'un autre P?kin, celui que les r?volutionnaires sont en train de nous fabriquer.
Dans ce tableau tout se tient: la vilaine gare, la rang?e des boutiques r?cemment d?pos?es le long du mur de Tien Men, les poteaux pour l'?clairage, le t?l?graphe et le t?l?phone, constituent un cadre bien digne de ce cort?ge et du Progr?s qu'il repr?sente.
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