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Read Ebook: Lettres à Madame Viardot by Halp Rine Kaminsky E Ely Annotator Turgenev Ivan Sergeevich

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Ebook has 763 lines and 55008 words, and 16 pages

Annotator: E. Halp?rine-Kaminsky

LETTRES

A MADAME VIARDOT

EUG?NE FASQUELLE, ?DITEUR, 11, RUE DE GRENELLE, PARIS

AUTRES OUVRAGES D'IVAN TOURGUENEFF

DANS LA BIBLIOTH?QUE-CHARPENTIER

? 3 fr. 50 le volume.

Paris.--L. MARETUEUX, imprimeur, 1, rue Cassette.--15203.

IVAN TOURGUENEFF

LETTRES

A MADAME VIARDOT

publi?es et annot?es par E. HALP?RINE-KAMINSKY

PARIS

BIBLIOTH?QUE-CHARPENTIER EUG?NE FASQUELLE, ?DITEUR 11, RUE DE GRENELLE, 11

Tous droits r?serv?s.

PR?FACE

Les lettres du grand ?crivain russe Ivan Sergue?evitch Tourgueneff ? Mme Pauline Viardot, l'illustre cantatrice, ont leur histoire.

?gar?es ou d?rob?es, au moment o? la guerre de 1870 obligea la famille Viardot ? quitter Bade pour Londres, ces lettres ont ?t? retrouv?es plus d'un quart de si?cle apr?s.

Naturellement, Mme Viardot d?sirait rentrer en possession de documents dont elle ne s'?tait jamais volontairement dessaisie, et auxquels elle avait tous les droits moraux et juridiques. D'autre part, les motifs qu'avan?ait le possesseur actuel pour garder les lettres n'?taient pas sans valeur non plus. Il avait trouv? le pr?cieux paquet--parmi des papiers peu importants--dans une caisse qu'il avait achet?e ? un bouquiniste de Berlin; celui-ci, ? son tour, l'avait acquise de la veuve d'un m?decin fran?ais, para?t-il; ici, s'arr?te mon investigation sur l'origine de la caisse.

Quoi qu'il en soit, le dernier acqu?reur, admirateur d?vou? de Tourgueneff, se fit un devoir de conserver comme un d?p?t sacr? la correspondance que le hasard mettait entre ses mains jusqu'au jour o? il pourrait la rendre publique, et il estimait que ce jour ne pourrait venir qu'apr?s la mort de la destinataire des lettres.

Comme, en d?finitive, le possesseur des lettres ?tait moins pr?occup? d'une question p?cuniaire que du d?sir d'entourer cette publication de meilleures conditions litt?raires possibles, je finis par le persuader des avantages r?els qu'il y aurait ? la faire du vivant et sous les auspices de la c?l?bre artiste.

C'est ainsi qu'apr?s deux ans de pourparlers je pus obtenir la restitution de tout le paquet des lettres, dat?es de 1846 ? 1871, et que j'?dite avec l'autorisation et sous le contr?le de Mme Viardot.

Une partie de ce qui nous a ?t? livr? para?t seulement. Par une r?serve ? mon avis excessive, Mme Viardot ne laisse passer que les pages ayant, non seulement un attrait public indiscutable, mais encore contenant le moins d'appr?ciations flatteuses pour la cr?atrice, universellement admir?e, de tant de personnages de l'imagination lyrique; elle ?carta aussi des passages, des lettres enti?res, ?maill?s de saillies spirituelles, jamais m?chantes, contre des personnes connues, ou sem?s de d?tails d'un caract?re priv?.

Pour moi, qui ai lu le tout, presque tout serait ? donner. Rien, en effet, qui ne soit attachant dans l'?change suivi de pens?es entre ces natures d'artistes, li?es d'amiti? et de sympathie intellectuelle. C'est un v?ritable journal intime, ?crit ? l'intention d'une ?me soeur, commenc? ? l'?ge d'homme et termin? seulement ? la mort de l'auteur.

Tourgueneff rencontra pour la premi?re fois M. et Mme Viardot ? Saint-P?tersbourg en 1843: il ?tait ? peine ?g? de vingt-cinq ans. Je l'ai dit ailleurs: M. Viardot, qui avait pr?c?demment s?journ? en Russie, cherchait ? familiariser les Fran?ais avec les chefs-d'oeuvre de la litt?rature russe. Il ?tait connu par de savantes ?tudes d'art et de litt?rature ?trang?re. Mme Viardot, tr?s jeune encore,--elle avait vingt-deux ans,--?tait d?j? la c?l?bre cantatrice, acclam?e dans toutes les capitales de l'Europe. Ce couple d'artistes devait produire une vive et durable impression sur la nature esth?tique de Tourgueneff.

Cette petite fille ?tant tr?s malheureuse en Russie, Tourgueneff se confia ? Mme Viardot, qui lui conseilla de la faire venir et prit soin de son ?ducation.

Sauf ses rares visites ? P?tersbourg, ? Moscou ou ? sa propri?t? de Spassko??, l'?crivain russe, depuis 1847, ne cessa d'habiter la France. Mais qu'il s'en aille seulement ? Versailles, ? Courtavenel, ou reste ? Paris, en l'absence de Mme Viardot faisant ses tourn?es ? travers l'Europe, vite il note ses impressions et lui en fait part comme dans un journal intime.

E. HALP?RINE-KAMINSKY.

LETTRES

A MADAME VIARDOT

Saint-P?tersbourg, ce 8/20 novembre 1846.

J'ai h?te de r?pondre ? la bonne lettre que vous m'avez ?crite tous les deux, mes chers amis. Elle m'a fait un plaisir v?ritable, en me prouvant que vous n'avez pas chang? envers moi. Je vous remercie en m?me temps de tous les renseignements que vous me donnez sur votre vie pass?e et future. Si le sort ne m'est pas tout ? fait contraire, j'esp?re pouvoir faire un petit voyage en Europe l'ann?e prochaine, d?s le mois de janvier, si bien qu'il ne serait pas impossible que vous, Madame, ayez un spectateur de plus ? l'<>.

Vous prononcez bien l'allemand, vous ne le francisez pas;--au contraire, vous exag?rez un tant soit peu l'accentuation,--mais je suis s?r qu'avec votre application ordinaire vous avez d?j? fait dispara?tre ce l?ger d?faut.

Mon Dieu, comme j'aurais ?t? heureux de vous entendre cet hiver!... Il faudra que j'en vienne ? bout d'une mani?re ou d'une autre.

Dans la lettre que j'ai ?crite ? madame votre m?re, j'ai donn? quelques d?tails sur le th??tre d'ici, ce qui me dispense de revenir l?-dessus. Je pr?f?re vous f?liciter sur l'emploi de votre temps ? la campagne... Oui, certes, je suis bien curieux de voir de votre ouvrage... Patience!

Je n'ai pas encore re?u le petit livre de Viardot , mais je l'ai d?j? lu, et j'y ai retrouv? cet esprit sobre et fin, ce style ?l?gant et simple dont la tradition semble vouloir se perdre en France. A propos de litt?rature, le prince Karol du dernier roman de Mme Sand , para?t ?tre Chopin.

Je vous dirai que nous avons r?ussi ? fonder un journal ? nous, qui para?tra d?s la nouvelle ann?e et qui s'annonce sous des auspices tr?s favorables. Je n'y participe qu'en qualit? de collaborateur.

Mille--non--un million d'amiti?s ? tous les v?tres. Je crois que vous n'avez pas besoin de mes protestations d'amiti? et de d?vouement pour y croire; nous sommes d?j? de vieux amis, des amis de trois ans. Je suis et serai toujours le m?me; je ne veux pas, je ne puis pas changer.

Permettez-moi de vous serrer bien amicalement les mains; je fais les voeux les plus sinc?res pour votre bonheur.

A revoir, un beau jour; ah! je crois bien qu'il sera beau, ce jour-l?!

Louise n'est pas encore assez grande demoiselle pour se formaliser d'un gros baiser que je donne ? sa petite joue rondelette. Adieu, encore une fois.

Votre tout d?vou?,

YVAN TOURGUENEFF.

Paris, 19 octobre 1847.

Savez-vous, Madame, que vos charmantes lettres rendent la besogne tr?s difficile ? ceux qui ont pr?tendu ? l'honneur de correspondre avec vous? J'en suis d'autant plus embarrass? qu'une l?g?re indisposition m'ayant retenu dans ma chambre tous ces jours-ci, je ne puis vous envoyer, comme j'en avais l'intention, une petite revue de tout ce qui se passe ? Paris. Me voil? donc r?duit ? mes propres ressources, comme la M?d?e de Corneille. C'est fort inqui?tant.... Mais n'importe! je compte sur votre indulgence.... Ah! mais--sans plaisanter!--quelle abominable chose que l'abus de la parole! Voil? une phrase qui, ? force d'avoir ?t? r?p?t?e, ne veut plus rien dire; et quand on l'emploie tr?s s?rieusement, on s'expose ? n'?tre pas cru. Enfin! comme dit votre mari--je commence par le commencement.

Je commence par vous dire que nous sommes tous tr?s enchant?s de l'heureux commencement de vos p?r?grinations, et que nous attendons avec impatience les nouvelles de votre d?but. Nous voyons d'ici tomber les fleurs et nous entendons les bravos. H?las!... Vous savez ce que veut dire cet h?las!

Mendelssohn est donc mort. Ce que vous en avez dit dans votre lettre ? madame votre m?re nous a paru ? tous bien juste. Je ne le connais presque pas; d'apr?s ce que j'ai entendu de lui, je suis tout pr?t ? l'estimer,--beaucoup l'aimer... c'est une autre affaire. On ne fait de belles choses qu'avec le talent et l'instinct r?unis: avec la t?te et le coeur; j'ose croire que chez Mendelssohn la t?te pr?domine. Je puis me tromper... mais, du reste, vous savez que je ne tiens pas obstin?ment ? mes erreurs, quand on me met le nez dessus--ce qui n'est pas difficile, vu les proportions de cet organe. Je suis ?ducable.

Sur ce, Madame, je prie Dieu de vous avoir en sa sainte et bonne garde. Portez-vous bien surtout et n'oubliez pas vos amis, qui vous sont bien d?vou?s, ce qui n'est pas ?tonnant le moins du monde, car enfin... ma foi, ? quoi l'absence serait-elle bonne, si on ne pouvait pas m?me en profiter pour dire aux personnes ce qu'on pense d'elles?... Mais je m'arr?te ? l'id?e que vous devez avoir pour le moment un bourdonnement perp?tuel de compliments dans les oreilles, et je me borne ? vous dire... enfin tout ce que vous voulez....

J'esp?re que votre mari se porte bien, qu'il va chasser ? outrance et nous ?crire un joli petit article l?-dessus. Je lui serre la main ainsi qu'? vous, et j'embrasse la petite Louise de tout mon coeur.... Si Mme Schumann se souvient d'un gros monsieur russe qu'elle a vu ? Berlin, dites-lui que ce gros monsieur la salue....

Il faut cependant finir cette lettre! Je vais la porter ? madame votre m?re pour qu'elle y mette quelques mots.

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