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Read Ebook: Histoire de Flandre (T. 1/4) by Kervyn De Lettenhove Joseph Marie Bruno Constantin Baron

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Ebook has 772 lines and 124098 words, and 16 pages

Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le typographe ont ?t? corrig?es. L'orthographe d'origine a ?t? conserv?e et n'a pas ?t? harmonis?e.

HISTOIRE DE FLANDRE.

Bruxelles.--Imprimerie ALFRED VROMANT.

HISTOIRE DE FLANDRE

PAR M. KERVYN DE LETTENHOVE

TOME PREMIER

BRUGES BEYAERT-DEFOORT, ?DITEUR

Il est devenu aujourd'hui ? peu pr?s inutile d'insister sur l'importance des ?tudes historiques. Aux enseignements d'une longue exp?rience qu'y cherchent les esprits s?rieux s'unit, pour les imaginations plus ardentes et plus vives, le charme d'un tableau dont les ?pisodes vari?s n'empruntent leurs couleurs et leur mouvement qu'? la v?rit?. Grandeur ou d?cadence, prosp?rit? ou mis?re, victoires ou d?sastres, tout y offre des le?ons et des exemples, et tandis que les peuples parvenus au fa?te de leurs destin?es aiment ? jeter un regard en arri?re sur le marais d'Evandre pour y d?couvrir leur modeste berceau,

Rara domorum Tecta... quae nunc romana potentia coelo Aequavit.

d'autres qui ont vu s'effacer leur influence et leur force se sentent encore plus irr?sistiblement entra?n?s ? recueillir leurs souvenirs et ? entourer d'un culte pieux les ruines de leur puissance ?teinte.

La Flandre a cette mission ? remplir. Elle le doit aux g?n?rations qui l'?lev?rent si haut qu'elle fut, pendant tout le moyen-?ge, la m?tropole de l'industrie et le centre de la civilisation. Les palmes des conqu?tes lointaines immortalis?rent ses princes et ses chevaliers plantant leurs banni?res ? J?rusalem ou ? Constantinople, et ses communes pr?sent?rent un spectacle non moins admirable en alliant au milieu des guerres les plus sanglantes l'h?ro?sme et l'abn?gation du d?vouement qui prot?ge la patrie et le g?nie des arts utiles qui la rendent florissante.

Il faut surtout rechercher dans les annales de la Flandre les causes qui la maintinrent pendant longtemps ? son apog?e et celles qui la pr?cipit?rent tout ? coup vers sa chute. On ne saurait trop le remarquer: malgr? les invasions du dehors et les luttes int?rieures si fr?quentes sous des princes hostiles ? la Flandre par leur naissance, leur ambition et leurs int?r?ts, elle fut libre et forte tant que ses institutions et ses moeurs, se soutenant mutuellement et entour?es du m?me respect, rest?rent ?galement libres et fortes. Le jour o? la corruption passa dans les moeurs, l'anarchie p?n?tra dans les institutions, et d?s lors, condamn?e ? perdre sa glorieuse individualit?, il ne lui ?tait r?serv? d'autre consolation que de se confondre, sous une main qui ne lui ?tait pas ?trang?re, dans le grand empire de Charles-Quint.

Cette appr?ciation des faits g?n?raux de notre histoire est plus exacte que celle des ?crivains qui, sans tenir compte de l'esprit propre ? chaque si?cle, ont voulu juger nos communes tant?t d'apr?s les syst?mes de l'antiquit?, tant?t d'apr?s des th?ories toutes modernes.

Si les communes flamandes exerc?rent une si notable influence sur toutes les communes de l'Europe, si la libert? dont on y jouissait ?tait si ?quitable et si tut?laire que le commerce de toutes les nations y trouvait un asile, c'est par le caract?re religieux, loyal et probe des populations qu'il faut expliquer la stabilit? et la dur?e de l'organisation communale qui, apr?s avoir domin? comme r?gle politique pendant quatre si?cles, se conserva comme r?gle administrative pendant quatre autres si?cles.

Asseoir le sentiment national sur ces bases traditionnelles, le d?velopper en montrant sans cesse une loi providentielle et morale associ?e ? la succession des ?v?nements, telle est la double t?che qu'il importe, en Flandre comme ailleurs, de poursuivre avec pers?v?rance, en se pla?ant au-dessus des passions du moment, pour lier l'avenir au pass?.

HISTOIRE DE FLANDRE

LIVRE PREMIER

Les Galls, les Kymris, les Romains. Invasion des barbares. Conqu?tes des Franks.--?tablissements des Saxons. Naissance et progr?s du christianisme.

Pendant longtemps, les premi?res migrations descendues des plateaux de l'Asie poursuivirent leur marche incertaine au sein des immenses solitudes qui s'?tendaient entre le Tana?s, l'Elbe et le Danube. Ce ne fut que vers le dix-septi?me si?cle avant l'?re chr?tienne que les Galls ou Celtes parurent au del? du Rhin, et donn?rent leur nom ? la Gaule.

Cependant les Galls, fuyant l'invasion des Kymris, se dirigeaient vers la for?t Hercynienne et les collines de l'?trurie. Les Belges avaient ?tendu leur domination jusqu'au Rh?ne, et, dans leur ardeur belliqueuse, ils ne tard?rent point ? prendre part aux lointaines exp?ditions des Galls.

Le plus redoutable des chefs qui accompagnent en Mac?doine le brenn Kerthwrys se nomme Belgius. Alexandre, en voyant ces hommes qui ne craignaient rien, si ce n'est la chute du ciel, put pressentir quels p?rils allaient menacer la monarchie de ses p?res: ses successeurs r?ussissent ? peine ? la d?fendre contre les Belges. Ptol?m?e p?rit en les combattant, avant que les guerriers de Sosth?ne parviennent ? les arr?ter, en invoquant le nom du h?ros mac?donien. Enfin le brenn Kerthwrys dispara?t ? Delphes, au milieu d'une temp?te, perc?, comme le racontent les anciens, par les fl?ches que lancent sur sa t?te Apollon, Diane et Minerve, divinit?s outrag?es de ces sacr?s vallons. D?s ce jour les vainqueurs de la Gr?ce se dispersent, et d?sormais ils pr?teront l'appui de leur nom et de leur courage ? toutes les ambitions et ? toutes les conqu?tes. C'est ainsi qu'ils servent tour ? tour Pyrrhus et Carthage, et m?ritent que Mithridate rende hommage ? leurs exploits.

Lorsqu'un autre brenn entra ? Rome et assi?gea le Capitole, des Belges qui ?taient venus s'?tablir successivement dans le nord de l'Italie partag?rent ?galement sa gloire. Ces Belges continu?rent pendant plusieurs si?cles ? combattre les Romains; Claudius Marcellus s'illustra en les repoussant. <>

La conqu?te romaine avait p?n?tr? dans le midi de la Gaule quand une seconde invasion de Kymris parut sur le Rhin. Ils reconnurent les populations, issues d'une commune origine, qui les avaient pr?c?d?s, s'alli?rent aux Belges du nord de la Gaule, et soutinrent ceux qui campaient sur la Garonne. Marius, en les exterminant ? Aix et ? Verceil, m?rita, apr?s Romulus et Camille, le glorieux surnom de troisi?me fondateur de Rome.

Un demi-si?cle apr?s ces victoires, une nouvelle invasion se pr?sente; mais elle est moins redoutable: c'est celle des Su?ves. A C?sar est r?serv?e la gloire de les vaincre. Ce consul ambitieux, aux yeux vifs, au front chauve, ? la barbe n?glig?e, en qui Sylla avait vu plusieurs Marius, et qui, sortant de la pr?ture, avouait ? ses amis qu'il ?tait jaloux d'Alexandre, avait choisi entre les divers gouvernements des provinces celui de la Gaule, parce qu'il lui promettait le plus de victoires. Il extermina les Helv?tes, et rejeta les Su?ves au del? du Rhin; puis, se trouvant trop faible pour lutter seul contre toute la Gaule, il se d?clara le d?fenseur du culte des druides, et s'allia aux Kymris du centre contre les Belges du nord. Parmi ceux-ci, les Nerviens ?taient les plus intr?pides. Ils occupaient les pays situ?s ? l'est de l'Escaut, et ils avaient eu soin de rel?guer dans des marais inaccessibles aux ennemis leurs femmes et tous ceux que leur ?ge rendait inutiles ? la guerre. Leur r?sistance fut h?ro?que. Pendant quelques jours Rome trembla pour ses l?gions, et ne vit dans C?sar qu'un perfide violateur de la paix, digne d'?tre livr? aux ennemis. Mais, lorsqu'il revint victorieux, elle le re?ut avec de longues acclamations, et le s?nat d?cr?ta des f?tes publiques pour remercier les dieux de leur protection signal?e. <>

Cependant une nouvelle ligue se forma contre les Romains. Elle comprenait les peuples armoriques, c'est-?-dire tous ceux qui habitaient le rivage de la mer, depuis la Loire jusqu'au Rhin. Les Morins y prirent part; on y remarquait aussi les M?napiens, qui, apr?s avoir ?t? l'un des peuples les plus puissants de la Belgique, s'?taient, ? mesure qu'ils s'affaiblissaient, rapproch?s de plus en plus de la mer. Les Belges de la Bretagne avaient promis leur appui, et l'on esp?rait celui des nations germaniques, toujours empress?s ? franchir le Rhin. Tous s'?taient engag?s ? agir d'un commun accord, ? partager la m?me fortune, et ? d?fendre contre le joug romain la libert? qu'ils avaient re?ue de leurs p?res. Les M?napiens et les Morins n'avaient jamais envoy? de d?put?s ? C?sar: loin de se soumettre ? l'approche des arm?es romaines, ils r?solurent, par une tactique diff?rente de celle qu'avaient adopt?e les autres nations gauloises, d'?viter le combat et de chercher un refuge dans leurs marais et dans leurs vastes for?ts. C?sar, r?duit ? s'ouvrir un passage, la cogn?e et l'?p?e ? la main, avait ? peine d?vast? quelques champs et br?l? quelques villages, lorsque les pluies de l'automne le contraignirent ? donner le signal de la retraite.

L'ann?e suivante, C?sar arr?ta sur le Rhin une autre invasion, celle des Usipiens et des Tencht?res. Quelques vaincus se r?fugi?rent ? l'est du Rhin chez les Sicambres; C?sar leur fit redemander les fugitifs, mais ils lui r?pondirent: <> Trois si?cles s'?couleront avant que les fils de ces Sicambres aillent demander raison aux successeurs de C?sar de la violation de leurs fronti?res, en envahissant celles de l'empire romain.

Pendant que C?sar se pr?parait ? passer en Bretagne, il conclut un trait? d'alliance avec les Morins qui avaient r?sist? ? ses armes. Ils s'excus?rent en all?guant leur ignorance des usages des conqu?rants d'avoir os? leur r?sister et remirent quelques otages. Deux lieutenants de C?sar p?n?tr?rent dans le pays des M?napiens, toujours prot?g?s par leurs for?ts. Un autre de ses lieutenants re?ut, au retour de l'exp?dition de Bretagne, l'ordre de r?primer une attaque dirig?e par les Morins contre quelques l?gionnaires isol?s et parvint, gr?ce aux chaleurs de l'?t? qui avaient d?ss?ch? les marais, ? leur imposer la paix.

Les M?napiens seuls continuaient ? repousser le joug romain. Ils s'empress?rent d'entrer dans la conf?d?ration qui eut pour chef Ambiorix, roi des ?burons, nation intr?pide et voisine des bords de la Meuse. Mais leur courage ne put les sauver. Assaillis de toutes parts avant qu'ils eussent pu se pr?parer ? la d?fense, ils perdirent leurs troupeaux et virent br?ler leurs habitations et leurs moissons. Leurs otages furent conduits au camp de C?sar, et Ambiorix apprit bient?t qu'il ne pouvait plus esp?rer de trouver au milieu d'eux un appui dans la victoire ou un asile dans le revers.

L'insurrection vaincue chez les Belges se ranima chez les Arvernes. La voix du vercing?torix fut entendue jusqu'aux extr?mit?s de la Gaule. Les Morins accoururent au si?ge d'Al?sie; Comius, chef atr?bate auquel C?sar avait confi? le soin d'observer les M?napiens, avait abandonn? le parti des Romains, et trahissait leur alliance et leurs bienfaits: tant ?tait grande l'ardeur des Gaulois ? recouvrer leur libert? et leur ancienne gloire!

C?sar r?vait d?sormais d'autres conqu?tes; il voulait opposer ? la jalousie de Pomp?e et ? la haine du s?nat la puissance victorieuse de son glaive. Il ne songea plus qu'? s'attacher les peuples de la Gaule qui n'avaient pas oubli? la route de Rome, et il les incorpora dans les l?gions qui combattirent ? Pharsale.

Les M?napiens et les Morins partagent, depuis cette ?poque, le sort des autres nations gauloises. Aux agitations de la libert? menac?e succ?de la longue paix de la servitude, et bient?t, au milieu des splendeurs de la cour d'Auguste, Virgile, gravant sur le bouclier d'En?e les brillantes destin?es de Rome, rappelle dans les m?mes vers la honte du Rhin et celle de l'Euphrate, la d?faite des peuples nomades de la Libye et la soumission des Morins, les plus recul?s des hommes.

... Incedunt victae longo ordine gentes, Quam variae linguis, habitu tam vestis et armis. Hic Nomadum genus et discinctos Mulciber Afros, Hic Lelegas, Carasque, sagittiferosque Gelonos Finxerat. Euphrates ibat jam mollior undis, Extremique hominum Morini, Rhenusque bicornis.

Rome est arriv?e au fa?te de sa puissance, quand une ville obscure de la Jud?e devient le berceau de la r?novation du monde. Le Christ, que l'Orient attend, oppose ? l'orgueilleuse corruption des soci?t?s antiques les ineffables myst?res d'une chastet? et d'une humilit? inconnues jusqu'alors; puis, confirmant ses divins pr?ceptes par l'agonie du sacrifice expiatoire, il dit ? ses disciples: <> Ceux-ci se h?tent d'ob?ir; conqu?rants pacifiques, ils se partagent le monde. Pierre et Paul, appel?s aux bords du Tibre, vont dans la ville ?ternelle sceller de leur sang le fondement d'une puissance plus durable que celle des C?sars.

Tib?re succ?da ? Auguste, Caligula ? Tib?re. Caligula conduisit une exp?dition romaine dans les r?gions septentrionales de la Gaule. Arriv? sur le rivage de la mer avec ses balistes et ses machines de guerre, il ordonna aux l?gionnaires de ramasser dans leurs casques les coquillages ?pars sur le sable, afin, disait-il, que le Capitole re??t les d?pouilles de l'Oc?an. Un monument plus utile de ce voyage fut la construction, au bord de la mer, d'une tour ?lev?e, o? l'on allumait des feux pendant la nuit pour diriger la marche incertaine des navires.

Val?rien confia ? Posthumus le soin de d?fendre les fronti?res de l'empire. Posthumus arr?ta toutes les invasions, et maintint la paix dans les provinces confi?es ? son administration. La Gaule reconnaissante le proclama empereur ? la mort de Val?rien; mais il p?rit victime de l'ambitieuse jalousie d'un de ses lieutenants, nomm? Lollianus, qui l'assassina.

Un armurier r?gna pendant trois jours; il avait dit: <> Un de ses soldats lui r?pliqua, en lui donnant la mort: <>

Victoria, disposant toujours de l'autorit? supr?me, la transmit ? Tetricus, qui se fit proclamer ? Bordeaux. L'empire gaulois cr?? dans la Belgique s'?tendait vers la M?diterran?e; Aur?lien s'alarma en Italie: <>

L'?p?e d'Aur?lien ?tait plus puissante que les oracles sibyllins. Elle renversa dans les Gaules l'autorit? de Victoria, et sur l'Euphrate celle de la reine Z?nobie. L'Orient et l'Occident portaient les m?mes fers: Tetricus, rev?tu d'une chlamyde de pourpre au-dessus des braies gauloises, parut au triomphe d'Aur?lien, ? c?t? de Z?nobie, qui, orn?e de pierres pr?cieuses, tra?nait des cha?nes d'or. Z?nobie obtint une retraite ? Tibur; Tetricus acheva ses jours sur le mont Coelius.

Tous les historiens ont c?l?br? l'intr?pidit? des Seekongars et l'audace qu'ils montraient en parcourant les mers: leurs po?tiques mythologies racontaient que les dieux avaient cr?? l'homme d'un tronc d'arbre qui flottait sur les ondes; l'Oc?an ?tait leur premi?re patrie. <>

Lorsque Aur?lien et Tacite eurent r?gn?, Probus ceignit la pourpre imp?riale. Il opposa une r?sistance ?nergique ? toutes les invasions des barbares, les for?a ? repasser le Rhin, leur prit soixante et dix villes et leur tua quatre cent mille hommes. Puis il dirigea ses armes contre la ligue des Franks et les vainquit au fond de leurs marais. Quelques-uns de ces Franks, conduits au Pont-Euxin par l'ordre de l'empereur, s'y empar?rent de quelques barques o? ils trouv?rent un asile. Insultant tour ? tour les rivages de l'Asie et ceux de l'Europe, pillant Syracuse, mena?ant Carthage, ils revinrent dans la Batavie sans que la puissance romaine e?t pu ch?tier leur audace.

Bient?t un nouveau mouvement ?clata dans la Gaule. Il arriva que, dans une f?te donn?e ? Lyon, le jeu fut dix fois de suite favorable ? Proculus. Selon un ancien usage, ses amis s'amus?rent ? le parer d'un manteau de pourpre. Cependant ils craignirent que cette innocente plaisanterie ne leur dev?nt fatale. Un complot se forma. Proculus voulut garder son manteau imp?rial: la Bretagne, l'Espagne et la Belgique le soutinrent. Vaincu par Probus, il se r?fugia chez les Franks, qui le livr?rent. Probus avait pacifi? tout l'empire et se vantait de n'avoir plus besoin de ses arm?es. Cette parole imprudente le fit assassiner par ses soldats.

Marcus Aur?lius Carus, citoyen de la Gaule Narbonnaise, r?gna deux ann?es. Diocl?tien, ? qui une druidesse de Tongres avait autrefois promis l'empire, lui succ?da et vainquit Carinus, fils de Carus, qui avait recueilli au nord des Alpes l'autorit? de son p?re. D?s ce moment, l'ind?pendance gauloise s'humilia et se transforma en une longue agitation, qu'entretinrent les Bagaudes, laboureurs chass?s de leurs terres par les ravages des guerres ou l'avidit? du fisc.

A peine Carausius avait-il pris le commandement de la flotte de Boulogne qu'on le vit, soit qu'il ?cout?t son ambition, soit qu'il f?t guid? par des sympathies puis?es dans une commune origine, favoriser les Franks et les Saxons qu'il devait combattre; il apprit que Diocl?tien et Maximien avaient r?solu sa mort, et se proclama empereur. De nombreux navires se trouvaient sous ses ordres; une l?gion romaine, form?e probablement d'auxiliaires germains, le soutenait: la Bretagne m?me invoquait sa protection. Enfin, ? sa voix, les Franks, s'?lan?ant de leurs marais, avaient occup? la cit? de Boulogne.

La r?bellion de Carausius porta l'effroi ? Rome. Dans les ports de la Gaule m?ridionale et m?me dans ceux de l'Italie, on se h?ta de construire des vaisseaux pour combattre la flotte ennemie, et un pan?gyriste romain remarque, comme une preuve signal?e de la protection des dieux, que pendant toute une ann?e, tandis qu'on tissait les voiles et qu'on pr?parait les bois n?cessaires aux navires, le ciel demeura constamment serein afin que le z?le des ouvriers ne se ralent?t point. Cinq ann?es s'?coul?rent avant que la flotte romaine par?t dans l'Oc?an. Constance avait quitt? les bords du Rhin pour la seconder avec une puissante arm?e; Boulogne fut reconquise, et les Romains, favoris?s par la s?cheresse de l'?t?, pouss?rent leur exp?dition jusqu'au centre des terres m?napiennes, <>

Dans l'arm?e qui s'?loigna de l'Italie pour combattre Carausius se trouvait cette c?l?bre l?gion th?b?enne, compos?e de chr?tiens, qui, ? Agaune et sous les murs de Cologne, s'offrit au martyre sans toucher ? son ?p?e. D?s le premier si?cle de l'?re chr?tienne, saint Materne, disciple de saint Pierre, avait port? dans la Belgique les f?conds enseignements de la foi nouvelle. Ses progr?s avaient ?t? rapides, lorsque la pers?cution diocl?tienne soumit ? une terrible et derni?re ?preuve les n?ophytes de toutes les parties de l'empire. Le pr?fet Rictiover la dirigea dans les Gaules. A Tr?ves, le nombre des chr?tiens immol?s fut si consid?rable que leur sang rougit les eaux de la Moselle. La vierge Macra fut br?l?e vive ? Reims. Quintinus, Romain de race s?natoriale, p?rit dans la cit? des Veromandui, qui, depuis, garda son nom. L'?v?que Firminus, ? Amiens, Gentianus, Victorius, Fuscianus, dans le pays de T?rouane, Eubert, Piat et Chrysolius, chez les M?napiens, m?rit?rent par les m?mes tortures la palme du martyre. La pers?cution se ralentit lorsque Constance vient gouverner les Gaules; il traite les Gaulois avec douceur, vit en paix avec les Franks et prot?ge les disciples d'une religion ? laquelle il est secr?tement favorable. Enfin Constantin, fils de Constance, aper?oit dans les airs, aux limites de la Belgique, une croix lumineuse qu'il place sur son labarum. Il triomphe par ce signe, renverse les cruels tyrans de l'Italie et inaugure le christianisme au Capitole.

A la mort de Constantin, l'empire se divise. Un de ses fils, qui porte le m?me nom, fait la guerre ? ses fr?res, enr?le des Franks dans son arm?e et meurt ? Aquil?e. Les Franks s'?tablissent de plus en plus sur les c?tes septentrionales de la Gaule; leur puissance augmente chaque jour. Constant, autre fils de Constantin, la sanctionne par des trait?s et la confirme en p?rissant assassin? par l'ordre du Frank Magnentius, qui se proclame empereur ? Autun. Ni la d?faite de Magnentius, ni la mort de Sylvanus, autre Frank qui usurpe la pourpre, ne fortifient l'autorit? romaine. Les Franks conservent, sous de nouveaux chefs, une position mena?ante. On leur oppose enfin un ?colier d'Ath?nes, ? peine ?g? de vingt-trois ans, ? la taille difforme, ? l'esprit orgueilleux et cynique, mais capable des plus grandes choses. C'est le c?sar Julien. Il arrive dans la Gaule avec trois cent soixante soldats, r?unit les d?bris des arm?es romaines et repousse les barbares qui avaient envahi l'empire depuis Autun jusqu'au Rhin.

Les Franks Saliens avaient occup? la Toxandrie: Julien les surprit et leur imposa la paix. Le disciple de Platon, qui demandait ? des enchantements les secrets de l'avenir, semble, en prot?geant les Franks, avoir re?u la r?v?lation de leur puissance future. D?j?, ils occupaient le premier rang parmi les nations germaniques, terribles pendant la guerre, redoutables pendant la paix, tour ? tour auxiliaires et ennemis. Julien avait besoin des Franks. Il souffrit que dans une s?dition militaire on le proclam?t empereur et qu'on l'?lev?t sur un bouclier, suivant la coutume des barbares. Il n'avait pu r?sister, ?crivait-il au s?nat d'Ath?nes, aux volont?s de son g?nie. Il r?gna, et lorsque plus tard il crut pouvoir r?tablir l'antique puissance de Rome, en for?ant les chr?tiens ? relever les autels du Capitole, il leur disait: <>

Apr?s la mort de Julien, Valentinien recueillit l'empire d'Occident. Pendant les premi?res ann?es de son r?gne, des troupes innombrables de Saxons travers?rent l'Oc?an et s'?tablirent sur le rivage de la Gaule. De l? ils s'avanc?rent jusqu'aux bords du Rhin et d?firent le comte Nannianus. Mais, ayant appris que l'empereur avait r?uni une arm?e consid?rable pour les combattre, ils demand?rent ? pouvoir se retirer en abandonnant leur butin. Les Romains feignirent de le leur permettre, et profit?rent de leur confiance pour les attirer dans des emb?ches o? ils p?rirent presque tous. <>

Pendant ces guerres sanglantes, le christianisme continuait ? se propager vers le Nord. Victricius, soldat romain devenu ?v?que de Rouen, fut le plus illustre de ses ap?tres. <>

Apr?s la mort de Th?odose, Stilicon gouverna la Gaule au nom d'Honorius. Stilicon, objet des po?tiques adulations de Claudien, ?tait un Vandale qui trahissait les Romains. Il voulait ?lever son fils ? l'empire, et appela les barbares. <> Tous les peuples germaniques s'?lanc?rent au del? du Rhin. Les Quades, les Vandales, les Sarmates, les Alains, les G?pides, les Saxons, les Burgundes, les Allemans, ravag?rent tous les pays qui s'?tendent entre les Alpes, les Pyr?n?es, le Rhin et l'Oc?an. Mayence, ville illustre autrefois, fut conquise et d?truite. Les puissants habitants de Reims, ceux d'Amiens, d'Arras et de Tournay, les Morins, les plus ?loign?s des hommes, subirent le m?me sort. Dans l'Aquitaine, dans la Novempopulanie, dans la Lyonnaise et la Narbonnaise, rien n'?chappa ? la d?vastation. Enfin Alarik assi?gea la cit? imp?riale du Tibre avec une arm?e de Goths, s'en empara et la pilla pendant six jours; tandis que saint J?r?me r?p?tait aux descendants des Gracques et des Scipions, r?fugi?s ? Bethl?em, les vers o? la muse d?sol?e de Virgile raconta la ruine d'Ilion, les appliquant aux malheurs de Rome, fille de Pergame:

Quis cladem illius noctis, quis funera fando Explicet, aut possit lacrymis aequare labores? Urbs antiqua ruit, multos dominata per annos.

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