Read Ebook: Carnet d'une femme by Lano Pierre De
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Ebook has 743 lines and 41459 words, and 15 pages
NOTE SUR LA TRANSCRIPTION
CARNET D'UNE FEMME
OUVRAGES DU M?ME AUTEUR
ROMAN
JULES FABIEN. --4e ?dition.--E. Flammarion, ?diteur.--Collection des Auteurs c?l?bres 1 vol.
LE ROMAN D'UN PRINCE. 4e ?dition.--Dentu, ?diteur 1 vol.
S?DUCTRICE, 1 vol.
CARNET D'UNE FEMME 1 vol.
HISTOIRE ANECDOTIQUE
L'IMP?RATRICE EUG?NIE, 1 vol.
JOURNAL D'UN VAINCU, 1 vol.
L'EMPEREUR , 1 vol.
LES BALS TRAVESTIS ET LES TABLEAUX VIVANTS SOUS LE SECOND EMPIRE, illustr? de 25 aquarelles hors texte, par L?on Leb?gue. 1 vol.
LA COUR DE BERLIN, 1 vol.
APR?S L'EMPIRE, 1 vol.
UN DRAME AUX TUILERIES SOUS LE SECOND EMPIRE, 1 vol.
EN PR?PARATION
L'AMOUR A PARIS SOUS LE SECOND EMPIRE 1 vol.
Tous droits de traduction et de reproduction r?serv?s pour tous les pays, y compris la Su?de et la Norv?ge.
S'adresser, pour traiter, ? M. H. Simonis Empis.
CARNET D'UNE FEMME
RECUEILLI ET PUBLI? PAR PIERRE DE LANO
PARIS H. SIMONIS EMPIS, ?DITEUR 21, RUE DES PETITS-CHAMPS, 21 1895 Tous droits r?serv?s.
CARNET D'UNE FEMME
CE QU'APPREND LE MARIAGE
Hier, pour la premi?re fois depuis mon mariage, je suis retourn?e dans le monde.
Lorsque j'?tais jeune fille, j'?prouvais un ?moi, chaque fois que ma m?re me conduisait en soir?e. J'allais au bal, le coeur battant tr?s fort, comme si j'eusse d? y rencontrer des ?tres extraordinaires, comme si j'eusse d? y voir des choses tr?s d?fendues.
Je croyais que le mariage m'e?t gu?rie de cette inqui?tude. Eh bien, pas du tout. Je me suis retrouv?e, hier, en allant ? cette f?te, chez les de Sorget, exactement comme j'?tais au temps--tout r?cent encore--o? l'on m'appelait <
En v?rit?, oui, j'ai ressenti cette m?me anxi?t? qui me faisait interrogative, nagu?re, devant les gens et devant les choses que j'allais fr?ler, cette m?me nervosit? qui m'agitait au point de m'emp?cher de manger.
Jeune fille, je me rendais au bal, d'abord pour les jouissances intimes et inconscientes que le bal me procurait; ensuite, pour me rapprocher, tout en m'en ?loignant au plus vite, avec quelque effroi m?me, des groupes d'hommes ou de femmes auxquels il ne m'?tait pas permis de me m?ler; pour y chercher, peut-?tre aussi, la fine moustache du Prince Charmant que quelque r?ve m'avait montr?e.
Ce n'est point cette innocente curiosit? qui m'a tourment?e, hier.
Je suis entr?e chez les de Sorget avec l'esp?rance d'entendre et de voir ce que je n'avais, jusqu'alors, ni vu ni entendu--d'entendre des paroles que l'on ne dit qu'aux femmes mari?es, de voir des visages qui ne sourient qu'? elles. S'il faut ?tre franche, il y avait m?me plus que de l'esp?rance en moi; il y avait du d?sir et une forte dose de complaisance pr?m?dit?e, ? l'appui de ce d?sir.
Eh bien, j'ai ?t? satisfaite.
On nous a mari?s, Jean et moi, vers la fin de la saison mondaine. Il y a sept mois environ que nous vivons en t?te ? t?te, ayant voyag?, et mon mari semblait tout heureux de revenir ? ses amis, ? ses habitudes. Sa h?te ? marquer ce plaisir a m?me manqu? de galanterie. D?s notre arriv?e chez les de Sorget, il m'a <
Cette fuite pr?cipit?e m'a un peu chagrin?e. J'aime beaucoup Jean, malgr? ses brusqueries fr?quentes, ses fa?ons de penser sans cesse, depuis quelque temps, ? toute autre qu'? moi, l'ennui profond qu'il semble tra?ner apr?s lui, mais qui n'est qu'un <
Mais ? peine Jean se fut-il ?loign?, que je me vis prise d'assaut par une dizaine d'habits noirs, parmi lesquels je reconnus plusieurs de mes anciens danseurs--de mes assidus valseurs d'autrefois.
Je remarquai que tous, en dansant, m'enla?aient beaucoup plus ?troitement que jadis. Il y en eut, m?me, qui se livr?rent autour de ma taille et, ? la d?rob?e, sur ma personne, ? une sorte de <
Les compliments qu'on m'adressait n'?taient plus les m?mes. Nagu?re, c'?tait apr?s mille et une contorsions de phrases tr?s comiques, souvent, que l'on osait me faire entendre que j'?tais charmante. Hier, on n'a point pris tant de pr?cautions, et l'on ne m'a plus dit que j'?tais charmante. On a remplac? cet adjectif banal par d'autres plus accentu?s. Hier, selon mes danseurs, j'ai ?t? tour ? tour divine, prenante, sorci?re, attirante; il y en eut un qui voulut absolument voir en moi une beaut? perverse. Je l'assurai, en riant, car dans le monde il faut rire de tout et de tous, que je ne poss?de certainement aucune des qualit?s ou aucun des d?fauts qu'il me pr?tait, et comme je lui donnais ? supposer que je le croyais po?te, il se r?cria:
--Moi, po?te, non, madame, non. A peine musicien.
Je l'interrogeai:
--Instrumentiste?... compositeur?
Il parut r?fl?chir.
--Mon Dieu, ni l'un, ni l'autre... ou plut?t, instrumentiste.
--Pianiste?... violoniste?
--Non... tout ?a... trop commun... Je joue du tambour.
--Du tambour?
--Oui; et comme, ? Paris, jouer du tambour est d?fendu, j'ai fait capitonner, sur toutes ses faces, une chambre dans mon appartement o?, sans g?ner personne, je passe mes journ?es ? <
Je ne pus tenir mon s?rieux. Cet homme qui joue du tambour, durant toutes ses journ?es, qui est le duc de Bl?rac et qui trouve en moi tant de choses perverses, m'apparut comme le type le plus r?jouissant qu'il f?t offert de rencontrer. J'?clatai de rire, et, comme il ne comprit pas la cause de ma ga?t?, il se mit ? rire avec moi.
En me reconduisant ? ma place, il m'a invit?e ? venir voir son installation musicale. Je l'ai remerci?.
Comme la soir?e s'achevait, je pensai: des mains se sont promen?es sur tout ce que mon corps laissait ? leur port?e; des bouches ont prononc?, ? mes oreilles, des mots que la correction mondaine emp?chait tout juste d'?tre inconvenants; des regards ont fix? mon regard, dans une convoitise ? peine dissimul?e.
C'?taient donc l?, les choses que j'ignorais, jeune fille, et au-devant desquelles j'allais, tout ? l'heure, presque ?mue?
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