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Read Ebook: Neue Kindergeschichten aus Oberheudorf: Fünfzehn heitere Erzählungen by Siebe Josephine

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Ebook has 606 lines and 48276 words, and 13 pages

COURS FAMILIER DE LITT?RATURE

UN ENTRETIEN PAR MOIS

PAR M. A. DE LAMARTINE

TOME SEIZI?ME.

PARIS ON S'ABONNE CHEZ L'AUTEUR, RUE DE LA VILLE L'?V?QUE, 43. 1863

L'auteur se r?serve le droit de traduction et de reproduction ? l'?tranger.

COURS FAMILIER DE LITT?RATURE

REVUE MENSUELLE.

Paris.--Typographie: Firmin Didot fr?res, imprimeurs de l'Institut et de la Marine, rue Jacob, 56.

COURS FAMILIER

LITT?RATURE.

XCIe ENTRETIEN.

VIE DU TASSE.

Je passais mes journ?es solitaires ? errer souvent sans guide dans les rues et parmi les monuments de Rome; plus j'?tais jeune, plus ces images de v?tust? se refl?taient en poignantes impressions sur mon esprit. La jeunesse, en qui la vie semble in?puisable, parce qu'elle est neuve, se compla?t ? ces images de mort; elles ne sont pour elle que la m?lancolique po?sie de la destruction et du renouvellement des choses humaines. Ces vestiges de la fortune et des si?cles sem?s sous ses pas ne lui paraissent que des empreintes gigantesques et myst?rieuses d'un fleuve qui a roul? ces d?bris dans le vaste lit du temps; elle ne croit pas que ce fleuve revienne jamais sur son cours pour l'entra?ner elle-m?me avec les hommes et les choses du temps pr?sent.

? l'extr?mit? de cette rue immonde, une rampe rapide, gravissant le flanc d'une des sept collines, montait vers un petit monast?re inconnu, qui s'?levait dans une lueur du soleil au-dessus de la fum?e et du brouillard du faubourg, comme un promontoire ?clair? des rayons du jour qui s'?teint, pendant que la mer ? ses pieds est d?j? dans l'ombre de la brume. On apercevait au-dessus du mur d'enceinte de ce couvent les cimes vertes de quelques orangers qui contrastaient avec la teinte sale et gris?tre des pierres, et qui faisaient imaginer entre les murs du clo?tre un petit pan de terre v?g?tale, une oasis de pri?re, une ombre, une fra?cheur, peut-?tre une fontaine, peut-?tre un jardin, peut-?tre le cimeti?re du couvent. La petite cloche du campanile, comme une voix timide qui craignait d'?veiller l'?tranger ma?tre ? Rome, tintait l'Angelus du soir aux solitaires et aux pauvres femmes du quartier: cette cloche avait dans son timbre argentin quelque chose du gazouillement de l'alouette qui s'?l?ve d'un champ moissonn? devant les pas du glaneur. La joie et la tristesse se fondaient dans son accent; le site ?lev?, la touffe de verdure, le son de la clochette, la lueur sereine du soleil sur ce groupe de murailles, attir?rent machinalement mes pas vers le couvent. Je gravis lentement la rampe pav?e de cailloux luisants du Tibre, entre lesquels la mousse et les herbes parasites poussaient sans ?tre foul?es. ? droite, de hautes murailles grises, perc?es de meurtri?res, dominaient la rampe; ? gauche, un parapet en pierre soutenait le chemin et laissait voir par-dessus ses dalles l'oc?an immobile et brumeux des rues, des d?bris, des clochers, des ruines de Rome, qui s'?tendait sans bornes sous le regard et qui se confondait avec l'horizon des montagnes de la Sabine.

D. O. M. TORQUATI TASSI OSSA HIC JACENT. HOC NE NESCIUS ESSES HOSPES, FRATRES HUJUS ECCLESIAE POSUERUNT.

C'est-?-dire:

Ici gisent les os de Torquato Tasso. Visiteur, les fr?res de ce couvent ont pos? cette pierre pour que tu saches qui tu foules!

Cette humble pierre sur une si glorieuse m?moire me parut l'ach?vement de la destin?e po?tique de ce grand homme. Je ne regrettais pas pour lui un plus somptueux monument: en fait de tombe, la plus ignor?e est la plus d?sirable; les survivants chers savent la trouver, les indiff?rents la profanent, les ennemis l'outragent. Plus de bruit au moins autour de ce lit du dernier sommeil!

Je restai si longtemps agenouill? sur cette pierre et absorb? dans mon culte de jeune homme, pour le chantre de l'ingrate L?onora, que le fr?re fut contraint ? me rappeler l'heure, et qu'au moment o? je sortis de l'?glise pour cueillir une feuille de l'oranger de Saint-Onufrio, la derni?re lueur du soleil s'?tait ?teinte sur les cimes les plus ?lev?es des monts de la Sabine; en rentrant lentement ? mon logement par les rues t?n?breuses de Rome, je songeai que le plus touchant po?me du Tasse serait le po?me de sa propre vie, s'il se rencontrait un po?te ?gal ? lui pour l'?crire.

Un autre hasard de voyageur m'ayant arr?t? un jour ? Ferrare, j'allai visiter l'h?pital dans lequel le Tasse avait ?t? enferm?. Son cachot, ou plut?t sa loge, est un petit r?duit de quelques pieds carr?s, dans lequel on descend une ou deux marches aujourd'hui, mais qui devait ?tre alors de niveau avec la cour de l'hospice. Une fen?tre ouvre ? c?t? de la porte sur la m?me cour d'hospice et ?claire la loge. Le lit du malade ou du prisonnier ?tait au fond, en face de la porte. La muraille gratt?e par les visiteurs curieux de reliques avait perdu son ciment, et laissait voir les briques rouges de la muraille ? laquelle ?tait adoss?e la couche du po?te. Cette demeure, quoique m?lancolique, n'avait rien de sinistre ou de lugubre. On con?oit que le pauvre captif, emprisonn? soit pour cause d'indiscr?tion dans ses amours, soit pour cause d'?garement momentan? et partiel de sa raison, servi et soign? par les fr?res ou par les soeurs de cet hospice, pourvu de livres et de papier, attabl? devant cette fen?tre o? les rayons de soleil passent ? travers les pampres entrelac?s aux barreaux et visit? par sa belle imagination dans ses heures de calme, ait trouv? quelque consolation dans ce s?jour o? ses amis et m?me les ?trangers venaient s'entretenir librement avec lui.

Quoiqu'il en soit, je d?tachai pieusement avec mon couteau quelques fragments de la brique la plus rapproch?e du chevet du lit du Tasse, et qui devait avoir entendu de plus pr?s les soupirs et les g?missements du prisonnier; je les emportai comme un morceau de la croix de ce calvaire po?tique, et je les fis ench?sser depuis dans un anneau d'or que je porte toujours ? mon doigt. ? quelques pas de l?, je visitai aussi la petite maisonnette carr?e et le petit jardin de chartreux de l'Arioste, l'Hom?re du badinage, l'Horace et le Voltaire de l'Italie, mais plus ail? qu'Horace et plus gracieux que Voltaire. Celui-l? n'avait port? son imagination que dans ses po?mes; sa vie avait eu la m?diocrit? et la r?gularit? du bon sens. Sous le po?te on sentait le philosophe ? caract?re sobre; l'Arioste se retrouvait dans sa maison.

Parva sed apta mihi, etc.

Rentr? le soir ? l'h?tellerie, ? Ferrare, et encore tout ?mu de mes impressions dans le cachot du Tasse, j'?crivis les strophes suivantes qui n'ont jamais, je crois, ?t? imprim?es.

LE CACHOT DU TASSE.

Homme ou Dieu, tout g?nie est promis au martyre: Du supplice plus tard on baise l'instrument; L'homme adore la croix o? sa victime expire Et du cachot du Tasse ench?sse le ciment.

Prison du Tasse ici, de Galil?e ? Rome, ?chafaud de Sidney, b?chers, croix ou tombeaux, Ah! vous donnez le droit de bien m?priser l'homme Qui veut que Dieu l'?claire et qui hait ses flambeaux!

Grand parmi les petits, libre chez les serviles, Si le g?nie expire, il l'a bien m?rit?; Il voit dresser partout aux portes de nos villes Ces gibets de la gloire et de la v?rit?.

Loin de nous amollir, que ce sort nous retrempe! Sachons le prix du don, mais ouvrons notre main. Nos pleurs et notre sang sont l'huile de la lampe Que Dieu nous fait porter devant le genre humain!

Il est rare qu'un grand homme, surtout dans les lettres, o? la fortune n'est pour rien dans la gloire, il est rare qu'un grand homme sorte tout ? coup de lui-m?me comme un hasard sans pr?c?dent et sans pr?paration d'une famille illettr?e. Le g?nie semble s'accumuler et s'amonceler lentement, successivement et presque h?r?ditairement pendant plusieurs g?n?rations dans une m?me race par des pr?dispositions et des manifestations de talents plus ou moins parfaits, jusqu'au degr? o? il ?cl?t enfin dans sa perfection dans un dernier enfant de cette g?n?ration pr?destin?e au g?nie; en sorte qu'un homme illustre n'est en r?alit? qu'une famille accumul?e et r?sum?e en lui, le dernier fruit de cette s?ve qui a coul? de loin dans ses veines. Ce ph?nom?ne du g?nie h?rit?, accumul?, croissant et enfin fructifiant dans un grand homme frappe l'esprit en ?tudiant, dans l'histoire ou dans la biographie, les origines morales des hommes sup?rieurs. Une famille n'arrive pas ? la gloire du premier coup; il y a croissance dans la famille comme dans l'individu; la nature proc?de par d?veloppement successif et non par explosions soudaines; un g?nie qui se croit n? de lui-m?me est n? du temps; ce ph?nom?ne se remarque ?galement dans le Tasse.

Attrist? de l'ingratitude de Ginevra, Bernardo Tasso quitta la cour de Ferrare; il alla ? Venise imprimer les vers qu'il avait compos?s sur ses amours, en les d?diant ? celle qui les avait inspir?s.

<>

Les pri?res du p?re, de la m?re et de la tante furent exauc?es; l'enfant, qui fut Torquato Tasso, naquit ? Sorrente, le 12 mars 1544. Son enfance, comme celle des hommes prodigieux, fut, dans la tradition des paysans et des matelots de Sorrente, pleine de prodiges. Nous ne les rapporterons pas; c'est l'atmosph?re fabuleuse des grands hommes, l'imagination frapp?e voit plus beau que nature ce que la nature ordinaire ne peut expliquer. Le premier jour de la naissance de Torquato fut le dernier jour de la f?licit? de son p?re. Il apportait avec lui le malheur avec la gloire en naissant, triste et commune compensation des voeux satisfaits.

Son fils, arrach? de ses bras, obtint seul l'autorisation d'aller rejoindre son p?re ? Rome; il raconte lui-m?me, dans la strophe suivante, le d?chirement de deux coeurs que la fortune s?parait pour toujours:

<>

L'infortun? p?re, en recevant son fils Torquato ? Rome et en achevant son ?ducation, ne put jamais obtenir que les portes du couvent s'ouvrissent, ? Naples, pour sa ch?re Porcia; elle mourut soudainement ? Naples, soit de ses angoisses, soit du poison pr?par? par ses proches, qui craignaient qu'elle ne revendiqu?t un jour ses biens retenus par eux.

Nous poss?dons une lettre de Bernardo Tasso qui semble confirmer ces soup?ons.

<> dit-il dans cette lettre, <

<>

<> dit-il dans une lettre ? sa soeur Afra, la nonne de Bergame, <> ajoute-t-il. <>

On voit par ces lettres que la m?re du Tasse ?tait une de ces femmes rares qui forment de leur sang les hommes sup?rieurs, po?tes, philosophes, h?ros. Les grandes m?res font les grands fils: il n'y a presque pas d'exception ? cette v?rit? dans l'histoire.

C'est dans cette tristesse de coeur et dans cette g?ne de son p?re ? Rome que Torquato, s?par? de sa m?re par la mort, et de sa soeur Corn?lia par l'absence, contracta cette m?lancolie, charme de ses vers, malheur de son existence. Ceux dont l'enfance fut triste ne renaissent jamais compl?tement ? la joie, dit S?n?que, dans des vers qui semblent d'hier:

Pectora longis habitata malis Non sollicitas ponunt curas; Proprium hoc miseros sequitur vitium, Nunquam rebus credere laetis, Redeat felix fortuna licet.

<>

On voit dans une lettre du jeune Torquato ?crite de Rome, ? cette ?poque, ? la belle et puissante protectrice de tous les g?nies et de toutes les adversit?s, la c?l?bre Vittoria Colonna, combien ce jeune homme sentait pr?matur?ment les malheurs de son p?re et de sa soeur. C'est pour cette soeur demeur?e en captivit? ? Naples que Torquato implorait Vittoria Colonna.

<>

Pendant ce doux loisir du p?re, le jeune Torquato continuait ses ?tudes ? Bergame, dans la maison d'une grande dame de la famille des Tassi, qui traitait l'enfant comme son fils. Elle se refusait par tendresse ? le rendre ? son p?re, qui l'appelait pr?s de lui ? Pesaro. Plus tard, Torquato y rejoignit son p?re. Le duc d'Urbin, charm? de la figure, du caract?re et du talent pr?coce de Torquato, en fit le compagnon d'?tude et l'ami de son propre fils Francisco. Un ma?tre illustre, Corrado, pr?sidait ? l'?ducation du prince et du gentilhomme. Une amiti? qui surv?cut au malheur et ? la mort du Tasse, et dont on trouve des traces touchantes dans les lettres du duc d'Urbin, ne tarda pas ? ?clore entre les deux adolescents. Le d?part de Bernardo Tasso pour Venise, o? il rappela bient?t son fils aupr?s de lui, interrompit malheureusement, apr?s deux ans de repos, cette douce intimit?. Il employait son fils ? copier, ? corriger et m?me quelquefois ? achever son po?me. Cette occupation et la soci?t? des po?tes de Venise d?cid?rent de plus en plus la vocation du jeune Torquato vers la po?sie. Il apprit avec horreur, ? cette ?poque, que sa soeur Corn?lia, mari?e ? un jeune gentilhomme de Sorrente nomm? Sersale, avait ?t? enlev?e par les Turcs dans une des fr?quentes descentes qu'ils faisaient sur les c?tes d'Italie. Les angoisses du p?re et du fils se calm?rent bient?t en apprenant que les Turcs avaient respect? la rare beaut? de Corn?lia, et l'avaient rendue ? son mari pour une modique ran?on.

<> dit-il ? son po?me, <>

La premi?re esquisse de ce po?me, et quelques centaines de vers des premiers chants conserv?s ? Rome dans la biblioth?que du Vatican, donnent la date pr?cise de la pens?e du Tasse en 1564. De Bologne, il se rendit ? Mantoue pour rejoindre son p?re; mais, quand il arriva ? la cour de Mantoue, son p?re en ?tait d?j? reparti pour retourner ? Rome. Torquato, pr?sent? ? la cour de Ferrare par une de ses protectrices, Claudia Rangoni, fut enfin admis ? titre de chevalier et de courtisan officiel parmi les familiers du cardinal d'Este, fr?re du prince r?gnant ? Ferrare.

Les princes de la maison souveraine d'Este, une des plus puissantes d'Italie, ?taient les seconds M?dicis de l'Italie en de?? des Apennins; les armes, les lettres, les arts, les grandes charges ? la cour des papes, les cardinalats, les papaut?s m?me, fr?quents dans leur maison, leurs richesses enfin, faisaient de la cour de ces princes, ? Ferrare, une autre Rome, une autre Florence. La cour de L?on X lui-m?me n'a pas ?t? illustr?e, parmi les si?cles, par deux noms plus immortels que les noms de l'Arioste et du Tasse, ces deux clients de ces grands M?c?nes du seizi?me si?cle ? Ferrare.

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