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Read Ebook: The Rural Magazine and Literary Evening Fire-Side Vol. 1 No. 03 (1820) by Various

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Ebook has 125 lines and 10785 words, and 3 pages

L'Illustration, No. 3650, 8 F?vrier 1913

Avec ce num?ro L'ILLUSTRATION TH??TRALE CONTENANT LA FEMME SEULE

LA REVUE COMIQUE, par Henriot.

Ce num?ro se compose de VINGT PAGES au lieu de seize et contient deux suppl?ments:

L'ILLUSTRATION

<>

Consid?rez ce visage... Il respire l'?nergie, la douleur, l'amertume... Les yeux o? brille un feu sombre disent la volont? tendue, l'id?e fixe, l'obsession. Sous le front labour? de rides hautaines, il y a de l'orgueil, du r?ve,--de la chim?re, peut-?tre. Le nez est imp?rieux, la bouche fine sous la moustache grise. Un pli de souffrance a creus? les joues. Et tout cela d?c?le l'autorit?, la force, la distinction native, la race. Cet homme, assur?ment, est un chef... Quels revers a-t-il subis? Fut-il coupable ou seulement malheureux?... Sans doute, de magnifiques espoirs exaltaient son coeur de soldat: lutter pour la cause sainte jusqu'? la victoire,--ou jusqu'? la mort; se battre en plein jour, face ? l'ennemi; donner, recevoir des coups retentissants et loyaux... Et voici que la plus injuste des catastrophes a r?duit ? l'impuissance, immobilis?, foudroy? ce h?ros. Il se sent inutile. Il pleure. Mais sa foi subsiste. Pr?t ? toutes les immolations, sa grande ?me subitement raffermie, il se courbe, il ramasse ? terre les tron?ons de l'?p?e, et se redresse. Le bonheur a fui. L'honneur et la fiert? sont intacts... Dans quelques heures, ces choses ?mouvantes seront dites sur la sc?ne fran?aise, ces sentiments exprim?s par le puissant interpr?te du grand ?crivain Henri Lavedan, par Lucien Guitry, le colonel Eulin de Servir.

LA PETITE ILLUSTRATION

TRENTE-DEUX PAGES DE TH??TRE OU DE ROMAN CHAQUE SEMAINE

NOS PROCHAINS ROMANS

LES PROGR?S DE <>

LES BIENFAITS DE L'ANNONCE

<>

COURRIER DE PARIS

CELUI D'AUJOURD'HUI

C'est le jeune homme d'? pr?sent que je veux dire, celui que pour un peu, si j'osais, j'appellerais <>.

Quand, ayant franchi la moiti? d?j? de nos ?tapes, nous nous mettons ? observer le jeune homme du jour et du matin qui nous c?toie, il nous est impossible de le faire sans aussit?t le comparer ? l'autre jeune homme, au type ant?rieur de la g?n?ration pr?c?dente, ? celui qu'en un mot nous ?tions et que, nous semble-t-il encore, nous r?alisions avec un si joli bonheur d'ensemble et de d?tails! Bien de plus naturel. Toujours les vingt ans d'autrui nous rappelleront les n?tres en nous les faisant pr?f?rer, nous donneront, par leur aimable et rassurant aspect, l'illusion des vieux printemps perdus.

Bien que personne ne puisse raisonnablement pr?tendre avoir incarn? et r?sum? ? son ?poque, la ligure et le mod?le de la jeunesse ? laquelle il appartenait, il est cependant permis, m?me au premier venu, du moment qu'il fut une parcelle, un atome pensant et vif de cette ?lite de l'espoir, d'affirmer ? ce titre tr?s suffisant, que, sans la repr?senter dans son int?gralit?, il a cependant contribu?, de si loin et de si infime fa?on que ce soit, ? l'id?e, juste ou fausse, qu'elle a donn?e d'elle, au caract?re qu'elle a montr?, au souvenir, bon ou mauvais ou n'?tant ni l'un ni l'autre, qu'elle a transmis. 11 sera donc, ? la rigueur, excusable s'il g?n?ralise plus qu'il ne faudrait. Et s'il lui arrive de se laisser entra?ner ? confondre avec son imparfaite individualit? la g?n?ration qui, heureusement, se gardait bien toute de lui ressembler, il sera pourtant moins ?loign? de la v?rit? que l'on pourrait le croire, et, tout en risquant de se tromper, il n'aura pas enti?rement tort.

C'est qu'en effet, en d?pit de son insouciance et de sa l?g?ret?, de son irr?flexion, de sa sottise, de tout ce qu'il arborait de frivole, il aura, malgr? lui, baign? dans un flot, dans un courant de pens?es graves parfois, et communes ? tous, et respir? l'air qu'?taient bien forc? d'accepter alors tous les poumons, et re?u le choc d'impressions universelles et puissantes qu'il n'?tait pas en son pouvoir d'?viter.

Ainsi aujourd'hui, ? travers les espaces de moi-m?me, regardant par le gros bout de la lorgnette, le jeune homme de 1880 qui me para?t si ridiculement petit, et auquel, avec une m?lancolique complaisance, je ne m'amuse ? accorder ma vague silhouette et mes traits effac?s que pour mieux ranimer ma m?moire,... voici ? peu pr?s comme il m'appara?t.

Il a ?t? enfant ? la fin de l'Empire. Jusqu'en 1868, il en a vu passer les souples cal?ches, les brillantes troupes, souvent victorieuses. Il a commenc? de jouer dans une s?curit? pleine d'?l?gance et de charme. Et puis 1870-1871, les deux ann?es de la guerre et de la Commune, qui ont compt? plus que double, ont sonn? la fin de la r?cr?ation, ont creus? en lui le foss? d'un noir souvenir. Il avait dans les onze ans ? ce moment-l?, il n'a donc pas fait la guerre, il ne peut m?me pas dire, ? proprement parler, qu'il l'ait vue, mais il l'a sentie, il l'a travers?e en famille, v?cue avec son imagination naissante et ses premi?res r?flexions d'adolescent meurtri. C'a ?t?, dans un autre sens, comme une esp?ce d'affreuse premi?re communion patriotique, le <> dont il n'a jamais pu chasser l'image et abolir la cruaut?. A cette date, il a d? apprendre que le mot victoire n'?tait pas, comme il l'avait toujours cru, un mot uniquement fran?ais. Et il a grandi dans un pays bless? et diminu?. Il n'avait pas assez souffert directement, et par lui-m?me, pour ?tre tout de suite hant? des id?es qui secouaient ses a?n?s imm?diats. Il avait bien entendu parler des batailles, il n'en avait pas foul? les champs, il n'avait, gr?ce ? Dieu, pas vu les morts ? terre, ni les bless?s debout, il ne contemplait le d?sastre qu'? travers Detaille et Neuville. C'?taient de poignants et superbes tableaux qui procuraient, quand on les regardait, je ne sais quel douloureux et tourmentant ?moi. Cela d?passait sans doute un peu les yeux, et s'avan?ait vers la t?te, mais sans aller toujours jusqu'au tr?fonds du coeur... Alors le jeune homme r?vait,... inclinait vers la po?sie, la litt?rature et l'art, les ?lans d'une pens?e plus m?rie que fortifi?e, plus affin?e, plus sensibilis?e que tremp?e virilement par les drames nationaux, au milieu desquels il avait ?t? jet? trop d?sarm? et trop petit. Il est bien rare que la premi?re fois et instantan?ment les grandes choses frappent l'enfance. Elles portent bien le coup, qui n'est pas inutile, mais ce n'est que plus tard qu'il se fait sentir. Il lui faut du temps pour se propager jusqu'au jeune homme et toucher l'homme accompli. Quand l'enfant d?couvre la mer et la montagne, il en re?oit un choc, malgr? tout superficiel et rapide, m?me s'il est violent. C'est seulement dix ou vingt ans plus tard qu'il ?prouvera, en allant rechercher ce m?me souvenir, la juste et sainte ?motion de l'?tendue et le religieux vertige du sommet. Ainsi le p?le et tendre petit fl?neur de 1872 n'a bien compris le sens exact et la signification dure et m?tallique et claire des mots de d?faite et de patrie, que quarante ans plus tard, aux matins de Fachoda et aux soirs d'Agadir. En 1870, il n'avait fait qu'?peler les lettres de l'alphabet sacr?. Aujourd'hui seulement il sait lire. En 1880, le jeune homme transitoire qui, depuis, a tant chang?, ?tait donc incertitude, ennui, langueur, dilettantisme, doute, orgueil et faiblesse. Il n'avait pas, autant qu'on l'a dit et qu'il l'a lui-m?me laiss? croire par une sorte d'affectation, de pose juv?nile,--renonc? ? l'enthousiasme, au culte de l'id?al, ? la haute pratique des sentiments d'?ternelle et pure grandeur, mais il ne les ?talait pas, il les cachait, m?me les oubliait et les laissait dormir, comme un vin ? qui cela ne fait pas de mal de reposer, couch? dans l'ombre silencieuse des caves. Soyez persuad? n?anmoins que, s'il avait l'air de n'y pas penser, c'est qu'il savait bien que les sentiments en question ?taient toujours l?, dans le sous-sol, ? port?e de son coeur et de sa main. Il avait bien le temps! Ce serait pour plus tard.

HENRI LAVEDAN.

LA BANDE TRAGIQUE AUX ASSISES

On les tient et on les juge. Ils sont l? vingt accus?s, grands premiers r?les, comparses, figurants, utilit?s, souffleurs et gar?ons d'accessoires. Toute la troupe, toute la bande, qu'il ne faut point appeler celle des assassins anarchistes, pour qu'il n'y ait point de confusion, de malentendu, car ce ne sont point l? des fanatiques, coupables de crimes d'id?es, de meurtres politiques. Non point. Ce sont des tueurs de pauvres gens. Leurs victimes, dont ils ont fouill? les poches ou pill? les caisses, ce sont d'humbles employ?s ? 150 francs par mois, un gar?on de recettes, de jeunes comptables d'un bureau de banque, fusill?s sans d?fense, ? bout portant; ce sont des vieillards infirmes; c'est un chauffeur conduisant une voiture ? livrer; c'est un gardien de la paix que l'on <> pendant qu'il r?clame des papiers d'identit?; tout cela, c'est du crime de droit commun, le plus abject et le plus inf?me, que l'on s'est mis dix ensemble ? pr?parer et ? ex?cuter; et, par ?gard pour tous ceux qui, dans la suite des temps agit?s de toutes les histoires, ont ?t? eux-m?mes les funestes et courageuses victimes de leurs exaltations sociales, ceux qui se sont br?l?s ? leur propre flambeau, il ne faut point ici, ? propos de ces gens et ? l'occasion de ces actes, prononcer le mot, ni m?me ?voquer l'id?e de crime politique. C'est, d'ailleurs, ce que M. le pr?sident Couinaud a tenu ? d?clarer, une fois pour toutes, d?s ses premi?res paroles.

Aujourd'hui, d?cid?ment, il y a quelque chose de chang? dans cette salle des grandes premi?res criminelles. Le public <> n'a pas ?t? convi?. Mondaines et demi-mondaines sont, pour cette fois, rest?es chez elles et nous ne verrons pas en ce lieu, comme lors de l'affaire Steinheil, le scandale de leurs toilettes de r?p?titions g?n?rales. Plus de frissonnements de soie, ni de rires hyst?riques sous les voilettes, ni de gestes charmants et parfum?s de jolis bras et de mains fines jouant avec un face-?-main ou m?me une lorgnette de th??tre. L'endroit, priv? de ces lueurs de vie heureuse et de ce bourdonnement l?ger, demeure ce qu'il doit ?tre, ce que l'on a voulu qu'il f?t, triste, grave, gris, avec ses trop hautes fen?tres par o? la lumi?re ind?cise, et toujours bl?me, passe ? regret comme l'espoir. Et c'est ? peine si, dans ce jour pauvre o? tous les visages semblent d?color?s et spectraux, on peut distinguer avec quelque pr?cision les traits impassibles du pr?sident et des juges rouges d'assises, la silhouette, cravat?e d'hermine, du vieux procureur g?n?ral qui a tenu, en ces circonstances, peut-?tre p?rilleuses, ? occuper lui-m?me le fauteuil de l'accusation, et les honn?tes physionomies des jur?s, un architecte, des ing?nieurs, un m?decin, un employ? et quelques rentiers, qui devront demeurer l?, immobiles et attentifs, face ? face avec la sinistre bande, pendant vingt jours.

--Faites entrer les t?moins! ordonne le pr?sident.

Aussit?t, une foule, en cohue, envahit la salle. Il y a l?, p?le-m?le, les parents et les amis des victimes et les parents et les amis des meurtriers. Un homme pr?s de moi p?lit et jure en regardant Soudy. Je lui demande: <<--Vous le reconnaissez?--Si je le reconnais! Il a tir? sur moi, ? Chantilly!>> Un autre d?clare, ? mi-voix: <> Et il indique la poche enfl?e de son veston. L'appel dure interminablement. Enfin, le flot s'?coule peu ? peu par la petite porte. Les interrogatoires, maintenant, vont commencer.

--Madame Ma?trejean!

...C'est fait. Mardi, mercredi, jeudi, on a interrog? les vedettes. Ce n'?tait donc que cela, les vedettes! La surprise, la d?ception, atteignent ? la stupeur. Voici, loquace, emphatique, reniant les doctrines <>, traitant d' <> les apologistes de Bonnot et de Garnier, d?clarant m?me que Bonnot ?tait un anormal ? cerveau de <>, voici Dieudonn? que l'encaisseur Caby a reconnu comme son assassin et qui niera tout, m?me l'?vidence, cela, d'ailleurs, sans un ?lan de sinc?rit?, sans un cri vrai qui ?meut... Voici Callemin, dit Raymond la Science, imberbe, petit, r?bl?, tr?s myope, tr?s jeune, tr?s infatu?, un mauvais gamin rageur, qui n'a m?me point les mots de Gavroche , et qui aura not? sur ses petits papiers jusqu'aux pauvres insolences qu'il jugera habile de m?ler ? ses faibles ripostes et ? ses plus invraisemblables d?n?gations. Il s'embrouille vite, d'ailleurs, ne trouve plus de r?ponse d?s qu'il a omis de pr?voir les questions et s'effondre enfin, mat?, en plein d?sastre, dans ses petits papiers inutiles. Et maintenant c'est le tour du jardinier-camelot Monier dit Simentoff, un M?ridional tragique, bavard et confus, du gar?on ?picier Soudy, qui d?clame, et se plaint de ne pas avoir trouv? <>, de Carouy--figure brutale, facilement farouche--qui nie comme tous mais avec moins de litt?rature et plus d'?nergie. Que dire des autres accus?s, ceux dont la t?te n'est pas en jeu?... L'int?r?t d?cro?t encore, si possible... Mais les t?moins, maintenant, vont se succ?der ? la barre et ramener, avec eux, l'?motion.

ALB?RIC CAHUET.

LA ZONE ET SES HABITANTS

VOYAGE AUTOUR DE L'ENCEINTE DE PARIS

Pour avoir une id?e un peu exacte de cette r?gion tr?s sp?ciale, monstrueux anachronisme en notre si?cle d'?l?gance et d'hygi?ne, il ne suffit pas de grimper sur le talus des <>, un v?ritable voyage de plusieurs jours s'impose.

Si l'excursion vous tente, adoptez une tenue modeste, prenez des chaussures solides, et partez. Il faut se r?signer ? patauger dans des boues vari?es, avoir l'oeil alerte, la langue accorte et bien pendue. Les zoniers sont m?fiants en ce moment; pour p?n?trer chez eux, il faut souvent franchir le <> de la propri?t? priv?e. Mais, en g?n?ral, ces gens ne paraissent point m?chants; avec une attention pour les mioches on apprivoise tout de suite les parents.

Sans doute, la population est aussi bigarr?e que l'architecture, s'il est permis de s'exprimer ainsi; gardons-nous cependant de consid?rer la zone comme un repaire d'apaches. Beaucoup de travailleurs, de petits prol?taires, dont je me suis abstenue de scruter les opinions sociales; int?ressants par cela m?me qu'ils sont pauvres, plut?t sympathiques par l'effort de travail, d'?conomie et d'ing?niosit? qu'indiquent leurs constructions les plus baroques.

On m'avait recommand? une grande prudence, on m'avait m?me engag?e ? confier ? un agent de la s?ret? la responsabilit? de mon humble personne; je suis all?e sans escorte, j'ai p?n?tr? partout, et si j'ai aper?u quelques visages r?barbatifs, si l'accueil fut parfois r?serv?, il resta toujours poli. Durant cette promenade d'une semaine, je n'ai pas entendu le moindre mot malsonnant.

C'est peut-?tre autour de Saint-Ouen que la zone est le plus aristocratique, exception faite, bien entendu, des quartiers riches avoisinant le bois de Boulogne. Des jardins, rien que des jardins; irr?guli?rement d?coup?s du c?t? de Clichy et de Levallois, flanqu?s de terrains vagues, piquet?s de maisonnettes ou de b?timents industriels qui ont remplac? la cit? des chiffonniers, foyer d'?pid?mies il y a une vingtaine d'ann?es.

En allant vers l'est, c'est un damier de jardinets, enserr?s de haies vives et de palissades primitives, entre lesquelles courent des chemins ?troits, aboutissant parfois ? des impasses, et dont il est souvent difficile de trouver l'entr?e. Dans chaque lot, une <>, o? les vieilles persiennes, les caisses ? biscuits, le carton bitum?, les d?bris de fer-blanc, sont ajust?s avec ing?niosit?.

En ?t?, la verdure folle habille ce d?labrement: les capucines, les fleurs de haricots, les taches du soleil y mettent de la splendeur. Ouvriers de toutes industries, facteurs, employ?s de banque, viennent le dimanche se reposer ? l'air, arroser leurs champs de l?gumes et surveiller une r?colte qui peut presque payer le prix de location: quatre ou cinq sous par m?tre.

Sous la brume d'hiver, ce maquis devient lamentable. Les bicoques sont d?sertes, gard?es par des cha?nes ou des cadenas qui paraissent repr?senter la partie la plus soign?e du mobilier. Si les apaches de grande envergure d?daignent ces parages, les apaches en herbe s'y aventurent pour rafler des l?gumes ou des instruments de jardinage. Le hasard me fait assister ? l'interrogatoire de deux jeunes dr?les, correctement v?tus, qu'un locataire a surpris dans le domaine de son voisin. En fouillant l'un d'eux, le juge improvis? trouve une arme terrible: une maille de fer attach?e solidement ? une longue lani?re. On confisque l'arme, puis, faute de preuve d'un d?lit caract?ris?, on rend la libert? aux pr?venus.

L'aspect change rapidement aux environs de la porte de Clignancourt. Dans la plaine des Malassis s'?l?ve une v?ritable cit? o? les sentiers mar?cageux, bord?s de taudis infects, alternent avec des rues proprettes, trac?es au cordeau.

Dans ces derni?res, l'architecture est plus soign?e, les chalets voisinent avec des maisonnettes b?ties <>, pierres ou briques, qui ne sont gas les mieux tenues. Aux fen?tres de guingois brillent parfois des rideaux d'une r?elle blancheur; des poules picorent dans la cour, la marmaille prend ses ?bats. De-ci de-l?, s'inclinent sur les masures des mat?riaux de d?molitions qui attendent une adaptation judicieuse. Au bord des all?es du jardin les terres sont retenues par des planches arrach?es ? l'imp?riale des omnibus d?funts: Madeleine-Bastille encercle un massif de rosiers; Clichy-Od?on garde un plant de carottes... Dans quelques rues, le propri?taire a amen? l'eau, luxe assez rare dans la zone. Sur la porte d'une construction en pierre rudimentaire, je lis: <>. Porte close, nul employ?.

J'arrive au boulevard Michelet.

En sortant, j'aper?ois au loin une maison en pierres, ? peine achev?e, dressant ses quatre ?tages devant la porte de Clignancourt, ? l'endroit m?me o? commence la zone, en bordure du glacis. A la porte Pouchet, un immeuble semblable ?crase de sa hauteur insolente la maisonnette d'une sage-femme, plus respectueuse de la l?galit?. Il y a, m'assure-t-on, bien d'autres cas de pareille d?sinvolture.

Par suite de quelles erreurs bureaucratiques, de quelles compromissions administratives, ces constructions furent-elles autoris?es? Il ne m'appartient pas de chercher ? approfondir. La chose para?t assez myst?rieuse. Un petit locataire me dit que le g?nie d?fendait de b?tir en <>, alors que les communes interdisaient de b?tir en <>. Il a tourn? dr?lement la difficult? en rempla?ant la tuile ou le papier goudronn? par du ciment arm?! Je renonce ? comprendre et me borne ? souhaiter que Jacques Bonhomme ne soit pas finalement condamn? ? payer les b?n?fices escompt?s par d'audacieux sp?culateurs.

A la Chapelle, ? la Villette, des usines, des terrains plus ou moins d?serts; les figures sinistres ne r?dent qu'? l'int?rieur des murs. Pr?s du canal Saint-Martin, la zone occup?e par les r?seaux du Nord et de l'Est. A Pantin, c'est le march? couvert, inf?rieur en couleur et en puanteur aux march?s d'Orient, mais presque ?gal en d?sordre et en salet?.

A Romainville, aux Lilas, changement de d?cor.

Le long de vraies rues commen?ant au glacis, la zone est b?tie presque r?guli?rement, avec la banalit? qui caract?rise les petites agglom?rations de la banlieue. A Bagnolet; ? Montreuil, pays des p?ches et des fleurs, beaucoup de baraques de chiffonniers ou de petits jardiniers ?difi?es avec un soin relatif. L'une d'elles, en piteux ?tat, est d?cor?e par des m?daillons en mosa?que ?gar?s, sans doute, dans les d?molitions d'un music-hall. Tout cela manque un peu de pittoresque.

A Vincennes, ? Saint-Mand?, la zone s'embourgeoise. Nous traversons la Seine, les r?seaux du P.-L.-M. et de l'Orl?ans, et nous trouvons ? Ivry et ? Gentilly le coin le plus typique et le plus vant? de la ceinture parisienne.

Entre la porte d'Ivry et la porte de Choisy, la zone habit?e est divis?e en trois bandes dont la premi?re offre le spectacle le plus douloureux, le plus r?voltant que puisse concevoir un ?tre civilis?.

Sur le glacis, des roulottes align?es limitent ce camp de la mis?re et de la vilenie humaine. J'entre; un inf?me cloaque s'?tend entre deux rang?es de maisons roulantes. Dans cette boue f?tide courent dix, vingt, trente marmots d?penaill?s, ? demi nus, qui m?lent leurs glapissements aux grognements fatigu?s d'un lion tapi dans une cage abandonn?e sur le sol; des vieilles ? la Goya trient de mis?rables chiffons, cependant que des messieurs en complet veston et en pelisse inspectent leurs associ?s.

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