Read Ebook: Les mariages de Paris by About Edmond
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Ebook has 1874 lines and 94420 words, and 38 pages
LES
MARIAGES DE PARIS
OUVRAGES DU M?ME AUTEUR
FORMAT IN-8
Mis en vente par livraisons ? 50 centimes, au mois de janvier 1885.
FORMAT IN-16
ALSACE ; 5e ?dition. 1 vol. 3 50
CAUSERIES; 2e ?dition. 2 vol. 7 >> Chaque volume se vend s?par?ment 3 50
LA GR?CE CONTEMPORAINE; 8e ?dition. 1 vol. 3 50 Le m?me ouvrage, ?dition illustr?e 4 >>
LE PROGR?S; 4^e ?dition. 1 vol. 3 50
SALON DE 1864. 1 vol. 3 50
SALON DE 1866. 1 vol. 3 50
TH??TRE IMPOSSIBLE ; 2e ?dition. 1 vol. 3 50
L'A B C DU TRAVAILLEUR: 4e ?dition. 1 vol. 3 50
LES MARIAGES DE PROVINCE; 6e ?dition. 1 vol. 3 50
LE FELLAH; 4e ?dition. 1 vol. 3 50
L'INF?ME; 3e ?dition. 1 vol. 3 50
MADELON; 10e ?dition. 1 vol. 3 50
LE ROMAN D'UN BRAVE HOMME; 35e mille. 1 vol. 3 50
DE PONTOISE ? STAMBOUL. 1 vol. 3 50
GERMAINE; 57e mille. 1 vol. 2 >>
LE ROI DES MONTAGNES; 16e ?dition. 1 vol. 2 >>
LES MARIAGES DE PARIS; 77e mille. 1 vol. 2 >>
L'HOMME ? L'OREILLE CASS?E; 37e mille. 1 vol. 2 >>
TOLLA; 50e mille. 1 vol. 2 >>
MA?TRE PIERRE; 9e ?dition. 1 vol. 2 >>
TRENTE ET QUARANTE.--SANS DOT.--LES PARENTS DE BERNARD; 40e mille. 1 vol. 2 >>
LE CAPITAL POUR TOUS. Brochure in-18 >> 10
LES
MARIAGES DE PARIS
PAR
EDMOND ABOUT
PARIS LIBRAIRIE HACHETTE ET 79, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, 79
Droits de propri?t? et de traduction r?serv?s
MADAME L. HACHETTE.
MADAME,
J'ai vu, ces jours pass?s, un auteur bien en peine. Il avait ?crit, au coin du feu, entre sa m?re et sa soeur, une demi-douzaine de contes bleus qui pouvaient former un volume. Restait ? faire la pr?face; car un livre sans pr?face ressemble ? un homme qui est sorti sans chapeau. L'auteur, modeste comme nous le sommes tous, voulait faire l'?loge de son oeuvre. Il grillait de dire au public: <
EDM. ABOUT.
LES
MARIAGES DE PARIS.
LES JUMEAUX DE L'HOTEL CORNEILLE.
Lorsque j'?tais candidat ? l'?cole normale , je me liai d'amiti? avec deux de mes concurrents, les fr?res Debay. Ils ?taient Bretons, n?s ? Auray, et ?lev?s au coll?ge de Vannes. Quoiqu'ils fussent du m?me ?ge, ? quelques minutes pr?s, ils ne se ressemblaient en rien, et je n'ai jamais vu deux jumeaux si mal assortis. Matthieu Debay ?tait un petit homme de vingt-trois ans, passablement laid et rabougri. Il avait les bras trop longs, les ?paules trop hautes et les jambes trop courtes: vous auriez dit un bossu qui a ?gar? sa bosse. Son fr?re L?once ?tait un type de beaut? aristocratique: grand, bien pris, la taille fine, le profil grec, l'oeil fier, la moustache superbe. Ses cheveux, presque bleus, frissonnaient sur sa t?te comme la crini?re d'un lion. Le pauvre Matthieu n'?tait pas roux, mais il l'avait ?chapp? belle: sa barbe et ses cheveux offraient un ?chantillon de toutes les couleurs. Ce qui plaisait en lui, c'?tait une paire de petits yeux gris, pleins de finesse, de na?vet?, de douceur, et de tout ce qu'il y a de meilleur au monde. La beaut?, bannie de toute sa personne, s'?tait r?fugi?e dans ce coin-l?. Lorsque les deux fr?res venaient aux examens, L?once faisait siffler une petite canne ? pomme d'argent qui excita bien des jalousies; Matthieu tra?nait philosophiquement sous son bras un gros parapluie rouge qui lui concilia la bienveillance des examinateurs. Cependant il fut refus? comme son fr?re: le coll?ge de Vannes ne leur avait point appris assez de grec. On regretta Matthieu ? l'?cole: il avait la vocation, le d?sir de s'instruire, la rage d'enseigner; il ?tait n? professeur. Quant ? L?once, nous pensions unanimement que ce serait grand dommage si un gar?on si bien b?ti se renfermait comme nous dans le clo?tre universitaire. Sa prise de robe nous aurait contrist?s comme une prise d'habit.
Gr?ce ? cette munificence, L?once et Matthieu purent se loger ? l'h?tel Corneille, qui est l'h?tel des Princes du quartier latin. Leur chambre co?tait cinquante francs par mois; c'?tait une belle chambre. On y voyait deux lits d'acajou avec des rideaux rouges, et deux fauteuils, et plusieurs chaises, et une armoire vitr?e pour serrer les livres, et m?me un tapis. Ces messieurs mangeaient ? l'h?tel; la pension n'y ?tait pas mauvaise ? 75 fr. par mois. Le vivre et le couvert absorbaient les deux cents francs de l'oncle Yvon; Matthieu pourvut aux autres d?penses. Son ?ge ne lui permettait pas de se pr?senter une seconde fois ? l'?cole normale. Il dit ? son fr?re: < Et de l'argent? demanda L?once. --Je battrai monnaie. Je me suis pr?sent? ? Sainte-Barbe, et j'ai demand? des le?ons. On m'a accept? pour r?p?titeur des ?l?ves de troisi?me et de seconde: deux heures de travail tous les matins, et deux cents francs tous les mois. Il faudra me lever ? cinq heures; mais nous serons riches. --Et puis, ajouta L?once, tu appartiens ? la famille des matineux, et c'est un plaisir pour toi que de r?veiller le soleil.>> L?once choisit le droit. Il parlait comme un oracle, et personne ne doutait qu'il ne f?t un excellent avocat. Il suivait les cours, prenait des notes et les r?digeait avec soin; apr?s quoi il faisait sa toilette, courait Paris, se montrait aux quatre points cardinaux, et passait la soir?e au th??tre. Matthieu, v?tu d'un paletot noisette que je vois encore, ?coutait tous les professeurs de la Sorbonne, et travaillait le soir ? la biblioth?que Sainte-Genevi?ve. Tout le quartier latin connaissait L?once; personne au monde ne soup?onnait l'existence de Matthieu. J'allais les voir ? presque toutes mes sorties; c'est-?-dire le jeudi et le dimanche. Ils me pr?taient des livres, Matthieu avait un culte pour Mme Sand; L?once ?tait fanatique de Balzac. Le jeune professeur se d?lassait dans la compagnie de Fran?ois le Champi, du Bonhomme Patience ou des Bessons de la Bessoni?re. Son ?me simple et s?rieuse cheminait en r?vant dans le sillon rouge?tre des charrues, dans les sentiers bord?s de bruy?res ou sous les grands ch?taigniers qui ombragent la mare au Diable. L'esprit remuant de L?once suivait des chemins tout diff?rents. Curieux de sonder les myst?res de la vie parisienne, avide de plaisir, de lumi?re et de bruit, il aspirait dans les romans de Balzac un air enivrant comme le parfum des serres chaudes. Il suivait d'un oeil ?bloui les fortunes ?tranges des Rubempr?, des Rastignac, des Henry de Marsay. Il entrait dans leurs habits, se glissait dans leur monde, assistait ? leurs duels, ? leurs amours, ? leurs entreprises, ? leurs victoires; il triomphait avec eux. Puis il venait se regarder dans la glace. <> Quand les deux fr?res, l'oeil ferm? ? demi, interrompaient leur lecture pour ?couter quelques voix int?rieures, L?once entendait le tintement des millions de Nucingen ou de Gobsek, et Matthieu le bruit fr?tillant de ces clochettes rustiques qui annoncent le retour des troupeaux. De mon c?t?, je fis faire ? mes amis quelques promenades curieuses. Il s'est fond? ? l'?cole normale un petit bureau de bienfaisance. Une cotisation de quelques sous par semaine, le produit d'une loterie annuelle et les vieux habits de l'?cole composent un modeste fonds o? l'on prend tous les jours sans jamais l'?puiser. On distribue dans le quartier quelques cartons imprim?s qui repr?sentent du bois, du pain ou du bouillon, quelques v?tements, un peu de linge et beaucoup de bonnes paroles. La grande utilit? de cette petite institution est de rappeler aux jeunes gens que la mis?re existe. Matthieu m'accompagnait plus souvent que L?once dans les escaliers tortueux du 12e arrondissement. L?once disait: < C'est une rue dont je ne veux pas dire de mal, car elle sera d?molie avant six mois. Mais, en attendant, elle ressemble un peu trop aux rues de Constantinople. Elle est situ?e dans un quartier de Paris que les Parisiens ne connaissent gu?re; elle touche ? la rue de Versailles, ? la rue du Paon, ? la rue de la Montagne-Sainte-Genevi?ve; elle est parall?le ? la rue Saint-Victor. Peut-?tre est-elle pav?e ou macadamis?e, mais je ne r?ponds de rien: le sol est couvert de paille hach?e, de d?bris de toute esp?ce, et de marmots bien vivants qui se roulent dans la boue. A droite et ? gauche s'?l?vent deux rangs de maisons hautes, nues, sales, perc?es de petites fen?tres sans rideaux. Des haillons assez pittoresques ?maillent chaque fa?ade, en attendant que le vent prenne la peine de les s?cher. La rue de Rivoli est beaucoup mieux, mais le Petit-Gris n'avait pas trouv? ? louer rue de Rivoli. Il nous raconta sa mis?re: il gagnait un franc par jour. Sa femme tressait des paillassons et gagnait de cinquante ? soixante centimes. Leur logement ?tait une chambre au cinqui?me; leur parquet, une couche de terre battue; leur fen?tre, une collection de papiers huil?s. Je tirai de ma poche quelques bons de pain et de bouillon. Le Petit-Gris les re?ut avec un sourire l?g?rement ironique. <
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