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Read Ebook: Hermelijn by Melati Van Java

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Ebook has 5514 lines and 149028 words, and 111 pages

TH?OPHILE GAUTIER

M?NAGERIE INTIME

PARIS

ALPHONSE LEMERRE, EDITEUR 47, PASSAGE CHOISEUL, 47.

TEMPS ANCIENS

On a souvent fait notre caricature: habill? ? la turque, accroupi sur des coussins, entour? de chats dont la familiarit? ne craint pas de nous monter sur les ?paules et m?me sur la t?te. La caricature n'est que l'exag?ration de la v?rit?; et nous devons avouer que nous avons eu de tout temps pour les chats en particulier, et pour les animaux en g?n?ral, une tendresse de brahmane ou de vieille fille. Le grand Byron tra?nait toujours apr?s lui une m?nagerie, m?me en voyage, et il fit ?lever un tombeau avec une ?pitaphe en vers de sa composition, dans le parc de l'abbaye de Newstead, ? son fid?le terre-neuve Boastwain. On ne saurait nous accuser d'imitation pour ce go?t, car il se manifesta chez nous ? un ?ge o? nous ne connaissions pas encore notre alphabet.

Notre plus ancien souvenir de ce genre remonte ? notre arriv?e de Tarbes ? Paris. Nous avions alors trois ans, ce qui rend difficile ? croire l'assertion de MM. de Mirecourt et Vapereau, pr?tendant que nous avons fait <> dans notre ville natale. Une nostalgie dont on ne croirait pas un enfant capable s'empara de nous. Nous ne parlions que patois, et ceux qui s'exprimaient en fran?ais <> Au milieu de la nuit, nous nous ?veillions en demandant si l'on n'allait pas bient?t partir et retourner au pays.

Aucune friandise ne nous tentait, aucun joujou ne nous amusait. Les tambours et les trompettes ne pouvaient rien sur notre m?lancolie. Au nombre des objets et des ?tres regrett?s figurait un chien nomm? Cagnotte, qu'on n'avait pu amener. Cette absence nous rendait si triste qu'un matin, apr?s avoir jet? par la fen?tre nos soldats de plomb, notre village allemand aux maisons peinturlur?es, et notre violon du rouge le plus vif, nous allions suivre le m?me chemin pour retrouver plus vite Tarbes, les Gascons et Cagnotte. On nous rattrapa ? temps par la jaquette, et Jos?phine, notre bonne, eut l'id?e de nous dire que Cagnotte, s'ennuyant de ne pas nous voir, arriverait le jour m?me par la diligence. Les enfants acceptent l'invraisemblable avec une foi na?ve. Rien ne leur para?t impossible; mais il ne faut pas les tromper, car rien ne d?range l'opini?tret? de leur id?e fixe. De quart d'heure en quart d'heure, nous demandions si Cagnotte n'?tait pas venu enfin. Pour nous calmer, Jos?phine acheta sur le Pont-Neuf un petit chien qui ressemblait un peu au chien de Tarbes. Nous h?sitions ? le reconna?tre, mais on nous dit que le voyage changeait beaucoup les chiens. Cette explication nous satisfit, et le chien du Pont-Neuf fut admis comme un Cagnotte authentique. Il ?tait fort doux, fort aimable, fort gentil. Il nous l?chait les joues, et m?me sa langue ne d?daignait pas de s'allonger jusqu'aux tartines de beurre qu'on nous taillait pour notre go?ter. Nous vivions dans la meilleure intelligence. Cependant, peu ? peu, le faux Cagnotte devint triste, g?n?, emp?tr? dans ses mouvements. Il ne se couchait plus en rond qu'avec peine, perdait toute sa joyeuse agilit?, avait la respiration courte, ne mangeait plus. Un jour, en le caressant, nous sent?mes une couture sur son ventre fortement tendu et ballonn?. Nous appel?mes notre bonne. Elle vint, prit des ciseaux, coupa le fil; et Cagnotte, d?pouill? d'une esp?ce de paletot en peau d'agneau fris?e, dont les marchands du Pont-Neuf l'avaient rev?tu pour lui donner l'apparence d'un caniche, se r?v?la dans toute sa mis?re et sa laideur de chien des rues, sans race ni valeur. Il avait grossi, et ce v?tement ?triqu? l'?touffait; d?barrass? de cette carapace, il secoua les oreilles, ?tira ses membres et se mit ? gambader joyeusement par la chambre, s'inqui?tant peu d'?tre laid, pourvu qu'il f?t ? son aise. L'app?tit lui revint, et il compensa par des qualit?s morales son absence de beaut?. Dans la soci?t? de Cagnotte, qui ?tait un vrai enfant de Paris, nous perd?mes peu ? peu le souvenir de Tarbes et des hautes montagnes qu'on apercevait de notre fen?tre; nous appr?mes le fran?ais et nous dev?nmes, nous aussi, un vrai Parisien.

Qu'on ne croie pas que ce soit l? une historiette invent?e ? plaisir pour amuser le lecteur. Le fait est rigoureusement exact et montre que les marchands de chiens de ce temps-l? ?taient aussi rus?s que des maquignons, pour parer leurs sujets et tromper le bourgeois.

Apr?s la mort de Cagnotte, notre go?t se porta vers les chats, comme plus s?dentaires et plus amis du foyer. Nous n'entreprendrons pas leur histoire d?taill?e. Des dynasties de f?lins, aussi nombreuses que les dynasties des rois ?gyptiens, se succ?d?rent dans notre logis; des accidents, des fuites, des morts, les emport?rent les uns apr?s les autres. Tous furent aim?s et regrett?s. Mais la vie est faite d'oubli, et la m?moire des chats s'efface comme celle des hommes.

Cela est triste, que l'existence de ces humbles amis, de ces fr?res inf?rieurs, ne soit pas proportionn?e ? celle de leurs ma?tres.

Apr?s avoir mentionn? une vieille chatte grise qui prenait parti pour nous contre nos parents et mordait les jambes de notre m?re lorsqu'elle nous grondait ou faisait mine de nous corriger, nous arriverons ? Childebrand, un chat de l'?poque romantique. On devine, ? ce nom, l'envie secr?te de contrecarrer Boileau, que nous n'aimions pas alors et avec qui nous avons depuis fait la paix. Nicolas ne dit-il point:

O le plaisant projet d'un po?te ignorant Qui de tant de h?ros va choisir Childebrand!

Puis je te d?crirai ce tableau de Rembrandt Qui me fait tant plaisir; et mon chat Childebrand, Sur mes genoux pos? selon son habitude, Levant sur moi la t?te avec inqui?tude, Suivra les mouvements de mon doigt qui dans l'air Esquisse mon r?cit pour le rendre plus clair.

Childebrand vient l? fournir une bonne rime ? Rembrandt, car cette pi?ce est une esp?ce de profession de foi romantique ? un ami, mort depuis, et alors aussi enthousiaste que nous de Victor Hugo, de Sainte-Beuve et d'Alfred de Musset.

Un jour, un de nos amis, partant pour quelques jours, nous confia son perroquet pour en avoir soin tant que durerait son absence. L'oiseau se sentant d?pays? ?tait mont?, ? l'aide de son bec, jusqu'au haut de son perchoir et roulait autour de lui, d'un air passablement effar?, ses yeux semblables ? des clous de fauteuil, en fron?ant les membranes blanches qui lui servaient de paupi?res. Madame-Th?ophile n'avait jamais vu de perroquet; et cet animal, nouveau pour elle, lui causait une surprise ?vidente. Aussi immobile qu'un chat embaum? d'?gypte dans son lacis de bandelettes, elle regardait l'oiseau avec un air de m?ditation profonde, rassemblant toutes les notions d'histoire naturelle qu'elle avait pu recueillir sur les toits, dans la cour et le jardin. L'ombre de ses pens?es passait par ses prunelles changeantes et nous p?mes y lire ce r?sum? de son examen: <>

Ce r?sultat acquis, la chatte sauta ? bas de la table o? elle avait ?tabli son observatoire et alla se raser dans un coin de la chambre, le ventre ? terre, les coudes sortis, la t?te basse, le ressort de l'?chine tendu, comme la panth?re noire du tableau de G?rome, guettant les gazelles qui vont se d?salt?rer au lac.

Le perroquet suivait les mouvements de la chatte avec une inqui?tude f?brile; il h?rissait ses plumes, faisait bruire sa cha?ne, levait une de ses pattes en agitant les doigts, et repassait son bec sur le bord de sa mangeoire. Son instinct lui r?v?lait un ennemi m?ditant quelque mauvais coup.

Quant aux yeux de la chatte, fix?s sur l'oiseau avec une intensit? fascinatrice, ils disaient dans un langage que le perroquet entendait fort bien et qui n'avait rien d'ambigu: <>

Nous suivions cette sc?ne avec int?r?t, pr?t ? intervenir quand besoin serait. Madame-Th?ophile s'?tait insensiblement rapproch?e: son nez rose fr?missait, elle fermait ? demi les yeux, sortait et rentrait ses griffes contractiles. De petits frissons lui couraient sur l'?chine, comme ? un gourmet qui va se mettre ? table devant une poularde truff?e; elle se d?lectait ? l'id?e du repas succulent et rare qu'elle allait faire. Ce mets exotique chatouillait sa sensualit?.

Tout ? coup son dos s'arrondit comme un arc qu'on tend, et un bond d'une vigueur ?lastique la fit tomber juste sur le perchoir. Le perroquet voyant le p?ril, d'une voix de basse, grave et profonde comme celle de M. Joseph Prudhomme, cria soudain: <>

Cette phrase causa une indicible ?pouvante ? la chatte, qui fit un saut en arri?re. Une fanfare de trompette, une pile de vaisselle se brisant ? terre, un coup de pistolet tir? ? ses oreilles, n'eussent pas caus? ? l'animal f?lin une plus vertigineuse terreur. Toutes ses id?es ornithologiques ?taient renvers?es.

<>,--continua le perroquet.

La physionomie de la chatte exprima clairement: <>

Quand j'ai bu du vin clairet, Tout tourne, tout tourne au cabaret.

chanta l'oiseau avec des ?clats de voix assourdissants, car il avait compris que l'effroi caus? par sa parole ?tait son meilleur moyen de d?fense. La chatte nous jeta un coup d'oeil plein d'interrogation, et, notre r?ponse ne la satisfaisant pas, elle alla se blottir sous le lit, d'o? il fut impossible de la faire sortir de la journ?e. Les gens qui n'ont pas l'habitude de vivre avec les b?tes, et qui ne voient en elles, comme Descartes, que de pures machines, croiront sans doute que nous pr?tons des intentions au volatile et au quadrup?de. Nous n'avons fait que traduire fid?lement leurs id?es en langage humain. Le lendemain, Madame-Th?ophile, un peu rassur?e, essaya une nouvelle tentative repouss?e de m?me. Elle se le tint pour dit, acceptant l'oiseau pour un homme.

DYNASTIE BLANCHE

Arrivons ? des ?poques plus modernes. D'un chat rapport? de la Havane par Mlle A?ta de la Penuela, jeune artiste espagnole dont les ?tudes d'angoras blancs ont orn? et ornent encore les devantures des marchands d'estampes, nous vint un petit chat, mignon au possible, qui ressemblait ? ces houppes de cygne qu'on trempe dans la poudre de riz. ? cause de sa blancheur immacul?e il re?ut le nom de Pierrot qui, lorsqu'il fut devenu grand, s'allongea en celui de Don-Pierrot-de-Navarre, infiniment plus majestueux, et qui sentait la grandesse. Don Pierrot, comme tous les animaux dont on s'occupe et que l'on g?te, devint d'une amabilit? charmante. Il participait ? la vie de la maison avec ce bonheur que les chats trouvent dans l'intimit? du foyer. Assis ? sa place habituelle, tout pr?s du feu, il avait vraiment l'air de comprendre les conversations et de s'y int?resser. Il suivait des yeux les interlocuteurs, poussant de temps ? autre de petits cris, comme s'il e?t voulu faire des objections et donner, lui aussi, son avis sur la litt?rature, sujet ordinaire des entretiens. Il aimait beaucoup les livres, et quand il en trouvait un ouvert sur une table, il se couchait dessus, regardait attentivement la page et tournait les feuillets avec ses griffes; puis il finissait par s'endormir, comme s'il e?t, en effet, lu un roman ? la mode. D?s que nous prenions la plume, il sautait sur notre pupitre et regardait d'un air d'attention profonde le bec de fer semer de pattes de mouches le champ de papier, faisant un mouvement de t?te ? chaque retour de ligne. Quelquefois il essayait de prendre part ? notre travail et t?chait de nous retirer la plume de la main, sans doute pour ?crire ? son tour, car c'?tait un chat esth?tique comme le chat Murr d'Hoffmann; et nous le soup?onnons fort d'avoir griffonn? des m?moires, la nuit, dans quelque goutti?re, ? la lueur de ses prunelles phosphoriques. Malheureusement ces ?lucubrations sont perdues.

Minuit ?tait l'heure que nous ne devions pas d?passer pour rentrer ? la maison. Pierrot avait l?-dessus des id?es de concierge. Dans ce temps-l? nous avions form?, entre amis, une petite r?union du soir qui s'appelait <>, le luminaire du lieu ?tant compos?, en effet, de quatre chandelles fich?es dans des flambeaux d'argent et plac?es aux quatre coins de la table. Quelquefois la conversation s'animait tellement qu'il nous arrivait d'oublier l'heure, au risque, comme Cendrillon, de voir notre carrosse chang? en ?corce de potiron et notre cocher en ma?tre rat. Pierrot nous attendit deux ou trois fois jusqu'? deux heures du matin; mais, ? la longue, notre conduite lui d?plut, et il alla se coucher sans nous. Cette protestation muette contre notre innocent d?sordre nous toucha, et nous rev?nmes d?sormais r?guli?rement ? minuit. Mais Pierrot nous tint longtemps rancune; il voulut voir si ce n'?tait pas un faux repentir; mais quand il fut convaincu de la sinc?rit? de notre conversion, il daigna nous rendre ses bonnes gr?ces, et reprit son poste nocturne dans l'antichambre.

Conqu?rir l'amiti? d'un chat est chose difficile. C'est une b?te philosophique, rang?e, tranquille, tenant ? ses habitudes, amie de l'ordre et de la propret?, et qui ne place pas ses affections ? l'?tourdie: il veut bien ?tre votre ami, si vous en ?tes digne, mais non pas votre esclave. Dans sa tendresse il garde son libre arbitre, et il ne fera pas pour vous ce qu'il juge d?raisonnable; mais une fois qu'il s'est donn? ? vous, quelle confiance absolue, quelle fid?lit? d'affection! Il se fait le compagnon de vos heures de solitude, de m?lancolie & de travail. Il reste des soir?es enti?res sur votre genou, filant son rouet, heureux d'?tre avec vous et d?laissant la compagnie des animaux de son esp?ce. En vain des miaulements retentissent sur le toit, l'appelant ? une de ces soir?es de chats o? le th? est remplac? par du jus de hareng-saur, il ne se laisse pas tenter et prolonge avec vous sa veill?e. Si vous le posez ? terre, il regrimpe bien vite ? sa place avec une sorte de roucoulement qui est comme un doux reproche. Quelquefois, pos? devant vous, il vous regarde avec des yeux si fondus, si moelleux, si caressants et si humains, qu'on en est presque effray?; car il est impossible de supposer que la pens?e en soit absente.

? peu pr?s vers cette ?poque, deux de ces pr?tendus matelots qui vendent des couvertures bariol?es, des mouchoirs en fibre d'ananas et autres denr?es exotiques, pass?rent par notre rue de Longchamps. Ils avaient dans une petite cage deux rats blancs de Norv?ge avec des yeux roses les plus jolis du monde. En ce temps-l?, nous avions le go?t des animaux blancs; et jusqu'? notre poulailler ?tait peupl? de poules exclusivement blanches. Nous achet?mes les deux rats; et on leur construisit une grande cage avec des escaliers int?rieurs menant aux diff?rents ?tages, des mangeoires, des chambres ? coucher, des trap?zes pour la gymnastique. Ils ?taient l?, certes, plus ? l'aise et plus heureux que le rat de La Fontaine dans son fromage de Hollande.

Ces gentilles b?tes dont on a, nous ne savons pourquoi, une horreur pu?rile, s'apprivois?rent bient?t de la fa?on la plus ?tonnante, lorsqu'elles furent certaines qu'on ne leur voulait point de mal. Elles se laissaient caresser comme des chats, et, vous prenant le doigt entre leurs petites mains roses d'une d?licatesse id?ale, vous l?chaient amicalement. On les l?chait ordinairement ? la fin des repas; elles vous montaient sur les bras, sur les ?paules, sur la t?te, entraient et ressortaient par les manches des robes de chambre et des vestons, avec une adresse et une agilit? singuli?res. Tous ces exercices, ex?cut?s tr?s-gracieusement, avaient pour but d'obtenir la permission de fourrager les restes du dessert; on les posait alors sur la table; en un clin d'oeil le rat et la rate avaient d?m?nag? les noix, les noisettes, les raisins secs et les morceaux de sucre. Rien n'?tait plus amusant ? voir que leur air empress? et furtif, et que leur mine attrap?e quand ils arrivaient au bord de la nappe; mais on leur tendait une planchette aboutissant ? leur cage, et ils emmagasinaient leurs richesses dans leur garde-manger. Le couple se multiplia rapidement; et de nombreuses familles d'une ?gale blancheur descendirent et mont?rent les petites ?chelles de la cage. Nous nous v?mes donc ? la t?te d'une trentaine de rats tellement priv?s que, lorsqu'il faisait froid, ils se fourraient dans nos poches pour avoir chaud et s'y tenaient tranquilles. Quelquefois nous faisions ouvrir les portes de cette Ratopolis, et, montant au dernier ?tage de notre maison, nous faisions entendre un petit sifflement bien connu de nos ?l?ves. Alors les rats, qui franchissent difficilement des marches d'escalier, se hissaient par un balustre, empoignaient la rampe, et, se suivant ? la file avec un ?quilibre acrobatique, gravissaient ce chemin ?troit que parfois les ?coliers descendent ? califourchon, et venaient nous retrouver, en poussant de petits cris et en manifestant la joie la plus vive. Maintenant, il faut avouer un b?otisme de notre part: ? force d'entendre dire que la queue des rats ressemblait ? un ver rouge et d?parait la gentillesse de l'animal, nous chois?mes une de nos jeunes bestioles et nous lui coup?mes avec une pelle rouge cet appendice tant critiqu?. Le petit rat supporta tr?s-bien l'op?ration, se d?veloppa heureusement et devint un ma?tre rat ? moustaches; mais, quoique all?g? du prolongement caudal, il ?tait bien moins agile que ses camarades; il ne se risquait ? la gymnastique qu'avec prudence et tombait souvent. Dans les ascensions le long de la rampe, il ?tait toujours le dernier. Il avait l'air de t?ter la corde comme un danseur sans balancier. Nous compr?mes alors de quelle utilit? la queue ?tait aux rats; elle leur sert ? se tenir en ?quilibre lorsqu'ils courent le long des corniches et des saillies ?troites. Ils la portent ? droite ou ? gauche pour se faire contre-poids alors qu'ils penchent d'un c?t? ou d'un autre. De l? ce perp?tuel fr?tillement qui semble sans cause. Mais quand on observe attentivement la nature, on voit qu'elle ne fait rien de superflu, et qu'il faut mettre beaucoup de r?serve ? la corriger.

Vous vous demandez sans doute comment des chats et des rats, esp?ces si antipathiques et dont l'une sert de proie ? l'autre, pouvaient vivre ensemble? Ils s'accordaient le mieux du monde. Les chats faisaient patte de velours aux rats, qui avaient d?pos? toute m?fiance. Jamais il n'y eut perfidie de la part des f?lins, et les rongeurs n'eurent pas ? regretter un seul de leurs camarades. Don-Pierrot-de-Navarre avait pour eux l'amiti? la plus tendre. Il se couchait pr?s de leur cage et les regardait jouer des heures enti?res. Et quand, par hasard, la porte de la chambre ?tait ferm?e, il grattait et miaulait doucement pour se faire ouvrir et rejoindre ses petits amis blancs, qui, souvent, venaient dormir tout pr?s de lui. S?raphita, plus d?daigneuse et ? qui l'odeur des rats, trop fortement musqu?e, ne plaisait pas, ne prenait point part ? leurs jeux, mais elle ne leur faisait jamais de mal et les laissait tranquillement passer devant elle sans allonger sa griffe.

La fin de ces rats fut singuli?re. Un jour d'?t? lourd, orageux, o? le thermom?tre ?tait pr?s d'atteindre les quarante degr?s du S?n?gal, on avait plac? leur cage dans le jardin sous une tonnelle festonn?e de vigne, car ils semblaient souffrir beaucoup de la chaleur. La temp?te ?clata avec ?clairs, pluie, tonnerre et rafales. Les grands peupliers du bord de la rivi?re se courbaient comme des joncs; et, arm? d'un parapluie que le vent retournait, nous nous pr?parions ? aller chercher nos rats, lorsqu'un ?clair ?blouissant, qui semblait ouvrir les profondeurs du ciel, nous arr?ta sur la premi?re marche qui descend de la terrasse au parterre.

Un coup de foudre ?pouvantable, plus fort que la d?tonation de cent pi?ces d'artillerie, suivit l'?clair presque instantan?ment, et la commotion fut si violente que nous f?mes ? demi renvers?.

L'orage se calma un peu apr?s cette terrible explosion; mais, ayant gagn? la tonnelle, nous trouv?mes les trente-deux rats, les pattes en l'air, foudroy?s du m?me coup.

Les fils de fer de leur cage avaient sans doute attir? et conduit le fluide ?lectrique.

Ainsi moururent, tous ensemble, comme ils avaient v?cu, les trente-deux rats de Norv?ge, mort enviable, rarement accord?e par le destin!

DYNASTIE NOIRE

S?raphita mourut, deux ou trois ans apr?s, d'une angine couenneuse que les secours de l'art furent impuissants ? combattre. Elle repose non loin de Pierrot.

Pour les gens qui d?barquent en Am?rique dans une colonie ? esclaves, tous les n?gres sont des n?gres et ne se distinguent pas les uns des autres. De m?me, aux yeux indiff?rents, trois chats genblik, dan dat ik ooit weer met u praat."

>>Kan ik u dan zoo weinig schelen?"

>>Dat weet ik niet, ik heb er nooit aan gedacht en 't komt er ook niet op aan, of u mij iets of niets schelen kan."

>>Bij u misschien, maar bij mij niet."

Zij trachtte weer te schrijven maar de draad was afgebroken.

>>Ik wou dat u ging dammen met mevrouw Brant," zeide zij ongeduldig.

>>Is dat een straf?" vroeg hij op nederigen toon.

>>Neen, een voorzorgsmaatregel, om niet te maken, dat u ophoudt mij onverschillig te zijn."

>>Zal dat gebeuren als ik hier blijf?"

>>Stellig."

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