Read this ebook for free! No credit card needed, absolutely nothing to pay.
Words: 46729 in 8 pages
This is an ebook sharing website. You can read the uploaded ebooks for free here. No credit cards needed, nothing to pay. If you want to own a digital copy of the ebook, or want to read offline with your favorite ebook-reader, then you can choose to buy and download the ebook.

: Cruelle Énigme by Bourget Paul - Man-woman relationships Fiction; French fiction 19th century FR Littérature
FIRST JOURNEY.
PAGE
SECOND JOURNEY.
THIRD JOURNEY.
MAP OF THE WHITE MOUNTAINS xv
" " " 111
" " " 207
FIRST JOURNEY.
PAGE
Le souvenir de son filleul Hubert ?veilla chez le comte une nouvelle suite de r?veries. Son coup?, apr?s avoir descendu la rue du Bac, s'engageait maintenant sur les quais. Un paquet de pluie s'abattit sur la joue du vieux soldat, qui ferma le carreau rest? ouvert. La sensation soudaine du froid le fit se recroqueviller davantage dans le coin de sa voiture et dans ses pens?es. La sorte de reploiement que produit une contrari?t? physique a souvent cet ?trange effet d'aviver en nous la puissance du souvenir. Ce fut le cas pour le g?n?ral, qui se prit soudain ? r?fl?chir que depuis plusieurs semaines son filleul avait rarement pass? la soir?e rue Vaneau. Il ne s'en ?tait pas inqui?t?, sachant que Mme Liauran tenait beaucoup ? ce que son fils all?t dans le monde. Elle avait si peur qu'il ne se lass?t de leur vie ?troite. Un instinct secret for?ait maintenant Scilly ? rattacher ces absences et l'inexplicable tristesse r?pandue sur le visage des deux femmes. Il comprenait si bien que toutes les forces vives du coeur de la grand'm?re et de celui de la m?re avaient pour aboutissement supr?me l'existence de cet enfant! Et p?le-m?le il se repr?sentait les mille sc?nes d'affection passionn?e auxquelles il avait assist? depuis l'?poque o? Hubert ?tait n?. Il se rappelait les recrudescences de p?leur de Mme Castel et les migraines meurtri?res de Mme Liauran au moindre malaise de l'enfant. Il revoyait les journ?es de son ?ducation, que sa m?re avait suivie elle-m?me. Que de fois il avait admir? la jeune femme, accoud?e sur une petite table et employant ses heures du soir ? ?tudier dans un livre de latin ou de grec la page que le petit gar?on devait r?citer le lendemain! Par une de ces touchantes folies de tendresse propres ? certaines m?res que ferait souffrir le moindre divorce survenu entre leur esprit et celui de leur fils, Mme Liauran avait voulu s'associer, heure par heure, au d?veloppement de l'intelligence de son enfant. Hubert n'avait pas pris une le?on dans la chambre d'en haut du petit h?tel sans que la m?re ne f?t l?, travaillant ? quelque ouvrage de charit?, tricotant une couverture, ourlant des mouchoirs de pauvres, mais ?coutant avec toute son attention ce que disait le ma?tre. Elle avait pouss? la divine susceptibilit? de sa jalousie d'?me jusqu'? ne pas vouloir d'un pr?cepteur. Hubert avait donc re?u les enseignements de professeurs particuliers, que Mme Liauran avait pris sur les recommandations du cur? de Sainte-Clotilde, son directeur, et aucun d'eux n'avait pu lui disputer une influence dont elle n'admettait le partage qu'avec l'a?eule. Quand il avait fallu que le jeune homme appr?t l'?quitation et l'escrime, la malheureuse femme, pour laquelle une heure pass?e loin de son fils ?tait une p?riode d'angoisse ? peine dissimul?e, avait mis des mois et des mois ? se d?cider. Elle avait enfin consenti ? disposer en salle d'armes une chambre du rez-de-chauss?e de l'h?tel. Un ancien pr?v?t de r?giment, ?tabli ? Paris, et que le g?n?ral Scilly avait eu sous ses ordres au service, venait trois fois par semaine. La m?re n'osait pas dire que le seul bruit du battement des ?p?es, en ?veillant chez elle la crainte de quelque accident, lui causait une ?motion presque insurmontable. Le comte avait de m?me d?cid? Mme Liauran ? lui confier son fils pour le conduire au man?ge; mais ?'avait ?t? sous la condition qu'il ne le quitterait pas d'une minute, et chaque d?part pour cette s?ance de cheval avait encore ?t? une occasion de secr?te agonie. Toutes ces nuances de sentiments, qui avaient fait de l'?ducation du jeune homme un myst?rieux po?me de folles terreurs, de f?licit?s douloureuses, de continuelle effusion, le comte Scilly les avait comprises, si ?trang?res qu'elles fussent ? son caract?re, gr?ce ? l'intelligence de l'affection la plus d?vou?e, et il savait que Mme Castel, pour ?tre en apparence plus ma?tresse d'elle-m?me que sa fille, n'?tait gu?re plus sage. Que de regards n'avait-il pas surpris de cette femme si p?le, enveloppant Marie-Alice Liauran et Hubert d'une trop ardente, d'une trop absolue idol?trie?...
Toujours berc? par le roulement de sa voiture, le g?n?ral continuait de s'abandonner ? la crise de m?moire qu'il subissait depuis son d?part de la rue Vaneau et qui venait de lui faire repasser en un quart d'heure l'existence enti?re de ses amies; et voici qu'autour de ces deux figures d'autres visages s'?voquaient, ceux par exemple de la cousine germaine de Mme Castel, une Mme de Trans qui habitait la province une partie de l'ann?e, et qui venait, avec ses trois filles, Yolande, Yseult et Ysabeau, passer l'hiver ? Paris. Ces quatre dames s'installaient dans un appartement de la rue de Monsieur, et leur vie parisienne consistait ? entendre, d?s sept heures du matin, une messe basse dans la chapelle priv?e d'un couvent situ? rue de la Barouill?re, ? visiter d'autres couvents, ou ? travailler dans des ouvroirs durant l'apr?s-midi. Elles se couchaient vers huit heures et demie, apr?s avoir d?n? ? midi et soup? ? six. Deux fois la semaine, , comme disait le g?n?ral, passaient la soir?e chez leurs cousines. Elles rentraient ces soirs-l? rue de Monsieur ? dix heures, et leur domestique venait les chercher avec le paquet de leurs socques et une lanterne, afin qu'elles pussent traverser la cour de l'h?tel Castel sans danger. La comtesse de Trans et ses trois filles avaient des visages de paysannes, tout h?l?s et sem?s de taches de rousseur, des costumes faits ? la maison par des couturi?res que leur d?signaient des religieuses, des go?ts de parcimonie ?crits dans la mesquinerie de tout leur ?tre, et, d?tail o? se r?v?lait leur aristocratie native, des mains charmantes et des pieds d?licieux que ne parvenaient pas ? d?shonorer des chaussures de confection, achet?es dans une pieuse maison de la rue de S?vres. Le contraste le plus singulier s'?tablissait entre ces quatre femmes et un autre cousin, venu celui-l? du c?t? de la seconde Marie-Alice, George Liauran. Ce dernier repr?sentait, dans le salon de la rue Vaneau, toutes les ?l?gances. C'?tait un homme de quarante-cinq ans, lanc? dans un monde tr?s riche avec une fortune d'abord moyenne, et grossie par de savantes sp?culations de Bourse. Il avait son appartement ? son cercle, o? il d?jeunait, et, chaque soir, son couvert mis dans une des maisons dont il ?tait le familier. Il ?tait petit, maigre et tr?s brun. S'il entretenait la jeunesse de sa barbe taill?e en pointe et de ses cheveux coup?s tr?s courts par quelque artifice de teinture, c'?tait une question d?battue depuis longtemps entre les trois demoiselles De Trans qui s'h?b?taient ? voir la tenue sup?rieure de George, ses souliers du soir vernis sous la semelle, les baguettes brod?es de ses chaussettes de soie, les boutons d'or guilloch? de ses manchettes, la perle unique de son plastron de chemise, en un mot les moindres brimborions de cet homme, aux yeux brid?s et fins, dont la toilette leur repr?sentait une existence d'une prodigalit? saisissante. Il ?tait convenu entre elles qu'il exer?ait une fatale influence sur Hubert. Tel n'?tait sans doute pas l'avis de Mme Liauran, car elle avait charg? George de servir au jeune homme de chaperon dans la vie mondaine, lorsqu'elle avait d?sir? que son fils cultiv?t leurs relations de famille. La noble femme r?compensait par cette marque de confiance la longue assiduit? de son cousin. Il venait dans le paisible h?tel tr?s r?guli?rement et depuis des ann?es, soit que la s?curit? de cette affection lui f?t une douceur parmi les mensonges de la soci?t? parisienne, soit qu'il e?t con?u depuis longtemps pour Marie-Alice Liauran un de ces cultes secrets comme les femmes tr?s pures en inspirent parfois ? leur insu aux misanthropes, et George avait cette nuance de pessimisme qui se rencontre chez presque tous les viveurs de cercle. Le genre de caract?re de cet homme, qui en toute mati?re ?tait toujours inclin? ? croire au mal, faisait pour le g?n?ral l'objet d'un ?tonnement que l'habitude n'avait pas calm?; mais ce soir-l? il n?gligeait d'y r?fl?chir; le souvenir de George Liauran ne faisait qu'aviver davantage celui d'Hubert. Invinciblement le digne homme en arrivait ? l'?vidence de ce fait que ses deux amies ne pouvaient ?tre si cruellement tristes qu'? cause de leur enfant,--oui, mais pourquoi? Ce point d'interrogation, o? se r?sumait toute cette r?verie, ?tait plus pr?sent que jamais ? l'esprit du comte lorsque son ?quipage de douairi?re s'arr?ta devant sa maison. De l'autre c?t? de la porte coch?re une autre voiture stationnait, dans laquelle Scilly crut reconna?tre le petit coup? que Mme Liauran avait donn? ? son fils. cria-t-il au cocher ? travers la pluie. r?pondit une voix que Scilly reconnut avec saisissement. se dit-il; et il franchit le seuil de la porte en proie ? une curiosit? qu'il n'avait pas ?prouv?e depuis des ann?es.
En d?pit de cette curiosit? cependant, le g?n?ral ne fit pas un geste plus rapide. L'habitude de la minutie militaire ?tait trop forte chez lui pour qu'aucune ?motion en triomph?t. Il remit lui-m?me sa canne dans le porte-cannes, ?ta ses gants fourr?s l'un apr?s l'autre, et les posa sur la table de l'antichambre ? c?t? de son chapeau soigneusement plac? sur le c?t?. Son domestique lui enleva son pardessus avec la m?me lenteur. Alors seulement il entra dans la pi?ce o? ce domestique venait de lui dire que le jeune homme l'attendait depuis une demi-heure. C'?tait une salle d'un aspect triste et qui indiquait la simplicit? d'une existence r?duite ? ses besoins les plus stricts. Des rayons de bois de ch?ne, surcharg?s de livres dont la seule apparence r?v?lait des publications officielles, couraient sur deux des c?t?s. Des cartes et quelques troph?es d'armes d?coraient le reste. Un bureau plac? au milieu de la pi?ce, ?talait des papiers class?s par groupes, notes du grand ouvrage que le comte pr?parait ind?finiment sur la r?organisation de l'arm?e. Deux manches de lustrine pli?es avec m?thode ?taient pos?es entre les ?querres et les r?gles. Un buste du mar?chal Bugeaud ornait la chemin?e garnie d'une grille o? un feu de coke achevait de br?ler. Cette pi?ce carrel?e ?tait pass?e au rouge et le tapis sur lequel portaient les pieds de la table les d?passait ? peine. Sur cette table posait une lampe de cuivre poli, allum?e en ce moment, et l'abat-jour de carton vert faisait tomber la clart? sur le visage du jeune Liauran, qui regardait le feu, assis de c?t? sur le fauteuil de paille et son menton appuy? sur sa main. Il ?tait ? ce point absorb? dans sa r?verie qu'il paraissait n'avoir entendu ni le roulement de la voiture, ni l'entr?e du g?n?ral dans la pi?ce. Jamais non plus ce dernier n'avait ?t? frapp?, comme ? cette minute, de l'?tonnante ressemblance qu'offrait la physionomie de cet enfant avec celle des deux femmes qui l'avaient ?lev?. Si Mme Liauran paraissait d?j? plus fr?le que sa m?re, moins capable de suffire aux amertumes de la vie, cette fragilit? s'exag?rait encore chez Hubert. Son frac de drap mince, car il ?tait en tenue de soir?e avec un bouquet blanc ? la boutonni?re, dessinait ses minces ?paules. Les doigts qu'il allongeait contre sa tempe avaient la finesse de ceux d'une femme. La p?leur de son teint, que l'extr?me r?gularit? de sa vie teintait d'ordinaire de rose, trahissait, en cette heure de tristesse, la profondeur du retentissement que toute ?motion ?veillait dans cet organisme trop d?licat. Un cercle de nacre se creusait autour de ses beaux yeux noirs; mais, en m?me temps, un je ne sais quoi de tr?s fier dans la ligne du front coup? noblement et du nez ? peine busqu?, le pli de la l?vre o? s'effilait une moustache sombre, l'arr?t du menton frapp? d'une m?le fossette, d'autres signes encore tels que la barre des sourcils fronc?s, trahissaient l'h?r?dit? d'une race d'action chez l'enfant trop c?lin? des deux femmes solitaires. Si le g?n?ral avait ?t? aussi bon connaisseur en peinture qu'il ?tait expert en armes, il e?t certainement song? devant ce visage, ? ces portraits de jeunes princes, peints par Van Dyck, o? la finesse presque morbide d'une race vieillie se m?lange ? la persistante fiert? d'un sang h?ro?que. Le g?n?ral, apr?s s'?tre arr?t? quelques secondes ? cette contemplation, marcha vers la table. Hubert releva cette t?te charmante que ses boucles brunes, en ce moment d?rang?es, achevaient de rendre pareille aux portraits ex?cut?s par le peintre de Charles Ier; il vit son parrain et se leva pour le saluer. Il ?tait bien pris dans une taille petite, et rien qu'? la fa?on gracieuse dont il tendait la main, on devinait la longue surveillance des yeux maternels. Nos mani?res ne sont-elles pas l'oeuvre indestructible des regards qui nous ont suivis et jug?s durant notre enfance?
Free books android app tbrJar TBR JAR Read Free books online gutenberg
More posts by @FreeBooks

: Descriptive Analyses of Piano Works For the Use of Teachers Players and Music Clubs by Perry Edward Baxter - Piano music Analysis appreciation